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Retour sur le congrès d’Orama

Produire plus et bien

C’est le département de la Côte-d’Or qui accueillait cette année le
Sommet du végétal, le congrès d'Orama, les 18 et 19 janvier. Une délégation de la section
céréalière de la FDSEA de Saône-et-Loire a pris part à ces deux journées
riches en débats. L'agro-environnement était au coeur de ces derniers et les réglementations environnementales aussi...
Par Publié par Cédric Michelin
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« Bla-bla-bla », à l’adresse de Bruno Le Maire qui participait à la séance de clôture du Sommet du végétal, à Dijon le 19 janvier. Les producteurs de grandes cultures d’Orama en ont ras-le-bol des discours et promesses non tenues en matière d’environnement. Philippe Pinta s’est fait l’écho de toutes les difficultés que rencontrent les producteurs au quotidien : gestion de l’eau, biotechnologies et OGM, biocarburants, bassins d’alimentation et de captage, augmentation des capacités de stockage... La liste est longue de toutes les tracasseries administratives et des règlements bureaucratiques qui empêchent les agriculteurs de produire et qui plombent leur compétitivité. « Le Grenelle de l’environnement nous mène à une impasse », a mis en garde le président d'Orama qui déplore le grand écart entre le discours affiché au plus haut niveau de l’Etat sur la relance de la production et la nécessité de produire plus, et les freins qui se dressent au quotidien chez les agriculteurs. Le ministre de l’Agriculture l’a reconnu : « sur le respect des règles environnementales, le compte n’y est pas. Il faut que les choses changent », a-t-il assuré.

L’accès aux innovations



Une table ronde sur les « atouts et potentiels des grains français » a permis de mettre en avant les différents leviers que sont la génétique, la fertilisation, les phytosanitaires, l’irrigation pour résoudre l’équation du produire plus et bien. Pas mieux, qui laisserait sous-entendre un jugement de valeur négatif pour des producteurs de grandes cultures qui ont gagné le défi d'éradiquer la famine en France... Les intervenants ont ainsi démontré l’importance d’un retour à l’agronomie pour satisfaire les besoins des plantes dans un objectif d’optimisation de la production. Par ailleurs, les progrès génétiques ont permis d’améliorer la qualité et d’apporter plus de régularité dans la production.
Le romancier et académicien français, Erik Orsenna, est intervenu en tant que grand témoin pour rappeler « la nécessité d’investir dans l’agriculture du fait d’une offre insuffisante par rapport à la demande ». D’autre part, il a souligné que la « principale rareté était bien la terre et non l’eau, avec la perte d’un département tous les 10 ans ». Enfin, l’arrêt de la recherche serait pure « folie » selon lui, et la profession doit continuer à expliquer ce qui est fait - en terme de bonnes pratiques agricoles - face à la vague de méfiance des médias et de la société.

Les limites à la production



Les contraintes spécifiques et réglementaires qui pèsent sur les grandes cultures ont été exprimées à l’occasion d’une table ronde « l’agriculture : la solution sous conditions ». Selon les experts, la production de grandes cultures ne pourra augmenter que si l’on développe les biotechnologies et les outils d’aide à la décision. Les producteurs devront également s’adapter au changement climatique. En réponse à la surenchère environnementale, il faut utiliser les voies de droit qui sont offertes aux agriculteurs en attaquant et multipliant les pressions auprès du Conseil d’Etat. Puis un regard extérieur a été apporté par l’ingénieur agronome Jean de Kervasdoué, qui a notamment pointé du doigt le principe de précaution qui nuit au développement de l’agriculture.


Plus de compétitivité



S’adressant au ministre de l’Agriculture, le président de la FNSEA, Xavier Beulin, a tenu à témoigner de la solidarité entre agriculteurs l’été dernier pour gérer la sécheresse et a sollicité un accompagnement financier de l’Etat pour les FDSEA qui se sont mobilisées sur l’action paille.
Il s’est exprimé sur le refus d’une écologie punitive en réclamant plus d’équité entre les pays de l’Union européenne. Sur le volet de la défiscalisation de la TIC (carburant), il a rappelé que la France restait le pays le plus compétitif. Par ailleurs, malgré la perte de parts de marché dans diverses productions vis-à-vis des pays frontaliers, la France reste un pôle d’excellence avec un excédent de la balance commercial de 11 milliard €. Concernant le dossier OGM, Xavier Beulin s’est interrogé sur les motivations d’une telle interdiction : « ou bien les arguments du Conseil d’Etat sont nuls et non avenus, ce dont je doute fortement, ou alors cela veut dire que c’est l’opinion qui fait la loi, et cela n’est pas possible ».
Le président d’Orama a rappelé à son tour l’enjeu alimentaire de la production de grains pour nourrir 8 milliard d’habitants dès 2027 et l’importance de mobiliser les moyens nécessaires (biotechnologies, irrigation, biocarburants, plan silos) pour atteindre l’objectif d’augmentation de la production de 40 %. Concernant la réforme de la Pac, Philippe Pinta a présenté certains points du projet « pour une nouvelle Pac 2014-2020 » : le besoin du maintien du budget, une convergence des aides au niveau national, et de manière progressive, sur une période allant au-delà de 2020. Sur le volet environnemental, il s’est opposé aux 30 % de verdissement et souhaite que le taux de surfaces d’intérêt écologique soit revu. Enfin, il a demandé au ministre de cesser la surenchère franco-française en citant pour exemple les 100 % de couverts environnementaux.


Des engagements ambitieux



Devant une salle particulièrement animée et pour le moins sceptique, Bruno Le Maire a défendu son bilan en faisant notamment valoir un budget de la Pac maintenu, et le vote de la loi sur les obtentions végétales pour préserver la recherche et l’innovation. Il a tenté de rassurer l’assistance sur le projet de réforme de la Pac en assurant qu’il mettrait tout en œuvre pour faire bouger les lignes concernant la convergence nationale, les 30 % de verdissement, les 7 % de surfaces d’intérêt écologique et la rotation des cultures. Le ministre a bien dû reconnaître une surenchère environnementale, notamment au niveau local. C’est ainsi qu’il a promis d’agir à travers deux actions : réunion des DREAL et des DRAAF et mise en place d’une mission destinée à dénouer les dossiers qui n’auront pas pu être réglés par les préfets en matière de pragmatisme environnemental. Sur le volet sécheresse, il s’est engagé pour qu’un soutien soit apporté aux départements en difficultés suite à l’action paille. Concernant les OGM, le ministre a maintenu son opposition au MON 810, estimant que l’opinion n’y était pas prête et qu’un passage en force se retournerait contre les producteurs. Il a par contre confirmé le seuil de présence fortuite à 0,9 % en suivant l’avis du Haut Conseil aux biotechnologies.



Face à l’enjeu électoral, et au travail ambitieux que s’est donné le ministre d’ici le mois d’avril, nul doute qu’Orama et ses trois AS (AGPB, AGPM et FOP) resteront vigilantes quant aux décisions et évolutions concrètes qui seront données à ce discours.


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