Avenir de la production fermière
Un enjeu stratégique

Retour sur les principaux enseignements de la table-ronde sur l’avenir de la production fermière. Parce qu’il y a là un enjeu certes politique, mais aussi stratégique. Et la Fnec en a bien saisi l’importance.
132532--DSC_0246.JPG
Le 24 juin, une table-ronde réunissait à Paray-le-Monial Jacky Salingardes, président de la Fnec, Perico Legasse, critique gastronomique, Hélène Boussouar, productrice fermière dans les Hautes-Alpes, Dominique Chambon, président du Cnaol, Stéphane Vergne, président de la FFF, la fédération des Fromagers de France, Jean-Claude Le Jaouen, ancien de l’Institut de l’Elevage (Idele) et Daniel Rizet, président du Syndicat de défense du fromage charolais. Animés par Richard Ramos, les échanges ont portés sur l’avenir de la production laitière fermière.
Pour Perico Legasse, le rôle alimentaire et environnemental - par l’entretien du paysage notamment - des agriculteurs est un élément central de la discussion, et ce en dépit de leur diminution régulière dans la population française : jusqu’à 2,7 % aujourd’hui. Il rappelait également l’influence des consommateurs sur la dynamique des filières, de par les 198 millions d’actes alimentaires réalisés par jour en France, soit 5.490.000 par mois ou 72 milliards par an… De quoi orienter la production.

Remettre l’Homme au centre


Pour Jacky Salingardes, il faut plus que remettre l’Homme au centre des débats, car c’est de lui que vient le produit. Des producteurs fermiers qui effectuent rien moins que trois métiers au quotidien : produire certes, mais aussi transformer et, bien entendu, commercialiser ! Dominique Chambon se reportait au développement agricole des années 1950 pour comprendre l’origine de l’actuel éloignement de certains secteurs de la production vis-à-vis des attentes des consommateurs.
Les jeunes agriculteurs d’aujourd’hui sont bien formés et réfléchissent d’avantage, rappelait, quant à elle, Hélène Boussouar. Concernant l’évolution de la filière fermière caprine ces dernières années, Jean-Claude Le Jaouen en rappelait la dynamique actuelle alors que la restructuration des exploitations permet de maintenir le volume de lait de chèvre en dépit de la diminution du nombre de producteurs fermiers.

Le juste prix !


Et si, pour Perico Legasse, « l’objectif est d’avoir le produit le plus pur et le plus authentique possible », comme Stéphane Vergne le rappelait, il ne peut y avoir de producteurs fermiers sans des revenus à la hauteur du travail réalisé. Le volet économique de chaque entité doit permettre de gagner sa vie correctement, d’où l’importance de vendre à de justes prix, sans jamais brader son produit !
Plusieurs intervenants ont rappelé, depuis la salle, l’importance de s’associer ou d’embaucher sur son exploitation de manière à avoir des entreprises vivables, mais aussi d’être dans de bonnes relations avec le cédant en cas de transmission.
Jacky Salingardes concluait d’ailleurs sur cette question centrale de la place du producteur en précisant les travaux de la Fnec sur l’installation, surtout en ce qui concerne les hors-cadres familiaux, situations au sujet desquelles on constate le plus grand nombre d’échecs sur le terrain.



Les enjeux du mot "Fermier" ont bien entendu été débattus. Pour Perico Legasse, un produit laitier fermier devrait être fait à partir du lait du troupeau qui a été nourrit sur les herbages et à partir des céréales de la ferme. Dominique Chambon a rappelé que le terme était clairement défini pour un produit « fabriqué à la ferme avec le lait du troupeau » avec toutefois une possibilité d’affinage à l’extérieur dans le cadre des productions traditionnelles sous AOP/IGP. Jean-Claude Le Jaouen insistait, quant à lui, sur la notion existante de « techniques traditionnelles » au regard des contraintes réglementaires, sanitaires notamment. Sur ce point, Jacky Salingardes observait que la problématique actuelle, c’est les AOC contre le fermier… Cependant, pour lui, la Fnec entend retrouver l’équilibre passé et revenir à quelque chose de plus simple en retrouvant du lien sur ce sujet avec le Cnaol…





Deux visites d’exploitations


Une quarantaine de personnes ont conclu cette édition Fromagora 2016 par la visite de deux exploitations caprines fermières.
Le groupe a commencé par la "Chèvrerie des Vifs" chez Sophie Bonnet à Montceaux-l’Étoile. L’exploitation produit traditionnellement du fromage de chèvre de février à novembre. Les quarante-cinq chèvres pâturent dans les vertes prairies du Brionnais surplombant le val de Loire pour produire un lait de qualité permettant toute une gamme de fromages, allant du fromage apéritif au charolais AOP.
La visite s’est poursuivie au Gaec Rizet à Oudry. À côté d’un élevage bovin traditionnel, la ferme de Montot dispose d’un troupeau de 300 chèvres laitières logées dans une chèvrerie en bois. Nourries à partir de foin de l’exploitation, de céréales et de luzerne l’hiver, les chèvres bénéficient à partir du mois d’avril et pendant cinq mois environ d’herbe fraichement coupée et distribuée à l’auge tous les jours. Ce système permet de produire toute l’année et de fabriquer plusieurs modèles de fromages, dont l’AOP fromage charolais.
E. B.