Marchés céréaliers
Stratégie de reconquête Russe
Depuis le 1er juillet 2011, la Russie relance vigoureusement ses exportations de céréales. Avec une production de blé annoncée de 90 millions de tonnes, elle met en œuvre une stratégie de reconquête de son image d’exportateur après l’embargo de 2010. La Russie était en effet devenue un important exportateur de céréales depuis le début des années 2000, et ses perspectives d’augmentation des surfaces cultivées et des rendements paraissent considérables. Pour regagner la confiance des acheteurs, elle mène également une politique d’alliance avec les deux autres piliers agricoles de la Communauté des États Indépendants (CEI), l’Ukraine et le Kazakhstan.
En août 2010, Moscou décrète un embargo sur ses exportations alors que sa production céréalière venait d’atteindre des volumes records depuis l’ère soviétique, soit respectivement 106 et 94 millions de tonnes (Mt) en 2008 et 2009 (données du Conseil International des Céréales, CIC). Avec ce gel, les livraisons russes chutent de 22 Mt atteignant le niveau le plus bas depuis 2000 (soit 4,3 Mt selon le CIC), année où l’agriculture russe se remettait à peine de la période de forte décapitalisation ayant accompagné la chute de l’URSS.
Passant du statut d’importateur à celui de grand exportateur à partir de 2001, le volume des livraisons avait en effet quadruplé en l’espace de dix ans (voir graphique ci-dessous), hissant la Russie au 4e rang mondial des plus grands exportateurs de blé en 2011 (même rang que l’Union européenne après les ÉtatsUnis, l’Australie et le Canada) et au 6e rang pour les céréales. Les exportations de blé russe devraient atteindre 16 Mt fin septembre 2011 (USDA), rejoignant les niveaux d’avant crise (sécheresse et embargo).
Moscou table sur une récolte de 90 Mt de céréales en 2011. Ensemble, avec l’Ukraine et le Kazakhstan, la part de marché des trois pays atteindrait aujourd’hui près de 25 % des exportations mondiales de blé contre 10 % l’an dernier (USDA).
Une production en hausse
La Russie met en avant le potentiel productif de la région pour rassurer ses partenaires commerciaux. Avec la levée de l’embargo, elle annonce une aide humanitaire de 50.000 t à la Corée du Nord, 1.000 t de farine de blé au Kenya et offre des terres agricoles aux investisseurs de l’Asie du Sud-Est. Elle multiplie les interventions diplomatiques en mettant en avant ses recettes énergétiques pour appuyer les actions commerciales et les avantages comparatifs des principaux exportateurs céréaliers de l’espace post-soviétique. En 2009, l’Union céréalière russe avait annoncé la perspective de créer une union commerciale avec l’Ukraine et le Kazakhstan (et des candidats potentiels : Hongrie, Bulgarie, Roumanie, Turquie), afin d’agir en commun sur le marché mondial. La création d’un tel pool serait pour Moscou un facteur de stabilisation, en termes de volumes et donc de prix, ainsi qu’une opportunité pour réduire ses coûts logistiques. Les pays de la mer Noire profitent en effet d’une position géographique stratégique dans la mesure où les pays de la rive sud de la Méditerranée (Afrique du Nord et Moyen-Orient) sont des importateurs majeurs de céréales.
La mer Noire : un potentiel à valoriser… et à suivre
La Russie, l’Ukraine et le Kazakhstan disposent d’immenses superficies de terres agricoles cultivées (130 Mha en 2011), avec les plus fortes disponibilités mondiales en terres cultivables en céréales non cultivées (155 Mha en Russie). La taille des structures d’exploitation (pouvant atteindre plusieurs milliers d’hectares) serait très favorable à la mécanisation et aux économies d’échelle, avec un fort potentiel d’amélioration des rendements (2,13 t/ha actuellement selon la FAO). Or, si ces pays sont particulièrement réactifs aux évolutions des marchés, leurs ambitions commerciales seraient freinées par les irrégularités climatiques (impactant les volumes et la qualité), la situation socio-économique de la zone et les infrastructures (notamment en matière de stockage et de transports).
Le plan de développement de l’agriculture russe (2013-2020) qui sera adopté fin 2011 prévoit 230 milliards de dollars d’investissement avec pour objectif d’atteindre une production de 125 Mt de céréales à l’horizon 2020 (CIC). Outre les subventions aux transports, le Kazakhstan de son côté investit dans les ports de la Mer Baltique et les infrastructures ferroviaires pour surmonter les coûts de son enclavement. Et si les réticences de l’Ukraine (plus favorable à l’OTAN) vis-à-vis du pool céréalier se sont manifestées en 2009, les pourparlers ont repris avec Moscou.
