Economie
Se souvenir de la loi de King

La loi de King ou "effet King-Davenant", les agriculteurs l’ont naturellement en tête, quand le reste de la société semble l’avoir oublié… A l’heure où les enjeux agricoles sont plus que jamais d’actualité, petite piqûre de rappel…
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Généalogiste et haut fonctionnaire anglais, Gregory King (1648-1712) fut le premier grand statisticien de l’économie. Reconnu pour sa discrétion, il disposait alors de toutes les données confidentielles du Royaume-Uni et a rédigé un rapport, en 1696, dénommé "Observations et conclusions naturelles et politiques sur l’état et la condition de l’Angleterre", lequel sera publié après sa mort avec les ajouts de son ami Charles Davenant.
Ce rapport offre une vision exhaustive de l’Angleterre dans lequel l’économiste se livre à des projections d’évolution de la population et de la consommation en fonction de ses observations et des données qu’il a réunies. Il va même jusqu’à calculer la quantité de bière consommée annuellement en Angleterre !

L’impact de la baisse ou de la hausse…


Gregory King pressent la loi sur la variation du prix des denrées agricoles en fonction de l’évolution de la production. Cette intuition sera formalisée par Davenant et est aujourd’hui encore connue sous le nom de "l’effet King-Davenant" ou "loi de King". Mais de quoi s’agit-il ?
Cette loi économique est une estimation empirique de l’impact d’une baisse de l’offre de blé sur le prix de ce dernier ou sur celui des denrées alimentaires de premières nécessités.
Cet effet est révélateur de l’inélasticité de la demande par rapport aux prix : même si le blé est cher, la demande alimentaire se maintient et un défaut de récolte impliquera une augmentation du prix du blé dans les proportions traduites dans le graphe n° 1.
Grégory King et Charles Davenant ont modélisé cette loi par des coefficients multiplicateurs de prix en fonction des variations de disponibilités.
Dans un marché où l’offre est totalement inélastique (droite verticale O), la demande pour ce produit est très inélastique, ce qui est illustré dans le graphe n° 2 par une courbe de demande D dont la pente est très élevée. Supposons maintenant que l’offre se réduise de 50 % (passant de 100 à 50) et soit alors représentée par la droite verticale O’ ; la demande reste inchangée par ailleurs. Le nouveau prix d’équilibre P’ s’obtient à l’intersection de O’ et D en E’. Il sera alors, d’après King et Davenant, multiplié par 5,5 !

Côté pratique…


Aujourd’hui encore, l’analyse de marché est fortement influencée par ce principe d’offre et de demande. En effet, il suffit dès lors de connaître la variation du stock de blé pour calculer un prix objectif et se fixer un délai d’attente d’un mois environ. De fait, la plupart des analystes revoient leurs estimations de productions et de consommations une fois par mois.
Le principal frein à l’utilisation de la loi comme règle absolue est la difficulté de connaître avec exactitude –et en tous points du Globe– la variation de l’offre. De plus, son caractère empirique entraîne une certaine approximation des variations. Enfin, son calcul se fait toutes choses égales par ailleurs, donc indépendamment des autres facteurs comme les variations monétaires ou les variations de stocks sur les autres céréales.
Reste que cette loi est inscrite dans les esprits et dicte nombre de hausses ou de baisses de prix et a historiquement conduit à la nécessité de disposer de stocks de sécurité. Vous savez, ce que l’on appelait il y a peu encore l’intervention…



Sources :
- www.universalis.fr/encyclopedie/gregory-king ;
- www.mazerolle.fr/HPE/Economistes/King/King.pdf ;
- Histoire des faits et des idées économiques, par Fabrice Mazerolle.