A Donzy-le-Pertuis, le préfet a répondu à l'invitation de la FDSEA et des JA

A Donzy-le-Pertuis, le préfet a répondu à l'invitation de la FDSEA et des JA

40°C à l’ombre ou quand l’agriculture monte en température… Ce pourrait être le titre de l’article suite à la rencontre organisée par la FDSEA et les JA de Saône-et-Loire sur l’exploitation de Serge Chassy à Donzy-le-Pertuis le 21 juin avec le préfet. Pour une de ses premières sorties après la période de réserve due aux élections, Gilbert Payet était attendu de pied ferme par rien moins qu’une bonne centaine d’exploitants.

En guise d’entrée en matière, Serge Chassy expliquait au préfet qu’il ne serait possiblement bientôt plus en activité, notamment du fait de la question du maintien - ou non ? - de sa commune en Zone défavorisée simple. En effet, Donzy-Le-Pertuis fait partie des vingt-quatre communes anciennement classées qui, pour l’instant, ne sont pas reclassées avec le nouveau zonage. Sur les huit communes concernées du secteur, ce sont rien moins que près de vingt-cinq éleveurs qui risquent de perdre l’ICHN d’ici 2020… Secrétaire général de la FDSEA 71, Christian Bajard rappelait à Gilbert Payet à quel point il était incompréhensible que ces communes ne soient pas reclassées. Elles sont exclues en raison d’une PBS de la Petite région agricole qui est trop élevée du fait de sa tendance viticole. Pour les éleveurs concernés, l’ICHN représente entre 8.000 et 10.000 €, ce qui, le plus souvent, correspond au faible revenu annuel que peut dégager un éleveur allaitant !

Double peine… !

Sur ce dossier, l’ensemble des acteurs du territoire - profession agricole, élus locaux et administration - entendent obtenir ce reclassement. En effet, ce secteur est classé en Natura 2000 avec, de ce fait, de nombreuses prairies sensibles, non retournables… C’est la double peine pour les éleveurs du secteur, qui recherchent une meilleure autonomie alimentaire sur l’exploitation. Surtout que ce zonage est « tombé du ciel » et a un effet rétroactif… Une réglementation illogique de plus !

D’autant que la question de l’installation sur ces communes se pose d’emblée. Joffrey Beaudot, le président des JA 71, a de fait rappelé que, dans l’incertitude actuelle qui prévaut pour ces communes, il est très compliqué pour de futurs installés de préparer un projet viable et vivable.

Incohérences !

Gilbert Payet a rappelé qu’il a transmis au ministre de l’Agriculture toutes les incohérences sur la réglementation Pac que ses services, en lien avec la FDSEA 71 au travers de rencontres mensuelles, ont compilé au fil des semaines. La question de ces prairies sensibles fait partie de ces revendications. En effet, pour le préfet, cette définition devrait plutôt se faire entre l’exploitant concerné et l’animateur du site Natura 2000 pour prendre en compte les contraintes agricoles et la protection de la biodiversité. De fait, les viticulteurs peuvent retourner les parcelles "prairies sensibles" pour lesquelles ils ont des droits de plantation. « Ne nous trompons pas en opposant les professions alors qu’il s’agit de mettre l’administration face aux incohérences qui apparaissent sur le terrain entre les différentes réglementations Pac et autres qui ne s’appliquent pas à tous », mettaient en garde plusieurs responsables professionnels à cette occasion.

Marc Sangoy, pour l’Union viticole de Saône-et-Loire, rappelait à Gilbert Payet que les vignes du secteur avaient été touchées par le gel de ce printemps et que, pour certaines exploitations, c’est plus de 80 % du vignoble qui a été touché. Et « l’exonération de TFNB qui va être mise en œuvre n’est pas suffisante pour indemniser les viticulteurs impactés », poursuivait-il, rappelant qu’il faut réfléchir à un système assurantiel plus performant.

