Gérard Robert à Autun
Optimiser les surfaces pour limiter les achats

Depuis le printemps dernier, Gérard Robert s’est donné comme objectif d’améliorer la valorisation de ses surfaces fourragères. Pour ce faire, il participe au groupe technique herbe, mis en place avec d’autres agriculteurs dans le cadre du comité territorial de développement de l’Autunois.
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Installé à deux pas de l’agglomération autunoise, Gérard Robert a toujours eu une conduite de son exploitation « assez intensive », comme il le dit lui-même. La pression foncière et le prix des locations aidant, l’éleveur a validé son choix à la mise en place de la PAC, quitte à se priver de la prime à l’herbe et à maintenir un chargement élevé. Aujourd’hui, l’exploitation couvre tout juste cent hectares dont 25 de céréales et 7 de maïs fourrage. Gérard Robert fait naitre 70 veaux charolais issus d’un troupeau 100% inséminé et suivi en contrôle de performances. Mâles et femelles sont engraissés. Sur le plan alimentaire, les babys reçoivent un mélange d’ensilage de maïs, de céréales et de tourteaux. Les génisses et les vaches avant vêlage sont nourries au foin et à l’ensilage d’herbe. Après vêlage, elles reçoivent en plus des céréales et du tourteau.

Ne gaspiller aucune ressource



Sur une exploitation chargée tournée vers la production de viande finie, Gérard Robert a toujours fait en sorte de faire produire ses surfaces au maximum, même s’il reconnait que la démarche « n’est pas forcément rémunératrice » ! Tout cela « amène des frais supplémentaires (engrais, drainage, mécanisation, etc…) et la PAC ne nous a pas favorisés », déplore aujourd’hui l’agriculteur.
L’exploitation a pourtant été l’une des rares de son secteur à se lancer dans l’engraissement des mâles dès les années 70 et à introduire, avec d’autres, l’ensilage de maïs dans le Morvan. Avec un groupe d’agriculteurs innovants, le père de Gérard avait été l’un des fondateurs d’une Cuma dont les héritiers sont aujourd’hui les premiers allaitants du département à s’être équipés d’une mélangeuse automotrice en commun (lire encadré). En dépit de ce passé exaltant et d’une constante ouverture au progrès technique, aux conseils, au travail de groupe, Gérard Robert s’interroge aujourd’hui sur son système. La conjoncture économique dégradée le pousse à vouloir « être encore plus autonome au niveau des achats ». C’est ce qui l’a amené à s’investir dans le groupe herbe du comité territorial de développement de l’Autunois. « Nous avons des prairies avec un potentiel : il faut que nous essayons de le faire exprimer », estime l’éleveur. Cette idée de ne gaspiller aucune ressource est un peu le fil rouge du travail entamé avec le groupe. « Aujourd’hui, nous achetons moins d’engrais mais utilisons beaucoup de fumier. Or ce fumier à un coût puisqu’il provient des quantités de paille que nous sommes contraints d’acheter pour nos stabulations sur aire paillée ». Un coût qui incite à valoriser au mieux ce fumier au sein du système fourrager.

Profiter de l’interculture



Gérard Robert souhaite en outre optimiser la valorisation de ses prairies temporaires. Avec une exploitation en zone vulnérable, l’éleveur est obligé d’implanter un couvert « piège à nitrates » entre le blé et le maïs. « Cette interculture impacte quand même le maïs qui suit. Elle décale la date de semis et assèche la terre au printemps », constate l’éleveur. Pour compenser cet inconvénient, il a tenté d’incorporer du trèfle violet à son couvert de ray gras afin de pouvoir en faire un ensilage d’herbe printanier de bonne valeur azotée. La difficulté, précise Gérard, « c’est que les légumineuses sont plus longues à démarrer que les graminées. On attend de la recherche en production fourragère d’avoir des variétés de légumineuses plus agressives vis-à-vis des graminées ». De manière générale, pour être moins dépendant des achats de tourteaux, Gérard Robert cherche à incorporer davantage de légumineuses dans ses prairies.

Luzerne



Depuis plusieurs années, il cultive de la luzerne. Ses terres morvandelles sont chaulées chaque année depuis des décennies, ce qui a permis de faire remonter le PH à 6,2. Ici, l’apport de chaux est un préalable indispensable pour produire, même de l’herbe, estime l’éleveur. La luzerne demande également de la potasse. « Tout cela coûte, mais cette légumineuse donne une production importante derrière et surtout une richesse en matière azotée », confie Gérard. Sur ses trois hectares de luzerne, il récolte trois coupes ; une d’ensilage et deux d’enrubannage.
Les terres labourables de l’exploitation reçoivent 4 ou 5 années de céréales (blé/maïs/blé/orge) suivies de trois années de prairies temporaires. Les prairies naturelles sont retournées de temps en temps pour les renouveler : « cela permet de couper les mauvaises herbes », explique Gérard. Le couvert des prairies temporaires est composé de raygras et de trèfle ainsi que de fétuque et de fléole. Ces deux dernières graminées produisent un peu moins la première année, en comparaison d’un ray gras, mais leur production est plus pérenne dans le temps, justifie Gérard Robert.

