Coopérative Bourgogne du Sud
Des essais maïs grain à reproduire

Publié par Cédric Michelin
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Ce n’est vraiment pas une année simple pour les cultivateurs de maïs grain. Y compris pour les essais de variétés. Peu de résultats concluants après les fortes pluies du 1er mai puis la sécheresse et la canicule estivale. Le 11 septembre, la coopérative Bourgogne du Sud a tout de même choisi de montrer les essais de ses plateformes en alluvion à Verjux et en limons de Bresse à Ménétreuil. Seul motif de satisfaction, la possibilité cette année de tester les "promesses" des variétés génétiquement résistantes à la sécheresse justement…
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Les relevés météorologiques ne laissent place à aucun doute. L’été 2015 a été très chaud et très sec. A partir de juin, les 30°C ont été dépassé durant presque un mois. En juillet également et à nouveau un pic de chaleur en août, résumait Christine Boully. Le tout avec seulement 38 mm de pluies en juin et 14 mm en juillet sur la station météo de Verdun-sur-le-Doubs. Autour, les situations diffèrent selon le passage d'orages. Reste que partout, les pluies et crues du 1er mai ont été « douloureuses », les resemis subissant le sec et des « soucis » de désherbage ont été rencontré par la suite. Heureusement, les traitements en prélevé ont « bien fonctionné » au final, estime la responsable des essais. La propreté de la parcelle de Maxime Violot à Verjux en témoignait. Dans le profil de sol ouvert, Pascal Bucheton constatait une « superbe préparation de sol, sans compaction ». Les alluvions argileux (35%) ont été pour la première fois suivi à l’aide de puces électroniques enfouies (10 cm de profondeur) dans le sol du 23 mars au 13 avril. Des amplitudes de températures allant de 6 à 17°C ont été observées, ce qui est intéressant à savoir pour les semis. Une autre puce électronique a été installée pour mesurer l’humidité d’un épi (variété Exxclusiv) pour observer notamment la dessiccation. Difficile cependant en cette année « atypique » de définir des dates de récoltes idéales – fin septembre ou début octobre à priori – car les maïs se sont « bloqués puis ont poussé très rapidement » avec parfois le retour surprenant de soies vertes alors que les épis étaient fécondés. Si certains se sont « retapés » avec les pluies d’août, les maïs n’ayant pas vu d’orages pluvieux présentent un manque important d’épis, annonciateur de faible récolte.

Forte hétérogénéité dans les rangs



A Verjux, les pertes sont proches de -20% en rendement à première vue. La plateforme abritait notamment cinq séries de variétés de précocités différentes (indice 300 à 450). Avec une « bonne vigueur au départ », Conexxion (RGT) était régulièrement « en tête » des essais l’an passé, en faisant 106 % en alluvions et 111 % dans les limons. La coopérative « a mis pas mal d’espoir » en lui, expliquait Christine Boully, qui ne cachait pas cependant que cette année, avec son « long pédoncule », les épis pendent et « risquent de tomber »… Inscrite en 2011, Dodixx « craint le sec et les excès d'eau » et la coopérative « a déjà mieux sur ce créneau » d’indice 300. Passant rapidement sur ES Flato, ES Gallery a des épis avec « beaucoup » de petits grains (dentés tropical). Une variété de 2013 « pas inintéressante mais hétérogène » estime la coopérative. « Ancêtre » de Conexxion, Exxclusiv s’en approche en terme de performance (108 % en limons et 106 % en alluvions) et devrait - l’an prochain - être rendu résistant à l’herbicide Stratos. Jamais testé non plus, Jacuzi (indice 340) a des épis « très longs et réguliers » cette année. Plus « rustique », Kaustrias (indice 300) se sent « mieux » en alluvions (112 %) qu’en limons (100%). Cette année, Kamponi n’a lui pas pu « exprimer » ses longs épis annoncés. Avec 109% de rendement (mais 101% comparativement à un indice 380), Obixx (indice 350) reste vert assez longtemps dans la saison mais dessèche ensuite « d’un coup » ses grains. Oxxlow est en retrait avec 98% en limons et 102 % en alluvions. Louidor est plus précoce (300) et a eu droit à une « deuxième chance » après ses 80 % de la moyenne des essais l’an dernier en raison du printemps sec. « Relativement » précoce (300), P8816 était dans la moyenne l’an dernier (100%). Sy Gracy ne « va pas dessécher rapidement en fin de cycle » et comme il fleurit tardivement, il a été impacté cette année alors que l’an dernier il avait fait 108 % en alluvions et limons. Chapalu garde son feuillage vert, ce qui lui confère la capacité de remplir ses grains plus longtemps. D’indice 350, DK4408 fait 105 % depuis deux ans mais son « petit gabarit » est encore accentué cette année. La nouveauté, ES Harmonium est « assez proche » de DKC4795 à 100 % en limons et 104 % en alluvions. ES Jasmine a « beaucoup » de grains par m2 mais n’a pas été testé l’an dernier. Inscrit en 2011, KWS9361 est « passe-partout » mais un « peu vieillissant » (95 %). Elle aussi « rustique », Futurixx, d’indice 380, est estampillé "stressless" et a fait 108 % en limons et 104 % en alluvions. « On verra si elle résiste au stress hydrique », espère Christine Boully. Comme aussi pour P9234, une variété Aquamax, ou « son cousin » P9244. Très tardif (indice 500), MAS 51.G a fait 104% par rapport aux variétés tardives. Milanno est dans la moyenne en terme de potentiel. Quincey (indice 330) est une variété mixte, fourrage et grains, qui dessèchent cependant « moins vite ». Sherley est « sa cousine ». Sans « jamais faire de score exceptionnel », P9838 est régulière autour de 100-102 % des essais. Exxaltan le dépasse (104%). SY Tallinn aussi à 109 % et « dessèche aussi vite qu’un Octet ». Avec sa floraison tardive, SY Tardona (380) a « souffert » cette année alors que l’an dernier, il tournait à 101 % en limons et 104% en alluvions.
Dans la série des tardif, DKC4621 (400) préfère les terrains irrigués comme le prouve son 89 % l’an dernier sinon. Vraiment tardif (520), P0725 est à réserver pour des semis précoces et des situations sans « manque » d’eau. Cette année, P9903 (400) a une « allure correcte » (104% l’an dernier), elle qui est tolérante au stress hydrique. Initio est une nouveauté en provenance d'Europe centrale. LG30.444 « marche avec du PMG » (104%). MAS40F a elle « énormément souffert » du stress. SYKreon est « censé » avoir une résistance au sec.

