Politique agricole commune
« Notre vision n’est pas majoritaire »

Le député européen Arnaud Danjean était, le 24 juin, devant l'assemblée départementale de Saône-et-Loire pour y exposer la situation de la Politique agricole commune (Pac). Son constat est sans détour : la France n'a plus l'avantage, ce qui n'empêche pas d'agir. Ses explications.
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C'est une chose rare que de voir un député européen, par ailleurs attendu au Conseil régional dans la même journée, venir faire état d'une situation politique et budgétaire en Europe avec pédagogie. Certains verront sans doute dans son intervention un tableau noir propre à décourager bien des agriculteurs et des politiques. Mais en déclinant sa pédagogie, Arnaud Danjean a bien souligné que l'action politique était possible pour sauver le modèle agricole français, par la construction du compromis et la recherche quotidienne de la construction d'une majorité, une majorité qui n'existe pas aujourd'hui certes, mais le travail politique est précisément de tenter de la construire...

Le couple franco-allemand fissuré


Pour bien comprendre, il faut rappeler qu'en Europe l'institution souveraine est le Conseil européen. « Le Parlement peut certes infléchir les choses. C'est ce que nous avons tenté de faire en refusant une réduction de 30 % du budget sur le budget de l'année précédente ! Hélas, la France a accepté ce budget en février 2013. L'agriculture a ainsi perdu 7 milliards d’€ d'aides directes ! Nous avons perdu sur ce sujet ».
Pourquoi cette acceptation de la France ? Quelques éléments de réponse donnés par le député... « Parce que le couple franco-allemand –qui était moteur au départ pour la Pac– s'est fissuré. La vision de la France pour la Pac n'est aujourd’hui plus majoritaire. Parce que le parlement européen fonctionne sur le principe de la proportionnelle intégrale, ce qui signifie que personne ne dispose de majorité. Nous sommes 210 députés PPE au parlement sur 751 députés, et nous sommes le groupe politique le plus important. Pour autant, 210 sur 751, cela ne fait pas une majorité. Parce qu'aussi, il faut en avoir conscience, la population européenne est de plus en plus urbaine, ce qui fait évoluer les priorités et les enjeux chez nos voisins ».

Un travail en commun


« Et la difficulté est qu'aujourd'hui », a-t-il développé, « les pays du Nord de l'Europe veulent du libéralisme. Il ne faut pas se voiler la face : oui, les pays du Nord sont favorables à un système libéral dans lequel les plus forts, les plus compétitifs l'emportent. Ils ne parlent pas de crise agricole, mais d'opportunité. Et les Allemands ont tendance à rallier cette position. Il faut donc désormais composer avec cette vision, même si nous ne partageons pas ce modèle, agréger des gens et des pays pour remettre de la régulation. C'est un travail compliqué, mais notre travail au parlement a déjà montré qu'il pouvait aboutir. Nous avons déjà gagné, sur le zonage par exemple, grâce à un travail de fond de nos professionnels. Nous avions des arguments solides et nous avons su convaincre ». Et se tournant alors autant vers les élus du Conseil départemental que vers Bernard Lacour, président de la FDSEA de Saône-et-Loire, présent pour l’occasion, « continuons à travailler pour créer des majorités ».