Innovation
Bientôt des tracteurs autonomes dans les fermes allaitantes ?

Soucieuse de faciliter le travail des éleveurs, la Chambre d’agriculture de Saône-et-Loire a demandé à des étudiants de l’université technique Belfort Montbéliard d’imaginer comment automatiser les déplacements d’un tracteur dans une exploitation allaitante. De cette tempête de cerveaux a émergé une solution prometteuse de guidage électromagnétique par le sol. De quoi concevoir des tracteurs réalisant le pansage des animaux de manière complètement autonome.

Bientôt des tracteurs autonomes dans les fermes allaitantes ?

Pour sa troisième édition, l'Innovation Crunch Time organisé par l’université technique Belfort Montbéliard (UTBM) a réuni plus de 1.600 étudiants autour de projets innovants. Sur cette foire de l’innovation, les élèves ingénieurs ont planché durant cinq jours sur des thèmes proposés par des professionnels : industriels, PME, start-ups. Depuis l'année dernière, la Chambre d'Agriculture de Saône-et-Loire fait partie de ces porteurs de projets qui s’en remettent au talent de jeunes universitaires pour imaginer les innovations de demain. L’un de ces sujets présentés par la Chambre d’agriculture portait sur l'automatisation des déplacements des tracteurs dans une ferme de vaches allaitantes.

Tâches rébarbatives

 « Nous voulons réfléchir à une automatisation des déplacements quotidiens des tracteurs dans une exploitation de vaches allaitantes. La problématique se pose notamment en plein hiver. Les tâches sont répétitives et finalement rébarbatives pour nos agriculteurs... Nous voulons voir si on peut automatiser certaines tâches, comme par exemple apporter du foin aux bêtes ; distribuer l’alimentation… », expose Mickael Burlaud, technicien à la Chambre d’agriculture de Saône-et-Loire.

Le sujet est assez éloigné des thèmes industriels auxquels sont habitués les étudiants ingénieurs. « Nous sommes allés rechercher ce qui existait sur le marché des véhicules autonomes. Mais rien ne correspondait... Nous avons vite vu qu'il y avait beaucoup de choses à faire dans une ferme. Nous devions faire des choix », confie l’un des étudiants. En clair, à ce stade de la recherche, et face à la grande diversité des tâches, il n’était pas possible d’envisager l’automatisation du chargement, voir même de la distribution des aliments ou des fourrages. Aussi, les jeunes ont-ils choisi de restreindre la réflexion à l'automatisation des déplacements du tracteur dans la ferme. Imaginer comment le déplacement d’un tracteur pourrait-il devenir autonome…

Guidage par bandes électromagnétiques

Un premier obstacle est rapidement apparu du fait de la structure même des bâtiments. « On pourrait géolocaliser les tracteurs via le wifi. Mais il y a du métal partout dans les bâtiments, le signal ne peut pas passer », explique un étudiant. Même écueil pour le GPS.

De la tempête de cerveaux de cet Innovation Crunch Time a émergé une idée : celle de guider le tracteur grâce à des bandes électromagnétiques implantées au sol et des capteurs fixés sur le tracteur. Une idée simple et efficace car peu sujette à la poussière des étables. Des capteurs permettent par ailleurs de localiser le tracteur sur son parcours. Le système IsoBus dont sont équipés la plupart des engins modernes a été exploité pour la commande à distance.

Dans la cour de ferme aussi

Dans la configuration spécifique d’une exploitation agricole, un écueil émergeait toutefois. Si le sol dans les bâtiments est plat, ce n'est pas le cas dans la cour de ferme. La solution de guidage par bande électromagnétique n’était donc pas adaptée à l’extérieur. Jamais à court d’idées, les étudiants ont imaginé des systèmes d'aimants à placer enterrés dans le sol.

Pour la sécurité, les concepteurs ont imaginé des capteurs spécifiques placés sur le tracteur qui décèleraient les obstacles. Ce système pourrait même envoyer une alerte sur le téléphone mobile de l’agriculteur. Cela pourrait même être une vidéo visualisable sur smartphone…

Dans la réflexion, les étudiants ont pris en compte le risque de pollution aux ondes. A retenir aussi que le tracteur autonome est pour l’heure interdit dans le domaine public en France. Le concept ne peut être utilisé que dans un périmètre strictement privé, informe Mickael Burlaud.

L'an passé, un travail mené sur la vache connectée avait débouché sur un partenariat entre la chambre d'agriculture et l'UTBM dans le but de développer un modèle qui pourrait plus tard être commercialisable. « Il n'est pas impossible que l'on pousse l'idée plus loin », confie Mickael Burlaud à propos du travail sur le tracteur autonome. L’UTBM dispose d’un laboratoire - le Crunch Lab où les étudiants pourraient imaginer un prototype mettant en œuvre leurs idées. Ce prototype pourrait être testé sur la ferme expérimentale de Jalogny et si le test s’avérait concluant, le concept pourrait être soumis à des développeurs industriels, confie Mickael Burlaud. L’idée, si le concept faisait ses preuves, pourrait à terme déboucher sur une solution commerciale à la portée des éleveurs.