Chambre de commerce et d’industrie
Les nouveaux maîtres du fret local !

Cédric MICHELIN
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La CCI de Saône-et-Loire va opérer une double mue. En fusionnant avec sa collègue de Côte d’Or, elle formera la seule CCI "Métropole" de la région, à côté justement de la CCI Bourgogne Franche-Comté. De quoi développer encore ses services, toujours tournés largement vers les entreprises, le commerce et l’industrie, avec un large panel de formations notamment. La nouvelle CCI Métropole entend également s’imposer sur la logistique via ses activités d’Aproport et en devenant une entreprise ferroviaire.

Les nouveaux maîtres du fret local !

La logistique est la clé du commerce mondial. Ce développement s’est fait avec des containers maritimes et des bateaux les transportant vers la route (camions…) ou le rail (trains). Mais n’allez pas croire que le monde ne continue pas de s’interconnecter de partout : à l’image du gazoduc Russe vers l’Allemagne, des Routes de la soie en partance de Chine, des câbles Internet sous-marin, des constellations de micro-satellites… La logistique forme l’économie moderne et rebat les cartes à l’image d’Amazon, logisticien du web (AWS) qui peut se permettre de rogner ses marges sur la livraison physique de biens à ses clients.
La CCI de Saône-et-Loire l’a depuis longtemps compris. La Bourgogne aussi, de part sa situation centrale en Europe, au carrefour de nombreuses routes. Autoroutes, RCEA, Saône, canal de Bourgogne… les solutions ne manquent pas.
Les ports, Aproport de Chalon Sud et Mâcon Sud sont tous deux gérés par la CCI 71. Ce sont d’ailleurs davantage des plateformes multimodales où se croisent camions, bateaux et convois ferrés.  Ils proposent des solutions multimodales - rail, routes – pour le transport de toutes sortes de marchandises, notamment céréales, bois, graviers… Situé sur l’axe Rhône-Saône, à deux jours maximum par voie fluviale des ports maritimes de Marseille-Fos et Sète, nos coopératives régionales en profitent. Au total, près de 3 millions de tonnes, dont 80.000 conteneurs, transitent chaque année par ses plateformes multimodales.


Marchés de la neutralité carbone

Si le président de la CCI 71 se montre prudent face à l’histoire récente – se remémorant le canal Rhin-Rhône coulé par la ministre écologique Dominique Voynet, le « miroir aux alouettes » Saône-Moselle ou encore voyant l’activité fluviale baisser l’an dernier (-1%) – mais voulant croise à la volonté politique actuelle de développer le fluvial (paquet Mobilité 2030), Michel Suchaut entend résolument apporter des solutions aux entreprises de Saône-et-Loire pour atteindre « la neutralité carbone » qui permettra de décrocher de nouveaux marchés demain. Le développement du transport ferroviaire et la réforme en France du "cabotage", le transport sur de faibles distances sur le territoire national par un transporteur étranger, devrait inciter un peu plus les entreprises.
Cette « transition écologique » impulsée par les moyens logistiques fluviaux et ferroviaires proposés par Aproport contribuent ainsi pour de vrai au développement du report modal et à la baisse des rejets de CO2. La CCI estime qu’elle fait économiser aux chargeurs 20.000 tonnes par an de CO2, qui ne sont donc pas rejetés. En France, le fret non routier à destination et en provenance des ports devrait voir son marché doubler d’ici 2025.


Une CCI entreprise ferroviaire

Le directeur de la CCI 71, Pascal Leynes donnait un exemple concret avec les transports Alainé qui s’équipent de remorques P400 pouvant transporter sur train jusqu’à 44 t « permet de gagner un 33 t tous les six camions » pour des chargeurs industriels (Nestlé…). Ces remorques sont ensuite transportées sur des trains (c’est la fameuse autoroute ferroviaire de Mâcon), vers le nord ou le sud de la France, dont Aproport assure la manutention et l’acheminement vers la gare ferroviaire avec ses propres moyens, personnel et locomotive de la CCI.
Fort de ses terminaux embranchés au réseau ferré national, Aproport peut donc ambitionner de devenir un hub multi-sites de dimension régionale pour mieux connecter ces plateformes et donc nos entreprises au reste de l’Europe continentale, voire même au-delà, avec les perspectives d’une nouvelle « route de la soie », attendue « probablement à Chalon en 2022 ». 
Afin de mener à bien ce projet ambitieux et à fort potentiel de croissance pour tous, la CCI 71 – future CCI Métropole de Bourgogne - envisage donc de devenir un opérateur ferroviaire de proximité proposant des navettes ferroviaires compétitives entre les plateformes gérées par la CCI71. « Un terminaliste de proximité » dans le jargon. Aproport dispose en effet d’un solide socle de compétences et de moyens depuis plus de dix ans, la CCI est donc prête à s’engager dans l’obtention de la licence ferroviaire et du certificat de sécurité qui lui permettra l’accès au réseau ferré national permettant de relier par le rail les ports entre eux. Et Michel Suchaut d’inviter, à la veille de laisser sa place à la CCI, « à réfléchir à la stratégie logistique sur notre territoire » avec un maximum d’acteurs économiques, dont l’agriculture et la viticulture évidemment.

