Contre le dépérissement du vignoble
Quatre axes pour lutter

Publié par Cédric Michelin
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Face au dépérissement du vignoble, aux causes encore troubles, et qui se caractérise par une chute du rendement et une mortalité brutale du cep, le Cniv (Comité national des interprofessions viticoles), avec le soutien de FranceAgriMer, a présenté ses quatre axes de lutte, le 7 avril : formation, reconquête de la production de plants, coordination des connaissances et collaboration serrée professionnels-scientifiques.
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Pour le premier axe, la formation, le plan national propose la création d’un réseau national d’expérimentation. Dans une vidéo, Michel Chapoutier, président d’Inter Rhône, a déclaré que « tout le monde doit être formé », notamment dans « l’art de la taille de la vigne » : viticulteurs, salariés, entreprises de travaux agricoles.

Reconquérir la production de plants



Le deuxième axe vise la reconquête de la production de plants avec le concours des pépiniéristes, la concurrence italienne et allemande risquant de détrôner la suprématie française mondiale dans le domaine des cépages, a alerté Jean-Marie Barillère, président du Cniv. En effet, les surfaces de vignes-mères, ces plants qui donnent naissance aux porte-greffes et aux greffons (ces derniers sont les plants de cépages vendus par les pépiniéristes aux viticulteurs) ont diminué de 23% en dix ans. « La production française est passée de 300 millions de plants en 2000 à 150 en 2010 », en raison de l’inventaire sanitaire de 2000 et de la crise viticole de 2005, a expliqué David Amblevert, président de la Fédération française des pépinières viticoles.
Or, depuis ces années d’effondrement, la demande est repartie à la hausse en raison de la restructuration du vignoble.
Les pépiniéristes sont en train de relever la production à 220 millions de plants par an. Pour cela, a détaillé David Amblevert, il faut continuer à augmenter les surfaces de vignes-mères (de 1.500 hectares à 1.800-1.900 d’ici quatre à cinq ans). De plus, le président de la Fédération française des pépiniéristes propose de développer des domaines viticoles dédiés aux vignes-mères (sans production de raisin), isolées du reste du vignoble et protégées contre les contaminations. Pour cela, un financement collectif de cette production « potentiellement non rentable, mais d’intérêt crucial pour tous les acteurs de la filière » est nécessaire. À l’issue du séminaire, David Amblevert s’est rendu au ministère de l’Agriculture pour exposer son plan au conseiller technique du ministre, Sébastien Couderc.

Rassembler les connaissances grâce au numérique



Un troisième axe propose de rassembler toutes les connaissances. Qu’il s’agisse du simple constat de dysfonctionnement d’un pied de vigne (symptômes visuels, parasite) ou du suivi des températures et du stress hydrique de la vigne, la collecte pourrait s’appuyer sur les relais classiques tels les réseaux de parcelles et aussi « sur des moyens plus innovants (relevés et déclarations de viticulteurs sur smartphone, réseau de viticulteurs formés) », a souligné Muriel Barthe, directrice technique du CIVB (Centre interprofessionnel du vin de Bordeaux). Le tout échangé par Internet dans un « réseau de réseaux ».

Répondre à des milliers de questions



Un dernier axe appelle à une collaboration plus imbriquée entre professionnels et scientifiques. Les thèmes sont nombreux et denses en connaissances : la relation entre rendement et longévité, les interactions entre la vigne et le sol, les stratégies de défense de la vigne dans un contexte de réduction des molécules disponibles. À plus long terme s’ouvre un champ encore inexploré et qui est tout un domaine scientifique à lui seul : les interactions entre la vigne et les micro-organismes.
Les questions sont nombreuses. Lors des débats de la salle, Gérard-Pierre Aussendou, responsable des achats de raisin à la maison Bouchard (Beaune), s'est étonné de ces vignes de 15-20 ans qui sont atteintes par le dépérissement, alors que des vignes de 60 ans « se portent bien et ont de bons rendements ». Un constat partagé...




Les pratiques culturales passées au crible aussi




Point important de la mission conduite par le Cniv et FranceAgriMer en 2015, pour mieux lutter contre l’érosion durable des rendements viticoles et la forte mortalité des ceps de vigne, il fallait raisonner « dépérissements » et non pas seulement « maladies du bois ». Cela signifie qu’il faut non seulement prendre en compte les agressions biologiques qui frappent le vignoble (virus, champignons, bactéries, phytoplasmes, etc), mais aussi les pratiques culturales, les stratégies d’exploitation et les contraintes technico-économiques.