Peu de nouvelles variétés l’an prochain



Responsable des approvisionnements, Gilles Guillaume ne cachait pas que derrière ses variétés dites tolérantes ou résistantes, « on retrouve des génétiques très proches. Après, ce n’est que du marketing et des prix », invitait-il à relativiser.
Avec les températures qui ont dépassé les 35°C cette année, le pollen « mort » n’a pu féconder des soies, elles aussi rendues sèches et non réceptives. Sans oublier le manque d’eau qui a pénalisé la croissance végétative. Au final, tous observaient plus de différences entre deux rangs qu’entre deux variétés, sans parler entre parcelles. « On pourra toutefois tirer des conclusions et dégager des variétés tolérantes ». La coopérative envisage déjà de reconduire les mêmes essais de variétés l’an prochain, ce qui signifie qu’il « n’y aura pas beaucoup de propositions nouvelles l’an prochain », concluait toutefois Christine Boully.



Des ristournes pour atténuer des marchés non rémunérateurs



Le contraste était saisissant entre les prévisions du mois de juin et celles de Michel Duvernois ce 11 septembre. « Il s’est passé des trucs impossibles » rendant la situation « embêtante », débutait le directeur. La France a tout d’abord enregistré une récolte record de blé tendre à 40,8 Mt contre 37 Mt habituellement. « Du jamais vu ! » sur les marchés, rassurant les acheteurs mais pas les vendeurs et producteurs. D’autant, que la « bulle » chinoise a explosé, faisant chuter la demande mondiale des matières premières dans le même temps. Sans oublier les effets connexes sur les bourses et l’économie mondialisée. « Les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) se retrouvent dans des situations catastrophiques ». Résultat, à l’heure actuelle, « pas un producteur ne couvre ses coûts de production », analyse Michel Duvernois. Sa phrase : « un monde d’abondance avec des paysans non payés », résumait bien la situation globale. Avec un cours sur le Matif à 169,25 €/t (décembre 2015), « on est en dessous des prix d’acompte » pour les cultivateurs bressans. Car, les stocks mondiaux s’alourdissent et la production va dépasser la consommation. « On baisse dans le vide et pourtant on ne vend pas », s’inquiétait-il. Amer, il ne peut que constater le fait que la « Pac n’a plus de mesure de soutien des marchés mais des soutiens pour l’environnement », déplorait-il. Néanmoins, un nouveau retournement de situation est possible. « On attend les effets d’El Nino en décembre », ce qui pourrait réduire les prévisions de récoltes de certains pays comme l’Australie (-12 Mt peut-être).

Troisième année record de suite, sur les marchés maïs grain, les Américains ont une nouvelle fois fait une belle campagne au contraire des Européens (-18%) à l’image de la coopérative. Mais cette année, les écarts de prix entre blés meunier et maïs sont moindres que l’an dernier, autour de 10 € d’écart contre 30 €/t l’an dernier. Essayant de positiver, Michel Duvernois est conscient que la récolte risque de ne « pas être abondante » mais espère « sortir un prix mieux que l’an dernier ». Pour cela, il compte notamment « saturer les séchoirs à économie d’énergie », comme le nouveau installé à Chalon, et « optimiser la logistique ». Le tout pour faire baisser le barème de séchage.

Sur le marché des oléoprotéagineux, « tout le monde a été pris à contrepied » avec des prix du colza en baisse. La prime oléique du tournesol est elle aussi indexée sur les cours du colza mais la coopérative a peu vendu jusqu’à présent. En soja, avec la nouvelle usine (Extrusel) de transformation des grains à Chalon, une prime non-OGM sera versée. Bourgogne du Sud triture 7.000 à 8.000 t sur les 22.000 t française. La coopérative « prévoit une prime taux de protéine » en soja l’an prochain. « Cela pourrait représenter 100 € d’écart entre une livraison à 35 % ou 42 % de taux de protéine ». Les techniciens se tiennent donc prêt à conseiller les cultivateurs sur le choix des variétés, l’inoculation, l’effet précédent ou encore les apports d’azote. En revanche, la coopérative « se réserve la possibilité » de sécher en bennes ventilées à Ciel – « en faisant payer le surcoût » - les lots à plus de 30 % d’impuretés, qui ont notamment causés l’incendie du séchoir à Chalon l’an dernier.

La coopérative annonçait enfin avoir voté des ristournes aux coopérateurs sur les approvisionnements pour un montant de 4 millions d’€, soit une moyenne de 45€/ha en compléments de prix. « Et le résultat de la coopérative va être largement redistribué », concluait Michel Duvernois, qui aurait espérer – comme tous – une meilleure année.