CCI Métropole de Bourgogne : « on change de catégorie »

CCI Métropole de Bourgogne : « on change de catégorie »

Michel Suchaut savoure ce moment. L’histoire récente, avec le Covid, lui a donné raison. À tous les discours rabâchant que les CCI départementales ne servaient à rien, lui qui plaidait au contraire pour leur renforcement, le Ministre de l’Économie (ancien de l’Agriculture), Bruno Le Maire lui a donné raison et s’est immédiatement tourné vers elles pour expliquer son Plan de Relance et accompagner les entreprises dans la transition numérique et écologique. « Notre force, c’est l’efficacité de nos réseaux locaux », tranche le président-entrepreneur. 
Alors comment capitaliser sur « ses quatre valeurs cardinales : agilité, proximité, qualité, innovation », lorsque les ressources fiscales ont été divisées par trois, bien que 80 % du financement de la CCI71 proviennent des services (formations, Aproport…). La réponse était dans une « fusion » avec la CCI 21 qui avait déjà débuté sur les fonctions supports (communication…), les pôles formation ou les plateformes multimodales. « Cette association d’identités complémentaires avec Dijon fera que nous serons plus robustes et aussi la seule CCI Métropole en Bourgogne Franche-Comté. Nous changeons ainsi de catégorie et nous serons assis à la table des métropoles comme Lyon, Nantes… Nous pourrons aussi devenir Agence de développement et entreprise ferroviaire ainsi », se félicite Michel Suchaut. Un mal pour un bien qui s’accompagne de plus de responsabilité avec les territoires, tout en gardant la même proximité. « Il ne s’agit pas d’une centralisation des activités » vers Dijon, rassure-t-il. La nouvelle CCI Métropole de Bourgogne sera au service des 48.000 entrepreneurs des deux départements, verra officiellement le jour le 29 novembre 2021, et sera composée de 50 nouveaux chefs d’entreprise élus, dont moitié venant de Saône-et-Loire. 

Le Cifa Mercurey change de main

La CCI de Saône-et-Loire co-gère à parité, avec la Chambre de Métiers et de l’Artisanat (CMA) régionale, le Cifa Jean Lameloise à Mercurey (au sein de l’association AIFA). Cette gouvernance va être modifiée puisque les activités de la CCI au Cifa vont être transférées à la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Région Bourgogne Franche-Comté. Ce transfert se fait naturellement et logiquement, la quasi-totalité des alternants réalisant un apprentissage dans ce CFA dépendant de la Chambre des Métiers : coiffeur, pâtissier, boulanger, boucher, traiteur, charcutier, photographe… 
Soit en formation continue ou en alternance, au total, la CCI 71 a encadré l’an dernier près de 5.530 stagiaires en formations qui ont été accueillis dans les centres de formation de Dijon, Beaune, Chalon-sur-Saône et Mâcon. Plusieurs nouveaux parcours sont à noter comme l’ouverture d’une nouvelle formation Bac + 5 : Manager de la Chaîne Logistique - Parcours multimodalité et transition écologique. Cette dernière formation va dans le sens du développement des flux logistiques dans notre région. À noter également que le CFA Automobile a déjà recruté plus de 640 apprentis pour 2021-2022. Il faut dire que le CFA Auto se tourne vers le futur et forme déjà aux nouvelles technologies, autour de la voiture connectée ou autonome, en passant par la gestion des datas ou le moteur à hydrogène. Pour rappel, pour encourager l'embauche de salariés en contrat d'apprentissage ou de professionnalisation, la prime à l'embauche a été repoussée jusqu'à fin 2021. Elle permet à l’entreprise en fonction du niveau d’étude de toucher 5 ou 8.000 euros pour l’embauche d’un apprenti.