Produits agroalimentaires Européens
Embargo russe total

Publié par Cédric Michelin
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En réponse aux sanctions économiques prises par l’Union Européenne (UE) vis-à-vis de la Russie, Moscou a décidé d’interdire totalement les importations de la majorité des produits agricoles et alimentaires européens. Une décision lourde de conséquence puisque ces échanges constituent 10 % des exportations de l’UE.
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La Russie a décidé, le 6 août, d’interdire pendant un an l’importation de produits agroalimentaires en provenance des pays ayant adopté des sanctions économiques à son encontre. L’utilisation de l’arme commerciale, sous couvert de « protection des consommateurs », est une habitude pour Moscou qui avait déjà interdit quelques jour plus tôt les importations de viande de Roumanie et d’animaux en provenance d’Italie, de Bulgarie et de Grèce, officiellement à cause de la découverte d’un premier cas d’ESB en Roumanie. Un embargo sur les fruits et légumes polonais avait également été décrété le 30 juillet, justifié par des « violations répétées » de la validité des certificats. Cette nouvelle interdiction n’est donc pas une surprise, d’autant que Vladimir Poutine avait clairement évoqué ce type de représailles pour répondre aux sanctions économiques prises par l’UE, Etats-Unis et Canada qui manifestaient ainsi leur désaccord vis-à-vis de l’implication russe dans le conflit avec l’Ukraine. Pour mémoire, ces mesures touchaient des secteurs clés de l’économie russe, interdisant en particulier l’accès des banques publiques russes au marché occidental des capitaux, et limitant les exportations d’armes et de certains équipements pétroliers vers la Russie. La raison s’avère, cette fois, beaucoup plus explicite : « toutes ces mesures ne sont purement qu'une réponse » a déclaré le 7 août Dmitri Medvedev, premier ministre russe, faisant référence aux sanctions occidentales. « Nous sommes persuadés que nous arriverons à retourner la situation en notre faveur » a-t-il également ajouté. La Commission européenne a déploré cette réaction, tout en confirmant que cet embargo ne remettra pas en question la position de l’UE vis-à-vis de l’annexion "illégale" de la Crimée et de la situation en Ukraine. Une des mesures envisageables de son côté serait un recours à l’OMC.


Coup dur pour les producteurs européens



L’annonce d’ « embargo total » sur la plupart des produits alimentaires européens a été confirmée le 7 août par M. Medvedev. Or, si la Russie est une grande exportatrice de céréales, elle importe également beaucoup de produits agroalimentaires européens, notamment des viandes (bœuf, porc, volaille), du poisson, du lait, des fruits et légumes et des produits transformés qui représentent 10 % des exportations agricoles et agroalimentaires de l'UE, soit 12 milliards d'euros par an (selon Eurostat). La mesure risque d’accentuer la crise des fruits actuellement traversée par les pêches et nectarines mises à mal par la concurrence espagnole. L’embargo pourrait maintenant impacter les pommes, les bananes, les tomates et les pommes de terre. Xavier Beulin, président de la FNSEA, a exprimé son inquiétude sans pour autant souhaiter un renoncement aux sanctions de la part de l’UE. Il s’est dit rester optimiste car « l'hiver est très long en Russie et je n'imagine pas que, demain, Vladimir Poutine tente une manœuvre qui fasse que la population se retourne contre lui si les rayons sont vides, en particulier le rayon viande ». Rosselkhozandor, l’agence sanitaire russe, travaille néanmoins à résoudre ce problème puisqu’elle a déclaré négocier l’augmentation des importations en provenance des pays d’Amérique latine. Des réunions avec l’Equateur, le Brésil, le Chili et l’Argentine devaient se tenir en Russie pour discuter « d’une éventuelle hausse de livraisons des produits alimentaires en provenance de ces pays sur le marché russe ». Le Brésil se serait déclaré intéressé par l’augmentation de ses exportations vers la Russie, qui a de son côté accepté de lever les restrictions qu’elle avait fait peser sur la viande et les produits laitiers brésiliens en raison de « violations de normes sanitaires ». Une éventualité que redoute Luc Barbier, président de la Fédération nationale des producteurs de fruits : « le risque pour les Européens est aussi de se voir confisquer des parts de marché au profit de l'Asie ou de l'Amérique Latine, qu'il sera ensuite très difficile de reconquérir » a-t-il déclaré à l’AFP. La Russie ne paraît pas, pour le moment, ouverte aux concessions : « j'espère sincèrement que le pragmatisme économique prévaudra sur les considérations politiques stupides chez nos partenaires, et qu'ils penseront à ne pas isoler ou faire peur à la Russie », a déclaré M. Medvedev.