Tanguy de Lachaise à Saint-Forgeot
Une nouvelle vie dans l’élevage et la vente directe

Trentenaire originaire de Lyon, Tanguy de Lachaise a troqué un début de carrière dans l’expertise immobilière pour devenir agriculteur dans l’Autunois. Adoptant avec délectation son nouveau métier auprès de son beau-père, ses compétences en marketing l’ont rapidement amené à développer la vente directe. Portrait.

Une nouvelle vie dans l’élevage et la vente directe

À Saint-Forgeot, tout près d’Autun, la Ferme du Cluselier propose, depuis un an, de la viande bovine et ovine en vente directe. À la tête de cette nouvelle activité, Tanguy de Lachaise, 32 ans, installé en juillet 2018. Ce jeune Lyonnais d’origine était pourtant loin de se destiner à l’agriculture. Titulaire d’un bac option marketing, Tanguy a vécu un an en Irlande où il travaillait comme serveur dans le milieu de la nuit. De retour en France, il s’est associé avec son père pour exercer pendant neuf ans dans l’expertise immobilière à Lyon… Une période plutôt prospère dans un univers bien éloigné de l’élevage saône-et-loirien… Et pourtant. Entre temps, le jeune homme qui a toujours eu des attaches en Bresse et dans l’Autunois avait fait la connaissance de sa future épouse Ombeline. Au terme de leurs trois premières années de vie commune à Lyon et alors que leur premier enfant venait de naître, l’envie de s’installer dans l’Autunois a commencé à germer. Le secteur de l’expertise immobilière était en pleine mutation. La vie citadine devenait très stressante pour la petite famille. Et puis, Ombeline avait un papa agriculteur dont l’exploitation serait bientôt à reprendre. Un alignement de planètes qui fait que le jeune couple et son aîné ont choisi de quitter Lyon pour Saint-Forgeot. Tanguy a repris les études pour un BPREA. Puis il s’est installé en s’associant avec son beau-père Bernard Moreau, gérant de l’EARL du Cluselier.

180 brebis, 60 vaches allaitantes à l’herbe…

En dépit d’un profil atypique, le jeune homme n’a pas remis en cause la philosophie de cette exploitation familiale acquise par le grand-père de Bernard en 1903. Il faut dire que le beau-père de Tanguy a toujours fait montre de beaucoup de recul par rapport à son exploitation, n’hésitant pas à explorer des voies de diversification originales (activité équestre, cynégétique…) et à sortir des sentiers battus (vêlage en plein-air, travail avec des salariés, recours à l’entreprise…). Le double troupeau bovin-ovin a donc été conservé et même conforté. L’EARL compte aujourd’hui 180 brebis charollaises et texel ainsi que 60 vaches de races charolaise et limousine. À cela s’ajoutent 45 hectares de cultures (blé, orge, colza, triticale).

Économe, la conduite de l’exploitation l’a toujours été en misant sur un élevage à l’herbe extensif ; des bovins mâles vendus à sept-huit mois d’âge sans être alourdis. Avec son cheptel mixte de limousines et de charolaises, Bernard avait opté pour un vêlage de printemps assez tardif et en plein-air avec un minimum d’intervention humaine. Finis à l’herbe et aux céréales maison, les agneaux sont produits selon le cahier des charges Label rouge.

« La relation client me manquait… »

S’il s’est découvert une passion pour l’élevage, Tanguy a rapidement éprouvé le besoin de retrouver la relation client qu’il avait perdue en quittant son ancien métier. Pour ce jeune homme rompu au marketing et à la communication, qui a côtoyé les grandes métropoles, la vente directe s’est imposée naturellement. « Les gens sont demandeurs de cela : de circuit court, de contact avec l’éleveur… La vente directe a le vent en poupe et il y a plein de choses à faire dans ce domaine », assure Tanguy. « Du producteur au consommateur, il n’y a qu’un pas ! », aime à dire le jeune éleveur. C’est avec cette ferme conviction qu’il va à la rencontre de ses clients, privilégiant l’échange de vive voix et la convivialité.

Tanguy a commencé par vendre des colis de viande d’agneau. Les animaux sont abattus à Autun à quelques kilomètres seulement de la ferme. L’outil communautaire assure la découpe, le conditionnement sous vide de la viande. Le jeune éleveur a tout de suite diversifié la gamme de ses produits en proposant saucisses natures ou aromatisées, merguez…Vendu entier l’hiver, le gigot est tranché en été pour pouvoir être préparé à la plancha, fait valoir Tanguy. Jamais à court d’idée, le jeune éleveur a lancé une fondue bourguignonne à la viande d’agneau. Cette année, il innove avec un saucisson sec et un chorizo sec de viande d’agneau ! La transformation est assurée par un prestaire de la Nièvre en attendant que l’abattoir d’Autun mette en service son propre atelier de transformation.

Ouvrir un magasin à la ferme…

Au terme d’une première année d’activité, les débuts dans la vente directe se sont révélés particulièrement prometteurs pour l’EARL du Cluselier. Tanguy estime gagner mieux sa vie qu’en livrant sa production à la filière et les perspectives de développement semblent nombreuses pour la ferme de Saint-Forgeot. Pour les deux associés, l’objectif serait de pouvoir valoriser toute la production – ovine et bovine – en vente directe et d’ouvrir un magasin à la ferme. Le local est d’ailleurs déjà construit, de même qu’une chambre froide et des sanitaires. Ces aménagements se trouvent tout près du centre équestre que Bernard loue à de jeunes exploitantes. Cette proximité pourrait être un avantage indéniable en termes de fréquentation, calcule Tanguy qui aimerait compléter son vaste point de vente par des légumes ou d’autres produits… Membres du GIEE de l’Autunois et adhérents à Bienvenue à la Ferme, les deux associés accueillent des écoles pour des visites de ferme couplées à une activité poney-club. Un moyen de plus de se faire connaître.

Mais si le fait d’être aux portes d’Autun est en soi déjà un bel atout pour l’exploitation, Tanguy et Bernard croient davantage encore « au marché infini de la toile. La commercialisation en ligne de produits frais est aujourd’hui possible et sécurisée et si elle a un coût, les consommateurs intéressés ne placent pas le prix comme élément déterminant de leur achat », estime Bernard.

Deux sécheresses consécutives n’ont pas entamé le moral de Tanguy depuis son installation. L’évolution de la ferme du beau-père vers la vente directe est une réussite et même une suite logique. Dans les années à venir, il faudra adapter la structure au départ en retraite de Bernard. Adepte des courses d’endurance, Tanguy est confiant tout en estimant avoir encore beaucoup de choses à apprendre et à accomplir. Hyperactif comme il se décrit lui-même, le jeune père de famille sait aussi savourer « un cadre de vie très agréable et un métier qui n’est plus celui d’il y a 30 ou 40 ans », conclut-il.

Bergerie financée par des panneaux photovoltaïques

Aux bâtiments existants, Tanguy a adjoint une nouvelle bergerie spacieuse. Une construction plutôt imposante mais qui est entièrement autofinancée grâce à des panneaux photovoltaïques installés sur le toit, font valoir les deux associés. De manière générale, et s’inscrivant pleinement dans la philosophie de son beau-père, le jeune homme a limité les investissements. Les gros travaux continuent d’être confiés à une entreprise. Le parc bâtiment était suffisant pour abriter les vaches tandis que les génisses sont hivernées dehors et que les broutards sont toujours vendus à la fin de l’automne.