Agrikolis
« Le concept qu’il fallait ! »

Françoise Thomas
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L’information a de quoi susciter l’intérêt et la curiosité : en deux ans, Agrikolis a redistribué 1 million d’euros à ses 200 agriculteurs partenaires. Qu’en est-il exactement de cette activité d’appoint, quels sont les avantages et les contraintes de la transformation de son exploitation en point relais pour colis volumineux ? Olivier Picoche l’un des agriculteurs de Saône-et-Loire inscrit explique tout.

« Le concept qu’il fallait ! »
Olivier Picoche réceptionnant la livraison de colis encombrants du jour.

Depuis la route, la signalisation est claire : c’est bien ici à la ferme du Charmelet qu’en tant que particulier on peut récupérer sa commande expédiée via Agrikolis. Clairement affichés également, la notion de vente à la ferme ainsi que les horaires d’ouverture. L’exploitation d’Olivier Picoche située à Baudrières était idéale pour être relais Agrikolis. « Lorsque l’audit a été fait en 2019, détaille l’agriculteur, la proximité directe avec un axe routier passant a été déterminante. Il y avait également suffisamment d’espace pour les semis qui viennent livrer et une présence régulière assurée grâce au magasin ». Dernières obligations auxquelles répondait l’endroit : un local fermé de minimum 50 m² et l’appareil de levage.

Au moins 15 colis hebdo

À l’époque de l’audit, c’est l’ancien propriétaire qui exploite encore cet élevage avicole du Chalonnais. Mais Olivier Picoche et sa femme Joia ont déjà le projet de lui succéder... ce qui est effectif depuis septembre 2020. « Nous sommes propriétaires de l’exploitation depuis le 15 septembre et partenaires Agrikolis depuis le 28 septembre ! », souligne-t-il. Car pour lui, l’opportunité était trop belle pour drainer des clients jusqu’à ses poulets fermiers et produits dérivés. Et le couple ne s’y est pas trompé : « nous sommes très satisfaits, c’est une idée exceptionnelle, c’est le concept qu’il fallait chez un agriculteur ! ». Avec une moyenne de 15 à 20 colis par semaine, cela draine une clientèle qui ne serait sinon sans doute jamais venue sur l’exploitation. « Neuf particuliers sur dix ne nous connaissent pas. Trois sur dix passent par notre boutique et certains reviennent même sans colis à venir récupérer ! », constate-t-il.

Les horaires pour venir récupérer les colis correspondent bien évidemment à ceux de l’ouverture de la boutique. Et ainsi cinq jours sur sept (du mardi au samedi), de nouveaux clients arrivent jusque dans la cour de la ferme. « Cela nous fait une publicité énorme ».

Surtout que le couple écoule également ses produits dans d’autres magasins de producteurs du secteur, donc désormais les clients ne sont même plus obligés de revenir à Baudrières pour continuer d’acheter ses volailles...

Un revenu, une organisation

Si Olivier Picoche n’a que sept mois de recul sur cette activité, il constate un nombre relativement régulier de colis hebdomadaires livrés, « avec les pics de la semaine du black Friday et des périodes des fêtes de Noël et de Pâques ».

Avec entre 4 et 10 € net par colis dans la poche de l’agriculteur (en fonction de la taille du produit), « cela nous apporte minimum 300 € par mois de revenu complémentaire », annonce-t-il.

En parallèle, malgré tout, quelques contraintes ou tout du moins, une organisation drastique à laquelle impossible de déroger. « Nous recevons une livraison par semaine, le lundi, explique Olivier Picoche, mais depuis quelque temps, nous testons aussi le Relais express qui peut se traduire par un camion par jour ». Ce service, proposé uniquement pour l’instant par CDiscount dans le contexte Agrikolis, signifie, comme son nom l’indique, une livraison rapide aux clients. Une situation forcément plus exigeante aussi pour l’agriculteur réceptionneur.

Car sa présence est indispensable : c’est à lui de décharger les colis du semis et de les manipuler jusqu’au local de stockage, c’est également à lui d’enregistrer tous les colis reçus et ceux qui repartent (car refusés par les clients ou, la plupart du temps, non récupérés par ceux-ci).

Nouvel aménagement

Chacun peut malgré tout s’organiser et Olivier Picoche a décidé d’imposer un horaire de livraison : « chez moi, les livraisons ne sont possibles qu’à partir de 14 h, ce qui peut être contraignant pour les chauffeurs, mais je n’ai pas le choix, c’est une question d’organisation du travail de mon côté ».

Autre "contrainte" pour Olivier Picoche : il est le seul à pouvoir se servir du matériel de chargement, d’où sa présence à lui, indispensable… « Il faut bien savoir aussi que le moment de la livraison demande du temps qu’il faut absolument pouvoir dégager ». Ainsi, il compte environ une heure par jour consacrée à la manipulation des colis et à leur enregistrement.

Mais pour l’instant, il ne voit que des avantages à cette adhésion qui participe en parallèle aux aménagements envisagés par le nouveau couple propriétaire. À terme en effet, ils souhaitent déplacer la boutique pour l’installer un peu plus au cœur des bâtiments. Ce serait l’occasion aussi de rapprocher encore plus le magasin et l’espace de stockage en permettant un accès direct de l’un à l’autre. Les clients Agrikolis découvriront donc encore plus l’activité agricole des éleveurs.

Les productions du Charmelet

Les productions du Charmelet

La ferme du Charmelet de Baudrières, c’est un élevage avicole de plus de 6.000 cous nus rouge, avec abattage et découpe sur place. « Nous faisons également 10 pintades par semaine et nous voulons développer un atelier vente d’œuf, courant 2021 ». Les 30 ha de parcelles accueillent les dix bâtiments des volailles plein air et servent à la production de céréales pour l’autoconsommation. Restent quelques hectares aussi pour de la pension de bovins.

Olivier Picoche et sa femme Joia sont tous deux co-gérants de cette EARL et deux salariés à temps partiel sont présents le lundi pour l’activité d’abattage. Joia, elle, gère l’atelier de transformation pour proposer notamment charcuterie de volailles, paupiettes et tourtes.

Le principe Agrikolis

Le principe Agrikolis

Le service Agrikolis est disponible sur certaines plateformes d’e-commerce partenaires et concerne les colis les plus lourds ou volumineux (meubles, gros électroménager, tapis de course, etc.), ceux qui ne peuvent être récupérés dans un point relais colis classique.

Avantages pour le client particulier : il évite les frais de livraison à domicile beaucoup plus importants, il choisit le point relais Agrikolis qui lui convient et le jour et l’heure de sa venue sur l’exploitation. Donc plus besoin de bloquer une journée complète chez soi pour une livraison de quelques minutes. Une fois sur place, ce client pourra bénéficier de l’aide au chargement de la part de l’agriculteur.

Pour l’agriculteur, chaque colis représente un complément de revenu et un client potentiel pour son espace de vente lorsqu’il en a un (ce n’est pas une obligation). Aucun investissement à prévoir à partir du moment où l’exploitant dispose d’un matériel de chargement et d’un local suffisamment grand qui puisse être fermé à clé. Il enregistre les colis via l’appli spécifiquement développée Kolisoft et doit être présent au moins huit heures par semaines (par quatre plages de deux heures chacune).

L’objectif d’Agrikolis pour 2021 est d’avoir 400 fermes relais. Trois sont actuellement déjà opérationnels en Saône-et-Loire. Dans ce département comme ailleurs, les candidats sont déjà nombreux, et vont peu à peu venir étoffer le réseau...