Gaec du Confluent à Charnay-lès-Chalon
Un robot a remplacé le racleur

Marc Labille
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À défaut de pourvoir construire un bâtiment neuf, Adrien Vérot et Sébastien Calvo ont fait évoluer leur stabulation en misant sur le confort et la simplification du travail. Depuis l’hiver dernier, un robot assure l’évacuation du lisier des couloirs bétonnés.

Un robot a remplacé le racleur
Sébastien Calvo et Adrien Vérot sont à la tête d’un troupeau de 58 montbéliardes produisant plus de 9.000 litres de lait par vache et par an. Ferrari, l’une des vaches du cheptel, grande championne à Louhans et qui a déjà concouru à Paris et au Montbéliarde Prestige, a atteint 12.500 litres.

Adrien Vérot et Sébastien Calvo sont associés au sein du Gaec du Confluent à Charnay-lès-Chalon. Couvrant 190 hectares entre la Saône et le Doubs, l’exploitation se partage entre 110 hectares de grandes cultures et un atelier laitier de 58 montbéliardes pour 560.000 litres de lait livré. Au début des années 1970, le père d’Adrien n’avait alors qu’une dizaine de vaches laitières avant qu’une stabulation ne soit construite à la fin de la décennie. Elle comportait déjà des logettes creuses paillées sur terre battue ainsi que des couloirs raclés. Dans la foulée de l’installation d’Adrien en 2006, le bâtiment a été rallongé de 30 à 42 mètres et la collecte des effluents a été mise aux normes par la création d’une plateforme à fumier et d’une fosse à lisier. Les associés en ont profité pour remplacer le système de raclage par un nouveau racleur automatisé à chaîne. Ce rabot raclait de façon autonome deux fois par jour, mais il fallait toujours être présent pour surveiller une chaîne de reprise du fumier « qui avait tendance à dérailler », font état les associés.

Miser sur le confort des animaux

Depuis 1994, les logettes en terre battue avaient été bétonnées. Toujours paillées, le confort était meilleur « mais les vaches souffraient quand même de problèmes de jarret, de boiteries… », se souvient Adrien. À l’installation de Sébastien en 2014, ces logettes ont été rénovées avec des tubulures plus hautes adaptées au gabarit croissant des vaches de l’élevage (2,40 m de longueur). Les deux associés ont fait le choix de recouvrir le sol de leurs nouvelles logettes avec des matelas haut de gamme. Ce changement a eu un effet remarquable sur la santé des animaux : « moins de frais vétérinaires, moins de réforme, des vaches qui vieillissent et un gain de production de près de 1.000 litres par vache ! », font valoir Adrien et Sébastien. Même à 150 € par place, les associés ne regrettent pas d’avoir investi dans ces matelas. Un coût qu’ils comparent au prix des nombreux traitements antibiotiques (100 € par vache) qu’ils étaient obligés d’administrer quand les vaches souffraient de problèmes de pattes. Et les tapis étaient aussi une solution au manque de place de leur bâtiment rénové.

Car sur son exploitation cernée par les terres inondables, le Gaec ne pouvait pas compter sur un bâtiment neuf. La seule solution était d’adapter l’existant et faute d’espace, les deux éleveurs ont misé sur le confort des animaux.

Robotiser le raclage ?

Le raclage demeurait un problème avec l’astreinte de devoir surveiller chaque jour le bon fonctionnement de la vieille chaîne de curage. De ce fait, chaque soir, il fallait trois personnes pour assurer la traite, le pansage, le paillage et le curage, confie Adrien.

Des robots racleurs de type « pousseurs » existaient sur le marché, mais le bâtiment était trop long pour eux. Alors les deux associés ont eu vent d’un type de robot capable d’aspirer le lisier. Le constructeur leur en a fait voir un en service en Haute-Savoie puis il est venu étudier la possibilité d’en installer un sur l’exploitation de Charnay-lès-Chalon.

À la grande satisfaction d’Adrien et de Sébastien, le projet a pu être validé par le bureau d’étude du fabricant, mais, du fait du succès de ce nouveau procédé, le délai d’attente pour la livraison de la machine devait être de deux ans ! Les choses sont finalement allées plus vite que prévu et au mois d’octobre 2019, le constructeur annonçait aux associés que le robot serait installé fin décembre ! Un petit tremblement de terre pour le Gaec alors que le troupeau était en pleine lactation, que les vêlages étaient nombreux et que l’hiver arrivait.

Une dizaine de jours pour tout changer !

