Sécheresse
« On mange de l’argent »

Cédric MICHELIN
-

Pour la troisième année consécutive, notre département est touché par une sécheresse prolongée. Depuis juillet, les éleveurs "tapent" dans leur stock de fourrage, déjà mis à mal les années précédentes. Ce 21 septembre à Saint-Bonnet-de-Joux, la FDSEA et JA de Saône-et-Loire ont « mis la pression » sur les services de l’Etat et les élus, notamment pour « monter un dossier calamité » et obtenir des dégrèvements.

« On mange de l’argent »
La question derrière est de savoir combien de temps il faudra encore affourrager...

« Trois ans de suite, c’est dur. Dur moralement, dur physiquement (rouler de l’eau, affourrager…), dur de trouver et d’acheter du foin… il n’y a plus de répits. La pression est permanente, comme la fatigue ». Sur son exploitation, Stéphanie Lorton ne cachait pas les difficultés et son mari, Pascal résumait la situation en quelques mots : « on mange de l’argent à produire avec les même prix de vente depuis 30 ans. Ras le bol ! ». Eux qui ont fait l’effort de se diversifier en poulets fermiers charolais risquent en plus de ne pas rentrer dans les critères du dossier calamité que monte la FDSEA et JA avec la DDT. Depuis juillet, ensemble, c’est tout l’enjeu de cette « tournée calamités ».
D’année en année, la situation empire. « Même la Bresse est sèche, c’est vraiment tout le département », déplorait Christian Bajard. Le président de la FDSEA multiplie les cris d’alarme en direction des élus et des services de l’Etat, DDT et DDFIP (impôts) en tête. Députée de la circonscription du jour, Josiane Corneloup a déjà alerté le Gouvernement et a déjà réclamé une dérogation pour abaisser certains seuils qui avaient permis de « récupérer 400 dossiers en calamité », notamment parmi les exploitations diversifiées justement.
L’assurance de rien
Il y a urgence car au vu des échanges avec la trentaine d’agriculteurs présents, il semble que le système assurantiel privé semble arrivé au bout de ce qu’il pouvait l’an dernier. « La moyenne "olympique" sur 5 ans est tellement basse que cela ne vaut plus le coup de s’assurer et au moindre aléa, on se prend tout dans la tête », expliquaient plusieurs agriculteurs. Christian Bajard tentait de redonner des perspectives en indiquant que de « nouvelles approches sont attendues avec une Pac plus robuste » et des systèmes collectifs pour gérer les aléas. Mais en attendant, il faut « activer tous les leviers » comme les années précédentes, reprenait-il. Les calamités évidemment et les dégrèvements fonciers. D’autres mesures interviendront certainement (MSA…) plus tard aussi. A l’image du Département qui a mis en place une aide de 80 % pour investir dans des systèmes de récupération d’eau de pluie (lire édition précédente).
En fin de rencontre, le président du Grand Charolais, Fabien Genet ressentait « l’inquiétude et la colère qui monte dans notre pays qui tourne le dos à son agriculture. Il y a beaucoup de combat à mener mais la mère de toutes les batailles sera celle de l’opinion ». Pour les JA, Julien Quelin soulignait qu’il y a urgence face à toutes ses problématiques : « on ne peut plus faire notre métier. Si ça continue, en élevage pur et dur, il n’y aura plus de jeunes dans le Charolais ». Pas de doute, entre les sécheresses, les attaques des anti-spécistes et les cours de la viande (broutards…), les éleveurs ont le moral dans les chaussettes en ce moment. Il y a urgence à les aider à relever la tête. Et cela commencera par une juste rémunération de leurs produits, signifiait en conclusion Guillaume Gauthier, président de la section bovine.