Vaches allaitantes
Pour un bon colostrum

L’hiver dernier, l’équipe technique de Charolais Horizon a réalisé une étude sur la qualité des colostrums auprès d’un échantillon d’adhérents. Ce travail a mis en évidence le lien entre la bonne maîtrise des pratiques d’élevage et la qualité des colostrums. La preuve aussi que tout est lié : ration des vaches gestantes, maitrise sanitaire, productivité économique…
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Durant l’hiver dernier, le groupement Charolais Horizon a réalisé une étude sur le colostrum des vaches allaitantes auprès de ses adhérents. Objectif : étudier les liens existant entre les pratiques d’élevage, la qualité du colostrum et l’immunité des animaux. La prise d’un colostrum de qualité par les petits veaux est l’une des premières mesures de prévention pour limiter l’usage des antibiotiques.
Durant la dernière campagne de vêlage, un peu plus de 200 échantillons de colostrum issus de 37 élevages adhérents de Saône-et-Loire ont été collectés par l’équipe technique de Charolais Horizon. Ces échantillons ont tous été analysés pour en mesurer leur qualité. Leur valeur moyenne était de 25,5 % BRIX, rapporte Fabien Langlois (1). Mais les valeurs étaient assez différentes d’un élevage à l’autre. Les deux tiers étant toutefois « bons (>26%) » à « excellents (>30%) » dans des exploitations d’un bon niveau technique, révèle-t-on.

Soigner les vaches taries



Comme le démontre les résultats de l’étude (lire encadré), les élevages dont les colostrums sont les plus riches soignent davantage l’apport de concentrés à leurs vaches et leur distribuent quotidiennement des minéraux. Les animaux sont vaccinés, déparasités. Clairement, la qualité du colostrum s’anticipe par une préparation de la vache en amont, explique le vétérinaire Guillaume Forgeat. Ce dernier recommande notamment de ne pas négliger la phase de tarissement (3 semaines avant le vêlage) suivie des trois semaines suivantes ; soit les six semaines qui composent la période « peripartum ». Une période particulière puisqu’elle correspond à deux états physiologiques très différents, signale le vétérinaire qui indique aussi que la synthèse colostrale débute 3 à 6 semaines avant le vêlage.

Ration adaptée



Du fait d’une capacité d’ingestion réduite et des besoins du fœtus, la vache en gestation est en déficit énergétique. Ce qui justifie de soigner la ration avant vêlage, explique Guillaume Forgeat. Un impératif qui nécessite une connaissance de la qualité des fourrages (analyses), des investissements en concentrés le cas échéant et un calcul de ration adéquat, préconisent les intervenants. Le démarrage de la lactation provoque une forte fluctuation de la calcémie, poursuit-il. D’où la nécessité impérative de maîtriser la « BACA » au moment du vêlage, recommande le vétérinaire. Autre spécificité de la période « peripartum », la vache subit une chute d’immunité au moment du vêlage. Une cure d’oligo-éléments est alors indispensable (sélénium, cuivre, zinc, vitamine E).
« Il est très important de gérer le statut immunitaire du troupeau », recommande par ailleurs Guillaume Forgeat qui encourage à vacciner tout le troupeau reproducteur (IBR, BVD, diarrhée des veaux, FCO).

Prise rapide et massive de colostrum



Le colostrum doit être ingéré par le petit veau le plus vite et le plus abondamment possible, idéalement en une seule prise, recommandent les intervenants. Il est conseillé de s’assurer de la bonne prise colostrale en surveillant la température du veau, sa glycémie. Une prise de sang permet éventuellement de déceler une mauvaise absorption intestinale. Afin de pallier à toute déficience, il est recommandé de disposer d’une banque de colostrum au congélateur. Le colostrum congelé a l’avantage d’être adapté au parasitisme de l’élevage, argumente Guillaume Forgeat. La décongélation la plus appropriée se fait au bain-marie à 40°C (plutôt qu’au four à micro-ondes), à raison d’une heure pour un demi litre, recommande le vétérinaire.

