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Les Rencontres À Table !
Interprofession des vins de Bourgogne

Des « influenceurs » techniques

Le Pôle technique et Qualité pilote actuellement plus de 60 projets de recherche (R & D). Tous permettent d’apporter des solutions techniques à court, moyen et long terme aux maisons et domaines bourguignons pour préserver leur patrimoine viticole. Plusieurs projets stratégiques apporteront en 2025 des avancées scientifiques majeures. Avant Vinosphère (18 février à Beaune), l’équipe du BIVB a fait le point et compte s’appuyer sur un réseau « d’influenceurs » techniques, et ce, pas que dans la commission éponyme du BIVB.

Par Cédric Michelin
Des « influenceurs » techniques
Photo archive : La tour pour mesurer les flux de carbone en viticulture à Rully, sur la parcelle expérimentale de la Chambre d'Agriculture de Saône-et-Loire, a été inauguré l'an dernier. Une première nationale en viticulture en France, dans le cadre du projet Mocca (Matière Organique Changement Climatique et Atténuation) qui a le soutien d'une trentaine de partenaires de la filières (Cédrit Agricole...) et du Département.

Les médias locaux et nationaux étaient invités ce 16 janvier à la Cave d’Élisée à Beaune pour une conférence de presse d’un nouveau genre : pour parler recherche fondamentale et appliquée. Autant dire qu’il fallait s’accrocher à son siège, ne serait-ce que pour suivre le calendrier chargé du Pôle technique du BIVB. Rendez-vous est pris d’ores et déjà pour LE rendez-vous technico-économique, Vinosphère qui aura pour thème la décarbonation cette année, dans le cadre notamment de l’objectif à 2035 de tendre vers la neutralité carbone. Rendez-vous également à VinEquip à Mâcon pour les leviers à court terme d’adaptation au changement climatique.

Deux thèmes qui sont déjà gigantesques en matière de recherche. Mais qui restent dans les « deux vocations du Pôle : préserver la qualité des vins et en conserver la diversité des vins qui font la richesse » de la Bourgogne et « produire des références » avec toujours le SAQ et les observatoires, débutait Jean-Philippe Gervais, directeur du Pôle. À ses côtés, une équipe qui s’est fortement étoffée depuis le plan 2020-2025. De nombreux chefs de projets sont en charge de coordonner des recherches très pointues, autour de l’Agrométéo, des sols, du matériel végétal, de l’œnologie… Car la philosophie a changé, ce n’est plus le BIVB qui fait des appels à projets, mais lui qui fait plutôt des appels à manifestation d’intérêts. Ainsi autour de la table se retrouvent ceux motivés et compétents, que ce soit « vignerons, négoces, techniciens, Chambre, coopératives, CAVB, INAO, ODG, Inrae, IFV, universitaires, autres interprofessions, œnologues, pépiniéristes, tonneliers, verriers… ». Ce réseau « d’influenceurs techniques » va fêter en novembre son troisième anniversaire. Le projet le plus emblématique de ces « espaces d’échanges » d’un genre nouveau est le plan national contre le dépérissement de la vigne (PNDV) pour une viticulture durable. « On est des facilitateurs », résume Jean-Philippe Gervais.

Agir aujourd’hui pour se projeter demain

Les « choix stratégiques » des axes de recherches doivent donc se faire encore plus « en amont », avec tous les membres et partenaires de la filière, rajoute Céline Chauvenet, directrice technique adjointe. L’exemple le plus emblématique — car crucial — tourne autour du matériel végétal. « Les élus veulent qu’on travaille sur les nouveaux cépages. Oui, mais autour des cépages emblématiques, des résistants, à fin d’adaptation… On construit alors le chemin sur le temps long et année après année », poursuit-elle, ce qui donne une structuration et une visibilité à long terme. À l’image donc du dérèglement climatique qui nécessite « anticipation et adaptation. Agis aujourd’hui pour se projeter demain ». Ce que font les vignerons depuis toujours. « Les vignerons testent énormément et… ne le disent pas », regrettent Céline qui les invite à se faire connaître pour plus de suivis. « Déguster un croisement de gascon avec un syrah, si l’idée se présente, on peut lancer le projet. Il n’y a pas de mauvaises solutions », si la filière donne son feu vert. « Complexe » mais pas impossible en somme. La recherche a l’habitude de faire chou blanc, de trouver par hasard et parfois d’apporter des révolutions.

300 microcuvées à déguster

Les observatoires des scientifiques – dont ceux du BIVB — lancent régulièrement des alertes, comme le décrochage des températures en 1988, déjà, de + 1,5 °C. Un palier soudain dans un réchauffement constant qui pourrait à nouveau se reproduire. Mais cette fois, peut-être pas dans le sens d’un meilleur équilibre acidité/sucre. « Il y a des menaces émergentes sur les moûts et donc sur nos vins. Est-ce des signaux faibles ou des micro-organismes non identifiés avant ? ». En 2015, le BIVB et le Comité Champagne en partenariat avec l’INRAE et l’IFV lancent un programme d’ampleur s’engageant ensemble pour une durée minimale de 15 ans pour créer des variétés résistantes au mildiou et à l’oïdium, mais à typicité régionale. Puisque les AOC de Bourgogne partagent les mêmes cépages que la Champagne, le programme de création variétale est commun. Les équipes du BIVB et de la Chambre d’Agriculture de Saône-et-Loire s’associent pour le programme de création variétale nommé CEPInnov, dont le cœur est la parcelle à Aluze (série de trois vidéos disponible sur YouTube). Les cépages pinot noir, chardonnay, mais aussi le gouais sont ainsi croisés avec des variétés résistantes. En 2024, ce sont 300 nouvelles variétés en Bourgogne qui sont ainsi suivies et dégustées après la même micro-vinification. Une première historique.

Copyright visuel : BIVB