« Le coronavirus rebat les cartes ! »
Le coronavirus bouleverse l’actualité syndicale de la FDSEA. Assemblée générale annulée ; services et collaborateurs en mode confinement…, FDSEA et profession dans son ensemble n’échappent pas à cette crise inédite. Mais dans ce nouvel épisode grave dans l’histoire du pays, l’agriculture pourrait bien retrouver du crédit auprès de la société. C’est en tout cas le sentiment du président de la FDSEA Christian Bajard qui fait le point sur l’activité de 2019 et les perspectives chamboulées pour 2020.

Quelles sont selon vous les répercussions que pourrait avoir la crise du coronavirus sur l’agriculture de Saône-et-Loire ?
Christian Bajard : le coronavirus bouleverse toute l’économie mondiale et les priorités d’hier ne seront peut-être pas celles de demain. Mais une chose est sûre, cette crise confirme que la question de l’alimentation est primordiale. L’agriculture reste une activité prioritaire pour l’humanité puisqu’elle lui permet de se nourrir. On avait oublié que l’on pouvait un jour manquer de nourriture… Cette crise devrait remettre l’agriculture au cœur des préoccupations de notre société. Un certain nombre de cartes vont être rebattues, mais les problématiques agricoles d’avant le coronavirus mériteront toujours d’être traitées. En particulier, la question d’un revenu descend pour les agriculteurs est plus que jamais d’actualité. D’ailleurs, la profession a demandé aux pouvoirs publics la mise en place exceptionnelle d’un prix minimum pour la viande bovine pendant la crise du Covid-19.
Peut-on espérer le retour d’un peu plus de considération pour l’acte de production agricole et donc un peu moins d’attaques sur des questions purement sociétales ?
Christian Bajard : les préoccupations environnementales et sociétales comme le bien-être animal resteront centrales. Notre position n’est pas d’être contre, bien au contraire. Personne ne nie les évolutions climatiques ni les problèmes écologiques. Mais nous avons besoin d’un vrai contrat avec la société et les consommateurs afin que l’agriculture soit accompagnée dans sa mutation. Il faut arrêter de dénigrer systématiquement les agriculteurs, cesser d’opposer les systèmes. Il faut au contraire accompagner davantage et plus sereinement la profession. Prendre aussi le temps d’écouter la science. Nous donner un temps raisonnable pour accomplir cette transition. Les agriculteurs sont capables d’évoluer, mais il faudra du temps et qu’on les rémunère correctement pour cela.
Les enjeux de société et pour la planète nécessitent des moyens. La France est plutôt en pointe dans le domaine, mais il faut un minimum de coopération à l’échelle européenne. La pandémie de Covid-19 changera aussi le regard sur la nécessité d’une autonomie européenne. L’agriculture des territoires sera regardée différemment au niveau de la communauté européenne car elle remplit les magasins.
Vous évoquez les territoires. La FDSEA a depuis quelques années placé les territoires ruraux au cœur de l’organisation de son réseau. Où en est-elle dans ce déploiement ?
Christian Bajard : un territoire ne peut pas tout attendre de l’État. C’est pour cela que le réseau FDSEA a choisi de se redécouper pour coller aux communautés de communes et aux pays. Ensemble, agriculteurs et territoires ont à réaliser des projets. Il s’agit de créer des dynamiques ; par exemple mettre en place des circuits courts autour d’outils structurants... Ces projets locaux sont motivants pour les agriculteurs. Dans l’Autunois, l’abattoir a été un catalyseur pour mettre en place un véritable approvisionnement local. Ce type de projet montre que l’agriculture devient incontournable.
En Bresse, le spectre de la création d’un parc naturel régional inquiète la profession. Quel regard portez-vous sur ce sujet ?
Christian Bajard : la décision de créer un parc appartient aux élus. Il faut bien en mesurer les conséquences sur l’activité agricole et il appartient aux agriculteurs du territoire de nous faire remonter leur position. Pour la FDSEA, il faut être très vigilant sur un tel projet qui peut impacter significativement les agriculteurs bressans. Mais nous ne sommes pas fermés à réfléchir sur le sujet. Après tout, si un parc peut amener un peu de revenu complémentaire sur des démarches volontaires, pourquoi pas. Mais à condition qu’il y ait un minimum de garanties…
Le rapport d’activité que vous deviez présenter en assemblée générale le 20 mars dernier est très riche. Comment synthétiseriez-vous tout ce travail ?
Christian Bajard : notre rôle consiste à entrouvrir des portes pour voir ce qu’il est possible de faire, pourvu que cela aide les agriculteurs dans leurs cours de ferme. En 2019, la FDSEA s’est beaucoup investie pour trouver des solutions aux problèmes liés au revenu, à la gestion des risques, au foncier, aux ZNT, à l’agribashing, aux enjeux environnementaux… Notre rapport d’activité retrace tout le travail accompli et il est consultable sur Internet de même qu’une série de vidéos tournées par nos responsables locaux.
En 2020, nous poursuivons le travail engagé, mais le coronavirus bouleverse le calendrier et fera bouger les lignes. Avec cette crise, la communication négative sur l’agriculture va peut-être se calmer un peu. Cette pandémie mondiale influera-t-elle aussi sur le budget de la prochaine Pac ? Il faut espérer que cela incitera à remettre un budget fort pour l’agriculture. Avec toujours la nécessité que les agriculteurs soient rémunérés à la fois pour la nourriture qu’ils fournissent mais aussi pour les services rendus à la société.
Le Covid-19 nous a empêchés de tenir notre assemblée générale le 20 mars dernier. Mais nous allons devoir réaliser malgré tout la partie statutaire d’ici la fin de l’année. Nous sommes en année élective et nous devons valider les comptes. Nous solliciterons donc à nouveau les adhérents dès que cela sera possible. Et en attendant, nous ferons tout notre possible pour accompagner au mieux les agriculteurs dans cette crise sanitaire sans précédent.