Coopérative Bourgogne du Sud
Moissons du monde

Publié par Cédric Michelin
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Courir le monde pendant plus d’un an au fil des moissons : un pari fou que s’est lancé Christophe Dequidt, rédacteur pour la presse agricole et dirigeant d’une société de communication, invité par Bourgogne du Sud à témoigner sur son périple, lors de la dernière assemblée générale de la coopérative, le 4 décembre à Chalon-sur-Saône.
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« Vous ne pouvez avoir une vision d’un pays qu’en y allant, en rencontrant les gens, en leur parlant. Tout n’est pas linéaire et tout n’est pas inscrit dans le marbre… » Le voyage, c’est toujours « l’autre », un adage que Christophe Dequidt et son épouse Sylvie ont emporté dans leurs bagages, multipliant les rencontres et recueillant les témoignages de plus de quatre cents professionnels de la sphère agricole mondiale, tout au long des 140.000 kilomètres parcourus et des dix-huit pays traversés. Et autant de souvenirs partagés le temps d’une conférence, avec les adhérents de Bourgogne du Sud.
Un voyage autour de la planète qui avait pour fil conducteur le blé : « symbole de la vie, symbole de la paix, un produit noble qui nourrit 3 milliards d’individus… » Seul dénominateur commun entre le paysan indien sur son lopin de terres de 0,5 ha et cette exploitation de 1,25 million d’ha au Kazakhstan ! On dit que le blé est né à Alep, en Syrie, il y a 10.000 ans. Mauvaise pioche car la folie humaine en a fait aujourd’hui une étape interdite. Turquie, Ukraine, Chine, Inde, Argentine, Australie, Etats-Unis…, Christophe Dequidt a multiplié les escales, « riche » d’un carnet d’adresses international, glané avant son départ auprès d’entreprises et groupes agricoles. « Nous étions 1 milliard d’individus sur terre en 1900, 6 milliards en l’an 2000 et le 1er novembre dernier, un peu plus de 7,3 milliards. On prévoit entre 8,5 et 10 milliards en 2050, un chiffre hallucinant ! » Entre 220 et 240.000 bouches de plus à nourrir chaque jour, la question étant de savoir comment ? « 3 milliards de jeunes de moins de 25 ans dans le monde aujourd’hui, dont le quart en Afrique et la grande majorité en Afrique subsaharienne. Qu’on ne s’étonne pas à un moment donné, quand une personne n’a pour seule vision du monde que de se battre pour manger, qu’il se dise : c’est mieux ailleurs… ».

1 milliard de tonnes de blé à l’horizon 2050


Les habitudes alimentaires changent : « en 2050, on prévoit 2 milliards d’individus obèses, dont le tiers en Chine, un pays de plus en plus consommateur de viandes. Savez-vous qu’un cochon sur deux dans le monde aujourd'hui est chinois ? Il faudra bien que vous, producteurs céréaliers, puissiez les nourrir… » La Chine dans le même temps réduisant sa dépendance en matière de production de lait : « ils en sont aujourd’hui à 25 % d’autonomie laitière, avec des fermes de 300 à 450.000 têtes… » Les productions végétales changent aussi : « considérant qu’ils ne pourraient produire sur place de quoi nourrir la population, les autorités chinoises ont fait le choix de remplacer les cultures de soja par du maïs, qu’ils sont en train aujourd’hui d’abandonner, après avoir misé il y a une dizaine d’années sur le blé. Avec pour conséquence d’être aujourd’hui en autosuffisance à 95 %, d’importer les deux tiers du soja produit dans le monde et demain, de devenir le premier importateur de maïs… » .
Autres chiffres évoqués par Christophe Dequidt au sujet du blé: « une centaine de pays producteurs, mais 90 % de la production concentrés sur 10 pays, pour une production globale de 700 millions de tonnes. En 2050, on estime les besoins à 1 milliard de tonnes, il faudra bien trouver et les terres et les semences ! » Alors rappelle t-il, « que depuis 2000, la production est inférieure une année sur deux à la demande… » Un défi de plus pour l’agriculture mondiale, mais avec un élément nouveau, celui du changement climatique…