La crise…

Au nom de la commission des Agricultrices, Marie-France Aublanc a porté lecture d’une lettre ouverte pour exprimer son profond désarroi face à la situation actuelle. Un témoignage chargé en émotion qui a mis en exergue la gravité de la crise, celle de la situation qui conduit ici à des dépressions, là à des couples qui explosent, quant cela n’aboutit pas à des situations plus dramatiques encore. Un témoignage qui a pointé les difficultés pour chacun - agriculteurs et agricultrices, voisins, partenaires - de reconnaître la détresse d’un exploitant et de lui apporter le soutien nécessaire pour l’aider à sortir de sa situation. « Il est du souci de chacun d’entre nous de repérer et d’aider les agriculteurs en situation de détresse », notait l’agricultrice pour laquelle le plus dur restant d’offrir un réel soutien à ceux qui refusent en premier lieu toute aide…

Joffrey Beaudot saisissait l’occasion pour rappeler que l’échec est très mal perçu dans notre profession… Le poids des générations précédentes peut parfois peser sur l’exploitant en place, ajoutait Bernard Lacour, président de la FDSEA 71.

Sur le sujet de la crise, Gilbert Payet rappelait le travail engagé avec les OPA départementales pour activer une cellule unique permettant le signalement et l’accompagnement des agriculteurs en difficulté, pour leur proposer un accompagnement personnalisé en fonction de la situation.

La conjoncture est de fait très compliquée pour la plupart des productions, tenait à rappeler Christian Bajard, par ailleurs président de la section bovine. La FNB a créé la signature "Eleveur & Engagé" pour revaloriser la rémunération des éleveurs allaitants en se basant sur un prix couvrant les coûts de production. De même, la FNPL entend faire appliquer la loi Sapin 2 qui permettrait également un prix calculé sur les coûts de productions des éleveurs. Dans ce contexte, il est nécessaire que le préfet et les élus locaux appuient ces démarches, car face à la Grande distribution et aux grands groupes, les agriculteurs pèsent peu pour ne pas dire pas du tout. « Sans un retour rapide à des prix rémunérateurs et du fait de la diminution des soutiens publics, la Saône-et-Loire se dépeuplera d’un nombre croissant d’agriculteurs », mettaient en garde les agriculteurs présents…

La goutte d’eau…

Dans les exploitations, la pression est parfois telle que les agriculteurs perçoivent parfois les contrôles comme une persécution. Serge Briet, éleveur à Cuzy, témoignait de ses « deux jours de contrôle sur les animaux » : « on a parfois le sentiment qu’on nous prend pour des bandits ». Sur le sujet, Bernard Lacour rappelait le travail conduit avec l’administration, qui a permis d’aboutir à la signature de la Charte des contrôles, encore faudrait-il que celle-ci soit appliquée : notification du contrôle 48 heures au moins avant celui-ci ; possibilité pour l’agriculteur de se faire représenter ou accompagner… Sur le sujet, lire l’encadré ci-dessous.

« Le nombre grandissant de réglementations qui s’appliquent à l’agriculture est souvent incompréhensible pour nous, agriculteurs », rappelait Luc Jeannin, secrétaire général de la FDSEA, pour qui « il manque du bon sens et une meilleure coordination entre tous les règles qui nous sont imposées ». La FNSEA a obtenu un acquis syndical historique avec la création du Comité de rénovation des normes en Agriculture, où siège la profession et les différents ministères qui établissent des réglementations en lien avec le monde agricole. « C’est une reconnaissance par l’administration du manque de cohérence et de l’empilement des normes en agriculture qui a prévalu jusqu’à maintenant », poursuivait Luc Jeannin. Les premiers chantiers portent sur la Directive Nitrates, le statut de l’agriculteur, l’usage des produits phytosanitaires… Le chantier est immense !

Bernard Lacour mettait en avant le travail de concertation entre la FDSEA et la DDT sur l’arrêté préfectoral à prendre en lien avec l’arrêté de 2006 relatif aux règles d’utilisation des produits phytosanitaires. « Nous avons trouvé un terrain d’entente quant aux choix des points d’eau à protéger en maintenant la surface agricole productive sur notre département, sans régresser sur la protection des points d’eau par rapport à la situation actuelle et en valorisant le travail de cartographie des cours d’eau "Loi Biodiversité" en cours de réalisation sur le département », soulignait le président de la FDSEA pour qui « ce type de fonctionnement est à maintenir pour éviter de sombrer dans une démagogie administrative déconnecter du terrain, de ses problématiques et de ses besoins ».

Manifestement placée sous le signe de la chaleur, cette rencontre s’est conclue au cours d’échanges informels au cours des quels le préfet a individuellement échangé avec les agriculteurs et apprécier le ressenti réel de chacun sur les sujets évoqués. Il entend « continuer son rôle de porte-voix de vos revendications auprès du ministère de l’Agriculture » et a à cœur d’aider les agriculteurs.

Edith Bruneau