IGP Brillat-Savarin
Et de nouvelles perspectives...

Depuis le 19 janvier dernier, le Brillat-Savarin bénéficie d’une IGP, une Identification géographique protégée. Un vrai plus, non seulement pour les fabricants de ce fromage, mais aussi pour les producteurs de lait.

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La fabrication du Brillat-Savarin remonte à l’époque médiévale. Ce savoir-faire, développé et transmis aux fromagers de génération en génération, s’est répandu dans les fermes au cours des XVIIe et XVIIIe siècles. La pratique d’un caillage long et d’un égouttage naturel correspondait parfaitement au rythme de vie des exploitations d'alors. On trayait les vaches le soir tandis que le caillage du lait s’opérait la nuit. Au matin, on mettait le caillé à égoutter, sans surveillance particulière.
Dès le XIXe siècle, se sont développées - dans la Brie comme en Bourgogne - des pratiques d’enrichissement du lait en matière grasse à partir de crème de lait. La technique est alors devenue bien plus délicate : l’ajout de matière grasse a en effet pour conséquence une rétention d’eau plus importante qui conduit à un caillé plus fragile, lequel nécessite d’être manipulé avec précaution pour ne pas le briser.
S’inspirant de cela, en 1930, Henri Androuet, plus important commerçant en fromages de la capitale, mit au point le "Brillat-Savarin", fromage baptisé du nom du très illustre gastronome du XIXe siècle et auteur du très célèbre ouvrage culinaire "Physiologie du goût", Jean Anthelme Brillat-Savarin. Et le succès de ce fromage ne tarda pas... Dans les décennies qui suivirent, d’autres fromagers en produisirent eux aussi, toujours selon la recette d'Androuet tout en respectant son nom de "Brillat-Savarin". Rapidement, ce fromage devint incontournable dans les grands restaurants comme sur les bonnes tables.

 

Tournant des années 2000
La production de Brillat-Savarin connu un nouvel engouement dans les années 1970. Au début des années 2000, les fabricants de ce fromage et les organisations professionnelles du lait se mobilisèrent pour définir ensemble des caractéristiques propres, ce qui aboutit, avec le concours de la Fnil (Fédération nationale de l'Industrie laitière) et du Cniel (Centre national interprofessionnel de l'économie laitière), à une définition en bonne et due forme du Brillat-Savarin, définition dès lors inscrite dans le décret Fromage de 2007. Quant aux fabricants bourguignons, ils fondèrent en avril 2006 le Groupement de promotion du Brillat-Savarin affiné de Bourgogne. Un même réflexe de protection réunit alors les deux territoires historiques de production, la Brie et la Bourgogne, pour hausser les exigences qualitatives sur l'ensemble de la zone de production. L’étape suivante a vu la réunification des professionnels, dans les deux régions, pour une démarche plus ambitieuse encore. C'est ainsi qu'en 2013, la filière toute entière se mettait au travail pour élaborer un cahier des charges visant à l’obtention d’une reconnaissance en Indication géographique protégée. Reconnaissance enregistrée au Journal officiel de l’Union européenne le 19 janvier dernier...


 

La Bourgogne majoritaire

 

Produit à plus de 90 % en Bourgogne, le Brillat-Savarin dispose d’une aire de fabrication et d’affinage s’étendant du sud-est de la Bourgogne au centre de la Seine-et-Marne, traversant cinq départements : la Seine-et-Marne, l'Yonne, l'Aube, la Côte-d’Or et bien entendu la Saône et Loire. Cela représente 879 communes, dont 73 situées dans notre département. En 2015, un peu plus de 20 millions de litres de lait étaient destinés à la fabrication du Brillat-Savarin, soit l'équivalent de la production d'environ 2.700 vaches laitières. On recense neuf fabricants, dont deux affineurs. Avec, à la clé, 1.400 tonnes de production totale annuelle en moyenne pour environ 80 % de fromage affiné et 30 % de la production exportée vers l’Allemagne, la Belgique, l’Angleterre et l’Amérique du Nord. « L’IGP a surtout un intérêt pour ceux qui exportent. L’impact est moindre dans notre pays, précise-t-on du côté de la Fromagerie Girard à Torcy. Pour notre part, l’IGP n’a pas forcément entraîné une montée en puissance de la production, mais nous essayons d’améliorer en permanence notre fromage en termes d’onctuosité, de conservation… ». Et leur Brillat-Savarin est de fait savoureux...


Stéphane Convert
« Une bonne chose »

 

Éleveur et président de la section des éleveurs laitiers de la FDSEA 71, Stéphane Convert souligne que la démarche a été impulsée par les transformateurs. Tout en précisant l’intérêt réel pour les producteurs. Rencontre.



Comment jugez-vous l’obtention de cette IGP ?
Stéphane Concert : c’est une bonne chose, mais c’est avant tout un projet de transformateur. On peut "remercier" les producteurs qui livrent le lait aux PME concernées. Cela a aussi comme avantage de fixer du lait sur le territoire. J’aurais toutefois aimé que la zone soit plus étendue en Saône-et-Loire. L’Europe nous a lâché du côté des quotas mais il peut y avoir pour certains une forme de protection avec l’IGP.

Qu’est ce que représente une IGP ?

S. C.
: c’est important en terme d’image pour le producteur de lait. Cela lui redonne de la fierté et montre aussi qu’en Bourgogne, il y a des fromages de qualité. Il n’y a pas que la Franche-Comté. En outre, le lait devient le quatrième pilier de la région avec le vin, les céréales et la viande.

Y-a-t-il un intérêt économique à la démarche ?
S. C.
: pour ce qui de l’aspect prix, cela change la valeur de l’entreprise. Et, forcément, on intéresse un peu plus de monde.