CTD de l’Autunois

Un groupe technique herbe est né



Dans le cadre des comités territoriaux de développement, initiés l’an dernier par la Chambre d’agriculture de Saône-et-Loire, un groupe technique « herbe » s’est constitué dans l’Autunois. La thématique a été choisie au printemps 2014 alors que la sécheresse s’installait de nouveau dans le secteur, faisant craindre pour la constitution des stocks de fourrages hivernaux. A l’époque, plusieurs éleveurs des cantons d’Autun, Epinac, Lucenay-L’Evêque, avaient pensé aux cultures dérobées pour se sauver d’une pénurie de fourrage annoncée. Par chance la météo a changé ses plans, mais le groupe a poursuivi sa réflexion sur l’herbe, faisant appel à leur conseillère de secteur Sophie Mobillion et à l’animateur départemental d’Herbe Hebdo Eric Braconnier. Ils se sont réunis en novembre dernier à Saint-Pantaléon pour ébaucher leur projet commun. Un nouveau rendez-vous devrait avoir lieu ce printemps.


Meilleure autonomie




Ce que recherchent les éleveurs à travers ce groupe de travail, c’est « une meilleure valorisation de l’herbe avec comme objectif l’autonomie et la maitrise des charges », confie Gérard Robert, l’un des éleveurs participants. Les attentes du groupe portent notamment sur « la valorisation des prairies naturelles ; comment les remettre en état suite à un piétinement excessif ou une sécheresse ? Comment faire exprimer au maximum leur potentiel ? ». Les participants cherchent aussi « comment faire mieux produire leurs prairies temporaires ». Leurs attentes portent également sur « la consommation de concentrés par les broutards sous leurs mères ». Une consommation qu’ils jugent souvent trop élevée et donc coûteuse. Enfin, constatant que la plupart des références départementales ne sont pas adaptées à leur terroir autunois-morvandiau, le groupe aimerait adapter les références techniques disponibles à leur propre contexte.


Essai de pâturage tournant




Ce printemps, le groupe envisage de suivre un lot de génisses d’un an en pâturage tournant. « Les animaux seront pesés à la mise à l’herbe ainsi qu’à leur retour en bâtiment afin de calculer leurs croissances », explique Gérard Robert qui accueillera cet essai sur sa propre exploitation. Pour limiter les achats de concentrés, les éleveurs comptent augmenter les croissances lorsque les génisses seront à l’herbe grâce au pâturage tournant. Ce gain de croissance devrait permettre de compenser des baisses de performances en hiver induites par une moindre consommation de concentrés.

Dans quelques semaines, les éleveurs de l’Autunois suivront également la production des prairies temporaires qu’ils ont semées en dérobée l’automne dernier.



Cuma « La Nouvelle »

Fenaison en commun depuis deux ans



Gérard Robert préside la Cuma « La Nouvelle ». Cette coopérative qui a vu le jour avec l’introduction de l’ensilage et de l’engraissement, assure la plupart des gros travaux de ses exploitations adhérentes : ensilage, moisson, épandages, travail du sol, semis, transport, manutention… Dans le courant des années 2000, plusieurs adhérents (dont Gérard Robert) décidaient de s’équiper d’une mélangeuse automotrice en commun. Aujourd’hui, le groupe en est à sa seconde machine. Pilotée par le salarié de la Cuma, elle assure la distribution de l’alimentation dans six exploitations entre Saint-Pantaléon et Sommant.

Depuis deux ans, quatre adhérents de la Cuma se sont également lancés dans un chantier de fenaison en commun. « Pour nos deux premières saisons, nous avons utilisé le matériel existant sans investir spécifiquement pour l’instant. Nous enregistrons nos temps de travaux et nous mutualisons le travail et le matériel », explique Gérard Robert. La surface totale de foin récoltée est de 120 hectares. Pour limiter les déplacements et optimiser le chantier, les adhérents « essaient de travailler par secteur sans s’occuper des parcelles ». Grâce à cette organisation mutualisée, le groupe a réalisé jusqu’à 35 hectares pressés en une seule journée.

Chaque agriculteur se charge d’un poste du chantier : fauche, fanage, andainage ou pressage. La Cuma fournit son tracteur et la traction est complétée par les tracteurs des adhérents. Idem pour les matériels dont certains étaient déjà présents à la Cuma. La fauche est ainsi réalisée par un tracteur de 130 cv équipé d’un combiné faucheuses avant et arrière pour une largeur totale de six mètres. Le groupe dispose de deux faneuses, l’une de 9 et l’autre de 7 mètres ; deux andaineurs, l’un double et l’autre simple et une presse à bottes ronde, diamètre 180 cm. La saison passée, une entreprise est intervenue pour confectionner des bottes carrées haute densité. Permettant de gagner de la place au stockage et facilitant la manutention et le transport, les grosses balles carrées donnent satisfaction aux éleveurs du groupe. Mais la Cuma n’envisage pas d’investir dans un tel équipement : « nous n’avons pas le volume et cela supposerait aussi d’investir dans un tracteur de forte puissance », confie le président.