Céréales et oléagineux « sur le fil du rasoir »
avaient récupéré de leurs chutes du deuxième trimestre 2008. Selon
l’économiste, « en avril
2011, les prix mondiaux ont dépassé les niveaux records de juillet
2008, particulièrement en ce qui concerne les produits agricoles et les
métaux ». Cependant, Philippe Chalmin indique que la moyenne des cours
des matières premières en mai 2011 s’était un peu détendue.
Céréales et oléagineux sous tension
« Les céréales et les oléagineux sont sur le fil du rasoir en cette fin de campagne 2010/2011 en raison d’événements climatiques retardant les semis de maïs et de printemps aux Etats-Unis et au Canada, asséchant le nord-ouest de l’Europe et retardant les semis de printemps en Russie », a souligné Philippe Chalmin. Pour lui, il est nécessaire à court terme, d’investir dans les capacités de production, notamment agricoles, afin de répondre à la demande mondiale. « Mais la problématique est transversale à l’ensemble des matières premières (énergie, minerais, métaux) », fait remarquer l'économiste. D’ailleurs, dans son chapitre dédié à la régulation agricole, l’économiste fait un rapprochement entre la volonté de régulation des années 1970, suite au choc pétrolier, et le G20, notamment agricole, qui voudrait réguler les marchés des matières premières. Problème, la différence d’interprétation du mot régulation entre les Etats-Unis et la France. Pour les premiers, cela se traduit par la mise en place d’une transparence accrue sur les marchés, pour la seconde, le mot est lié à la stabilité.
L’Europe est-elle capable de réguler ses marchés ?
« L’Europe est-elle capable de se doter d’un organisme tel que la CFTC ? », la Commodity Futures Trading Commission, organe américain de régulation des marchés des matières premières, interroge Philippe Chalmin. Selon lui, les marchés de matières premières en Europe « ont besoin d’avoir des règles du jeu et une autorité capable de siffler la fin de la partie si nécessaire », en cas de volatilité journalière trop élevée notamment. « Les marchés des matières premières ont besoin d’un contrôle public », a clamé Philippe Chalmin. Cependant, il pense que si des efforts étaient déjà faits afin de stabiliser les changes, la situation pourrait s’améliorer. En ce qui concerne le G20 agricole, Philippe Chalmin a déclaré « rêver d’un fonds de financement mondial des politiques agricoles, pour donner les moyens aux pays qui le souhaitent de se doter d’une Pac sur le modèle de 1958 ». Pour lui, faire utiliser les marchés à terme par les producteurs agricoles dans les pays en développement n’est pas sérieux.
Une tendance à « surexposer les mauvaises nouvelles »
Au niveau agricole, l’un des auteurs du rapport, François Luguenot, responsable des analyses de marchés agricoles chez InVivo, souligne que pour le moment il n’y a pas de risque de pénurie en produits agricoles. Cependant, il explique que l’actuelle décrue des stocks et les incertitudes sur la prochaine récolte russe « variant de 10 Mt pour les récoltes de blé et d’orge en fonction des estimations » ne sont pas de nature à rassurer les opérateurs. Selon lui, la situation n’est pas catastrophique, mais peut aussi « partir en vrille », étant donné les tensions sur les stocks agricoles mondiaux. Enfin, François Luguenot a expliqué que la ferme intention du président américain Obama de consolider l’indépendance énergétique des Etats-Unis grâce à la production d’éthanol pourrait maintenir les avantages fiscaux accordés à ces productions. Cependant, il a indiqué que les opérateurs sur les marchés agricoles avaient tendance à surexposer les mauvaises nouvelles. D’ailleurs, la part des céréales échangées dans le monde a plutôt eu tendance à croître entre 2005/2006 et les prévisions pour 2010/2011, passant de 214,8Mt à 243Mt, selon les données du rapport Cyclope. Sur la même période, le stock mondial en céréales de clôture est passé de 317Mt à 341Mt.
La France veut « réguler les prix », pas les « encadrer »
Bruno Le Maire, le ministre français de l’agriculture, a affirmé, le 17 mai à Bruxelles, avoir reçu le soutien de « tous les Etats membres » de l’Union européenne pour le plan d’action sur la volatilité des prix envisagé par Paris dans le cadre de sa présidence du G20. Il devait participer les 19 et 20 mai à une réunion avec ses homologues des autres membres du G20 organisée à Buenos Aires par l’Argentine. La France « ne veut pas encadrer les prix, seulement les réguler », a déclaré M. Le Maire aux journalistes le 17 mai, voulant rassurer ceux qui, en Amérique du Sud notamment, se sont « interrogés » sur les « intentions » françaises. « Je veux convaincre l’Argentine de la nécessité de parvenir à un peu de stabilité sur les marchés agricoles », a-t-il ajouté.