Négociations commerciales internationales
L'ex-directeur critique l'OMC

Publié par Cédric Michelin
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Les transformations profondes de la structure du commerce mondial rendent obsolètes les principes du GATT et les modalités classiques de la négociation à l'OMC, de même qu'elles enterrent les politiques mercantilistes, car l'enjeu n'est plus la protection tarifaire mais la convergence des normes entre pays. C'est la thèse que l'ancien Directeur Général de l'OMC développe dans un court essai publié par le think tank En temps réel, dans lequel il appelle à un renouvellement de la gouvernance du commerce international.
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Les mutations dont parle Pascal Lamy se résument dans l'expression désormais connue de « Made in the world ». La généralisation des chaînes de valeur globales a fortement impacté la localisation de la production et, désormais, les exportations d'un pays et la valeur ajoutée qu'il en retire dépendent fortement de ses importations. L'auteur en déduit que la logique mercantiliste, consistant à se protéger des importations, n'est plus adaptée à la réalité. Or celle-ci imprègne l'esprit du GATT, accord international à l'origine de l'OMC.

Depuis sa création, l'OMC s'est occupée principalement de la réduction globale des droits de douane, objectif partagé par l'ensemble des pays membres afin d'accroître le commerce international. Mais aujourd'hui, les droits de douane sont, d'après l'auteur, de moins en moins efficaces et de moins en moins utilisés. Les obstacles au commerce se situent désormais principalement dans les écarts entre les règlementations des pays, écarts qu'il s'agit de réduire. C'est là le principal défi que Pascal Lamy identifie pour le futur : la convergence des préférences collectives, le passage de l'interdépendance économique à « l'interdépendance sociétale ».

Dans ce contexte nouveau, les rapports de force sont modifiés. Si les protections liées aux préférences collectives (OGM, biodiesel, hormones, etc.) concernent principalement les pays développés, on assiste à une montée en puissance des pays émergents dans la gouvernance de l'OMC. Cela rend les négociations d'autant plus complexes.

L'auteur considère ainsi que l'OMC n'est plus adaptée à la réalité du commerce international. Son mandat ne permet pas de traiter les problèmes nouveaux tels que les restrictions aux exportations (notamment pour les produits agricoles) ou les questions monétaires. Ses procédures de négociation (« paquet global », consensus) sont à l'origine de blocages et de lenteurs. Une réforme de l'OMC est donc nécessaire, « si l'on souhaite faire prévaloir le multilatéralisme sur le bilatéralisme ».