Dans ce contexte, l’année 2010 ne pourrait être qu’un accident dans la montée en puissance d’un des principaux concurrents de l’Union européenne, sur le marché méditerranéen notamment. Fortes de cette ressource céréalière et importatrices de viandes, la Russie et l’Ukraine semblent également vouloir développer les productions animales, ce qui ne serait pas sans conséquences sur les marchés européens. Ces évolutions pourraient également constituer des opportunités car, au-delà de ses objectifs politiques, Moscou pourrait se tourner vers ses voisins européens pour acquérir des compétences et moderniser son agriculture.
Passant du statut d’importateur à celui de grand exportateur à partir de 2001, le volume des livraisons avait en effet quadruplé en l’espace de dix ans (voir graphique ci-dessous), hissant la Russie au 4e rang mondial des plus grands exportateurs de blé en 2011 (même rang que l’Union européenne après les ÉtatsUnis, l’Australie et le Canada) et au 6e rang pour les céréales. Les exportations de blé russe devraient atteindre 16 Mt fin septembre 2011 (USDA), rejoignant les niveaux d’avant crise (sécheresse et embargo).
Moscou table sur une récolte de 90 Mt de céréales en 2011. Ensemble, avec l’Ukraine et le Kazakhstan, la part de marché des trois pays atteindrait aujourd’hui près de 25 % des exportations mondiales de blé contre 10 % l’an dernier (USDA).
Une production en hausse
La Russie met en avant le potentiel productif de la région pour rassurer ses partenaires commerciaux. Avec la levée de l’embargo, elle annonce une aide humanitaire de 50.000 t à la Corée du Nord, 1.000 t de farine de blé au Kenya et offre des terres agricoles aux investisseurs de l’Asie du Sud-Est. Elle multiplie les interventions diplomatiques en mettant en avant ses recettes énergétiques pour appuyer les actions commerciales et les avantages comparatifs des principaux exportateurs céréaliers de l’espace post-soviétique. En 2009, l’Union céréalière russe avait annoncé la perspective de créer une union commerciale avec l’Ukraine et le Kazakhstan (et des candidats potentiels : Hongrie, Bulgarie, Roumanie, Turquie), afin d’agir en commun sur le marché mondial. La création d’un tel pool serait pour Moscou un facteur de stabilisation, en termes de volumes et donc de prix, ainsi qu’une opportunité pour réduire ses coûts logistiques. Les pays de la mer Noire profitent en effet d’une position géographique stratégique dans la mesure où les pays de la rive sud de la Méditerranée (Afrique du Nord et Moyen-Orient) sont des importateurs majeurs de céréales.
La mer Noire : un potentiel à valoriser… et à suivre
La Russie, l’Ukraine et le Kazakhstan disposent d’immenses superficies de terres agricoles cultivées (130 Mha en 2011), avec les plus fortes disponibilités mondiales en terres cultivables en céréales non cultivées (155 Mha en Russie). La taille des structures d’exploitation (pouvant atteindre plusieurs milliers d’hectares) serait très favorable à la mécanisation et aux économies d’échelle, avec un fort potentiel d’amélioration des rendements (2,13 t/ha actuellement selon la FAO). Or, si ces pays sont particulièrement réactifs aux évolutions des marchés, leurs ambitions commerciales seraient freinées par les irrégularités climatiques (impactant les volumes et la qualité), la situation socio-économique de la zone et les infrastructures (notamment en matière de stockage et de transports).
Le plan de développement de l’agriculture russe (2013-2020) qui sera adopté fin 2011 prévoit 230 milliards de dollars d’investissement avec pour objectif d’atteindre une production de 125 Mt de céréales à l’horizon 2020 (CIC). Outre les subventions aux transports, le Kazakhstan de son côté investit dans les ports de la Mer Baltique et les infrastructures ferroviaires pour surmonter les coûts de son enclavement. Et si les réticences de l’Ukraine (plus favorable à l’OTAN) vis-à-vis du pool céréalier se sont manifestées en 2009, les pourparlers ont repris avec Moscou.
Dans ce contexte, l’année 2010 ne pourrait être qu’un accident dans la montée en puissance d’un des principaux concurrents de l’Union européenne, sur le marché méditerranéen notamment. Fortes de cette ressource céréalière et importatrices de viandes, la Russie et l’Ukraine semblent également vouloir développer les productions animales, ce qui ne serait pas sans conséquences sur les marchés européens. Ces évolutions pourraient également constituer des opportunités car, au-delà de ses objectifs politiques, Moscou pourrait se tourner vers ses voisins européens pour acquérir des compétences et moderniser son agriculture.