Innovation : La ferme 3.0 préfigure l’agriculture de demain

« On attend beaucoup de cette ferme pour mettre en place de nouveaux itinéraires », explique Daniel Roguet. A Aizecourt-le-haut, dans la Somme, la Ferme 3.0 s’étend sur 25 hectares et « fonctionne comme une ferme normale », affirme son président. Au détail près que Jean-Marie Deleau, agriculteur, l’a mise à disposition afin de « limiter les intrants pour travailler davantage l’agronomie, étudier des assolements », précise le président. Il s’agit notamment de répondre à « une demande forte de la société de prendre en compte l’environnement au niveau des pratiques » tout en conservant l’ « objectif de garantir son revenu à l’agriculteur », affirme Daniel Roguet. Cette initiative, soutenue par la Chambre d’agriculture de la Somme et l’INRA, a vocation, si elle s’avère concluante, à être partagée : « On attend beaucoup pour pouvoir après décliner des conseils auprès des agriculteurs de la région », ambitionne-t-il. En outre, « l’objectif à long terme c’est d’avoir des formations permanentes », renchérit le président de la Ferme 3.0.

Les OAD, moteurs de la ferme

« Mileos pour les pommes de terre (ndlr : qui permet de connaître le risque mildiou) et le drone », ce sont les OAD qu’utilise Olivier Faict, agriculteur et éleveur dans la Somme. Cela lui permet d’ « apporter la bonne dose au dernier moment, de façon à positionner le dernier apport d’azote », répondant à « deux enjeux : économique et sociétal », résume Alexandre Deroo, agriculteur dans le même département. Au-delà d’avoir un impact positif sur l’environnement, ces outils font économiser d’importantes quantités d’intrants aux exploitants ce qui est « bon pour [leur] revenu », selon Olivier Faict. Parmi les OAD présents sur la Ferme 3.0, des « stations agro-météo connectées à la parcelle » présentées par Martin Ducroquet, cofondateur de l’entreprise Sencrop qui les commercialise. Elles permettent de mesurer la pluviométrie, la température, l’hygrométrie et l’anémométrie. Connectée au smartphone de l’exploitant, la station lui permet de « faire ses propres historiques » et de « créer des alertes », détaille M. Ducroquet. En outre, « c’est un outil collaboratif », affirme-t-il. Réduire les pertes, limiter l’intervention vers « l’agriculture de précision », ou encore disposer d’une « traçabilité de tout ce qui s’est passé » sont les objectifs fixés par Sencrop qui estime que cet outil devrait équiper quasiment 100 % d’agriculteurs d’ici quelques années. Autre innovation : Robot Dino. Il s’agit de « robots qui fonctionnent avec des batteries qui ont à peu près 5-6 heures d’autonomie », nous apprend Sébastien Descamps, ingénieur référent de la Chambre d’agriculture de la Somme. Cet outil de 800 kg guidé par GPS permet l’automatisation du désherbage : « il sert à réduire la main d’œuvre, à améliorer les conditions de travail et à diminuer la consommation de pesticides », énumère Lionel Montchalin, chef de produit chez Naïo Technologies, l’entreprise conceptrice du robot.

Expérimentations grandeur nature

« On a trois types de conduite différents », explique Matthieu Preudhomme, ingénieur référent de la Ferme 3.0. Des essais annuels sont ainsi menés sur les parcelles de l’exploitation. La première partielle est dite « assurance locale », c’est celle qui sert de témoin où les techniques habituelles sont déployées. La deuxième est en « conduite intégrée ». Dessus, l’IFT (indicateur de fréquence des traitements) doit être diminué de 35 %. Enfin, les véritables espoirs se concentrent sur la parcelle « Phyt’less » : « On a l’objectif de réduire de 70 % les produits phytosanitaires », ambitionne Matthieu Preudhomme. Pour ce faire, « on va simplement déclencher le pulvérisateur de façon localisée à l’endroit où se trouve l’adventice ». Cela devient possible grâce à la localisation par GPS, même si le système est encore est à l’étude. En effet, M. Preudhomme considère que « tout l’enjeu là-dessus c’est de trouver les bons capteurs ».