Premier défi : trouver rapidement un maçon. C’est un artisan de Saint-Martin-en-Bresse (entreprise Chassagne) qui a su relever le challenge. Une autre difficulté du chantier a été de devoir interrompre le raclage pendant les travaux. Le fumier a dû être évacué à l’aide d’un mini chargeur et du 10 au 14 décembre, Adrien et Sébastien ont été contraints de « faire dormir leurs vaches dehors… ». L’ancien racleur automatique a été démonté. Les passages de chaîne du système ont été rebouchés. En bout de bâtiment, au niveau de la pré-fosse existante, une aire sur caillebotis a été aménagée pour la vidange du futur robot. La marche qui reliait les deux couloirs de la stabulation au bout du bâtiment a été supprimée pour permettre la circulation de la machine.

Contrôle du robot par smartphone

Le chantier n’a pris qu’une dizaine de jours et ce malgré des conditions météorologiques peu favorable au séchage des bétons. C’est le constructeur lui-même qui est venu installer et mettre en service le robot. Il a fait effectuer à la machine ses premiers tours de circuits en commande forcée grâce à un système de télécommande. Le robot mémorisait des parcours que les utilisateurs ont à leur disposition aujourd’hui. Au Gaec du Confluent, le robot dispose de cinq circuits différents qui permettent de curer toute la surface bétonnée de la stabulation. Les utilisateurs ne peuvent pas modifier le tracé de ces circuits, mais ils peuvent choisir parmi les cinq et intervenir sur la programmation de ces cycles dans la journée. La commande et le suivi des interventions se font à l’aide d’une application sur smartphone. En cas d’anomalie, le robot avertit l’éleveur par bluetooth ou par signal sonore. La machine s’immobilise en cas d’obstacle sur son chemin (une vache couchée ou s’il est dévié de sa trajectoire…). Le raclage robotisé est déclenché 17 fois par jour en hiver, l’équivalent de 7 heures de fonctionnement, informent Adrien et Sébastien. En été, environ 13 passages suffisent. Pour ne pas déranger les vaches pendant leur repas ni les inséminateurs, la machine n’intervient pas derrière les cornadis entre 6h et 13h.

3h15 de travail en moins chaque jour

Mis en service le 21 décembre dernier, le robot a tenu toutes ses promesses. Le premier effet s’est immédiatement ressenti en termes d’allègement du temps de travail. Le Gaec estime avoir gagné 3 heures 15 de temps de travail par jour ! « C’est plus que le coût d’un apprenti », calculent Adrien et Sébastien. Outre le fait de ne plus avoir à veiller au bon fonctionnement de la chaîne de curage, les associés apprécient de ne plus avoir à pailler les logettes. À la place de la paille, ils épandent de la farine de paille. Quatre tonnes de farine de paille à 250 €/tonne couvrent les besoins d’une année, font-ils valoir. « Nous économisons ainsi 150 bottes de paille que nous n’avons plus à presser. Plus besoin de pailleuse non plus, ni de chantier d’épandage du fumier », font valoir Adrien et Sébastien. Et pour les vaches, elles n’ont plus à esquiver la chaîne du racleur ou le rabot. C’est un sol bétonné sans obstacle qu’elles ont sous leurs pieds.

Lucides, les deux associés reconnaissent que d’avoir voulu moderniser un bâtiment ancien leur est probablement revenu aussi cher qu’une construction neuve, mais la configuration du parcellaire ne le permettait pas. À lui seul, le robot a coûté 27.000 € et la maçonnerie 10.000. Le Gaec a pu bénéficier d’une subvention de la MSA dans le cadre de la réduction de la pénibilité du travail.

60 litres d’eau, 300 litres de lisier
Pour se vidanger, le robot rejoint une plateforme sur caillebotis au bout du bâtiment.

60 litres d’eau, 300 litres de lisier

Au début d’un cycle, le robot commence par se charger en eau. Sa contenance est d’environ 60 litres. La machine vaporise de l’eau devant et derrière. Mais cette fonction est adaptée à la saison. « En hiver, il n’y en pas besoin. En été, quand le temps est très sec, il faut vaporiser davantage », explique Adrien Vérot. Sur son passage, le robot aspire le lisier au sol. Il peut en contenir 300 litres. Une fois plein, l’automate rejoint la plateforme sur caillebotis où il se vidange. Puis il retourne dans la stabulation pour poursuivre son travail par un nouveau tour. À la fin du cycle, le robot rejoint sa base à l’extérieur du bâtiment où il se recharge en électricité. Pour son entretien, les associés sont tenus de le laver régulièrement en prenant soin en particulier des capteurs de charge en lisier et des capteurs à ultrasons qui lui servent au guidage.