Et bien s’occuper du jeune veau…



Au-delà de la prise colostrale, il est important « de bien s’occuper du jeune veau », rappelle Guillaume Forgeat. « Le jeune veau est un pré-ruminent. Il faut lui apporter de la fibre dès 15 jours d’âge ainsi qu’un complémentaire, de l’eau et du sel. De quoi faire un bon rumen pour partir au pré ». A la mise à l’herbe, le vétérinaire recommande l’administration d’un bolus d’oligo-éléments et les vaccinations adéquates. Les conditions d’hygiène sont importantes. Désinfection des cordons, maitrise de la pression infectieuse des bâtiments, périodes de reproduction, vaccinations… sont autant d’aspects à maîtriser, recommande le praticien.

(1) Etudiant en licence professionnelle, Fabien Langlois a supervisé cette étude au sein de Charolais Horizon, sous la direction de Pierre-Antoine Comte, dans le cadre de son apprentissage avec la Chambre d’agriculture de l’Aveyron.
(2) Du groupe vétérinaire UNIVET Digoin Gueugnon.

Colostrum
La nature fait bien les choses !



Le colostrum s’accumule pendant les six dernières semaines de gestation et est excrété par la mamelle pendant les six premiers jours après le vêlage. En pratique, il correspond au produit de la première voire de la seconde traite. Son rôle premier est la transmission de l’immunité au petit veau qui nait dépourvu de système immunitaire. Le colostrum lui fournit ses premiers anticorps pour se défendre contre les maladies du veau. Il a aussi un rôle nutritionnel et énergétique essentiel en apportant vitamines, minéraux, oligo-éléments, facteurs de croissance, lipides… tous indispensables au développement du petit veau. Le colostrum lui donne la force de se relever, de téter, etc… La teneur en matière protéique du colostrum est 4 à 5 fois plus élevée que celle du lait. 30 à 40% de cette matière protéique est constitué de globulines et notamment les immunoglobulines (IgG) qui sont des anticorps. La qualité du colostrum est liée à la quantité d’IgG qu’il contient. L’unité utilisée pour mesurer cette qualité est le « BRIX ». Elle se mesure de différentes manières. Utilisable en élevage et peu onéreux, le réfractomètre optique est à la portée d’une exploitation. C’est la méthode qui a été utilisée par Charolais Horizon dans son étude.
Un bon colostrum devrait avoir une valeur de plus de 26 BRIX. Une telle teneur d’anticorps équivaut à une prise de colostrum d’environ deux litres, ingérée en une seule fois, dans les six premières heures de vie du veau. La prise de colostrum doit être rapide, massive et si possible non fractionnée car la concentration en anticorps chute au fil des heures. De plus, la barrière intestinale du petit veau ne reste perméable que durant 24 heures et cette perméabilité diminue au fil des heures. Quantité et qualité sont les maitres mots de la prise colostrale.



Echantillon
Les facteurs de qualité des colostrums



De cet échantillonnage ressort un certain nombre de constats sur les facteurs de qualité des colostrums. Par exemple, on observe que les meilleures valeurs sont obtenues par des élevages de 80 à 100 vaches allaitantes. Les génisses semblent produire un meilleur colostrum que les vaches, ce qui traduirait un effet de dilution lié à la maturité des animaux. Les meilleurs colostrums sont aussi issus de vaches dont les rations sont plus concentrées en matière azotée. Ils proviennent en outre de troupeaux vaccinés et déparasités. La minéralisation est également déterminante sur la qualité du colostrum. Outre ces observations issues de l’analyse des résultats de l’échantillonnage, les intervenants signalaient d’autres facteurs « subis » de variation de la qualité du colostrum comme les animaux eux-mêmes, la race, la saison de vêlage, les jumeaux, la durée de tarissement, la santé de la mère, son volume de production de lait, etc…