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One Health : « tous engagés pour une seule santé »

Plusieurs institutions, associations et syndicats, dont la FNSEA, ont présenté le 3 novembre à la Maison de la Chimie le Livre blanc "Une seule santé en pratique", fort de 36 propositions. Ces entités souhaitent que les politiques prennent ce sujet à bras le corps.

One Health : « tous engagés pour une seule santé »

De l’avis même des intervenants, le concept même de One Health (une seule santé ou santé globale en français) n’est pas simple à définir. Mis en avant depuis le début des années 2000, il promeut une approche unifiée de la santé humaine, animale et environnementale, tant à l’échelle locale que planétaire. Autrement dit, si l’activité humaine a un impact sur l’environnement et la santé animale, l’environnement et les animaux en ont un sur la santé humaine. « N’oublions pas que plus de la moitié des maladies humaines sont d’origine animale, en particulier de la faune sauvage », a indiqué le député Jean-Baptiste Moreau (LREM, Creuse). Si chacun reconnaît que le sujet est primordial et que le One Health est aujourd’hui une réalité, il reste à lui déterminer un périmètre pertinent. Ici les avis divergent : Arnaud Bedin, directeur médical de Boehringer Ingelheim France, est favorable à une approche très globale « humaniste et scientifique », allant jusqu’à inclure l’hippothérapie pour les personnes handicapées par des séquelles d’accident vasculaire cérébral. En revanche, le docteur Jean Carlet, président d’honneur de Waaar (lire encadré) entend concentrer le sujet sur des aspects plus scientifiques comme l’antibiorésistance par exemple. « C’est d’ailleurs de cette antibiorésistance qu’est née la conscience des agriculteurs sur le concept One Health », a rebondi, la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert. Pour Jean Carlet, ce thème est une bonne stratégie pour parler de santé globale « à mettre en lien avec le concept de développement durable, car les antibiotiques sauvent aussi bien la vie des animaux que celle des hommes ». Ce que confirme le docteur Jean-Pierre Orand, directeur de l’Agence nationale du médicament vétérinaire quand il affirme que « les antibiotiques sont indispensables à la santé animale, même pour protéger l’homme ». Plus nuancé, le docteur Alexandre Bleibtreu, infectiologue à l’hôpital La Pitié-Salpêtrière, souligne que l’impact des antibiotiques sur le microbiote humain est multifactoriel et surtout mal connu. Il faut réfléchir à des alternatives

Décloisonner

Christiane Lambert demande à ce que la santé globale s’appuie sur de « vraies références scientifiques » afin de convaincre les plus sceptiques. « Il faut aussi éduquer à l’incertitude du vivant dans une société qui ne veut plus de risques et faire de l’alimentation la porte d’entrée de ce concept », a-t-elle ajouté, rappelant qu’avec 850 millions de malnutris et environ deux milliards de personnes obèses ou en surpoids, l’alimentation et l’éducation à l’alimentation sont de réels problèmes. L’alimentation, « c’est elle qui concentre l’aspect biologique (sans alimentation pas de vie !), psychosocial et patrimonial du concept Santé globale », a renchéri Jean-Louis Rastoin, professeur honoraire à Montpellier SupAgro qui milite pour « re-territorialiser » l’alimentation dans les 242 régions européennes et rapprocher la proximité de ce concept avec l’agrosphère. Mais la vision de One Heath ne serait-elle pas un peu trop occidentale, a laissé entendre Jean Carlet ? Certains pays en voie de développement n’ont accès ni à l’alimentation, ni aux antibiotiques qu’ils soient pour les animaux ou pour les humains. « Or le One Health doit être pour tout le monde et tous les pays », a-t-il plaidé. 

Malgré ses vingt ans d’existence, le concept de santé globale reste encore à l’état embryonnaire. Il demande à être mieux paramétré, invite à décloisonner les domaines de recherche et à évoluer vers une gouvernance partenariale, transversale et plus internationale. « Car il faut que nous soyons tous engagés pour une seule santé », a conclu Christiane Lambert. 

Les signataires du Livre Blanc

FNSEA ; World alliance against antiobotic resistance (WAAAR) ; Institut Pasteur de Lille ; Académie d’agriculture de France ; Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL) ; Syndicat de l’industrie du médicament et diagnostic vétérinaires (SIMV) ; Société de pathologie de langue française (SPLIF) et Union des industries de la protection des plantes (UIPP). 

Les principales propositions du Livre blanc

Fournir des clés de lecture du concept One Health. Tel est l’objectif de ce Livre blanc qui contient 36 propositions et auquel ont participé une vingtaine de contributeurs. Il entend notamment « renforcer la place des végétaux dans le concept » et « lancer une concertation sur la place des produits phytosanitaires et du biocontrôle ». Ce Livre blanc propose également de « créer un guide de bonnes pratiques agricoles et agroalimentaires, au niveau interministériel », de lancer une consultation sur le changement de modes d’élevage (biosécurité, bien-être animal, etc.) et de décliner cette approche dans toutes les politiques publiques au niveau européen. Identifier les freins à la vaccination en santé animale et humaine ainsi que renforcer les budgets de recherche et développement (R&D) ou encore harmoniser les règles One Health au plan européen constituent des attentes fortes de contributeurs et des signataires.