Fusion Bourgogne Franche-Comté
Un avenir industriel à construire

Publié par Cédric Michelin
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C'était le second rendez-vous d'une série de rencontres préparant la fusion prochaine des deux régions Bourgogne et Franche-comté. Après Dole, sur le thème de la transition énergétique, c'est Dijon qui a accueilli les acteurs économiques des deux régions, afin réfléchir aux conditions d'un développement économique réussi pour la future région.
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La parité était dans la salle, avec 50% de Bourguignons et autant de Franc-Comtois, prélude à une grand messe économique forcément oecuménique. Le 4 janvier 2016 le mariage sera consommé, ce second rendez-vous représentait donc une nouvelle occasion de faire se rencontrer les forces vives de Bourgogne et de Franche-Comté, pour envisager l'avenir de façon positive. Sur le thème « Réussir ensemble le développement économique », il s'agissait d'abord de brosser le panorama économique de la future région, avec les CCI, les Chambres des métiers et de l'artisanat et le Conseil économique et social. Peut-être peut-on s'étonner que les Chambres régionales d'agriculture n'aient pas été invitées au débat. L'agriculture, acteur influent et pilier de l'industrie agroalimentaire sur nos territoires, y aurait mérité toute sa place, au même titre que les PME et les PMI, comme ont pu s'en étonner quelques agriculteurs présents.

Savoir-faire et savoir-être « différenciateurs »



En ouverture, François Patriat, président de la Région Bourgogne, a levé toute ambiguïté en délimitant le territoire de la réflexion, circonscrit pour ce second rendez-vous au développement industriel. L'industrie, important vecteur d'activité, de croissance et d'emploi, fait historiquement partie des gènes des deux régions. D'autres réunions aborderont deux autres volets majeurs de l'économie régionale que sont l'agriculture et le tourisme.
D'abord l'état des lieux : la Bourgogne Franche-comté, avec plus de 25% de salariés dans l'industrie, sera la région la plus industrialisée de France, troisième pour les secteurs horlogerie, bijouterie, maroquinerie, lunetterie, quatrième pour la fabrication métallique et l'industrie automobile. La région comptera cinq pôles de compétitivité et une vingtaine de grandes filières et clusters. Marie-Guite Dufay, présidente de la Région Franche-Comté, a particulièrement insisté sur les complémentarités existant entre les deux régions actuelles et les synergies à valoriser dans les orientations et les composantes industrielles. Benoît de charrette, président de la CCI de Bourgogne, en a ensuite dressé l'état des lieux, en invitant d'abord à tordre le cou aux constats négatifs et à regarder sans complexe les forces sur lesquelles s'appuyer. La grande région dénombre 190 établissements industriels, concentrés sur ses marges extérieures et en son centre. Même l'industrie des services est orientées vers la réponse aux besoins du tissu industriel. C'est une « originalité » qui place la Bourgogne Franche-Comté au premier plan de la reconquête industrielle, vers les grands secteurs dominants que sont la métallurgie, l'automobile, l'horlogerie optique, la chimie caoutchouc et plastique, l'énergie, l'agro-alimentaire, etc.
Tous ces domaines bénéficient de savoir-faire spécifiques, pointus, bien différents des productions mondialisées et standardisées, qui représentent des atouts indéniables y compris à l'export. Des savoir-faire qui s'accompagnent de savoir-être, issus d'une forte et ancienne culture industrielle. Reste quand même un certain nombre de défis à relever, dont l'important défi de la formation initiale et continue, pour conserver et renforcer les savoir-faire, tout en répondant aux besoins des industriels.
Autre point fort relevé par les présidents des Chambres de commerce et d'industrie, la région a appris à jouer collectif, au travers notamment de la dynamique d'innovation de ses cinq pôles de compétitivité. Enfin, la taille ne déterminant pas la valeur, les entreprises innovantes, si petites soient-elles, n'hésitent pas à exporter. Les performances des entreprises industrielles de Bourgogne Franche-Comté, portent la grande région à la troisième place pour la croissance à l'exportation (+2,5% entre 2013 et 2014), avec en prime, la seconde meilleure balance commerciale (plus de 3,7 Md€ en 2014). Sur ce chapitre, elle ne cache pas ses ambitions : « devenir à l'export la petite Allemagne de France ». Sans complexe, elle entend ainsi nouer des alliances avec ses puissants voisins que sont Rhône-Alpes-Auvergne et la région Ile de France, afin que les flux sortants et entrants s'équilibrent. Il va aussi falloir apprendre à compter et prospérer avec « le facteur Suisse », puissant voisin qui peut et doit représenter une chance à saisir et pas seulement pour les nombreux frontaliers.

Où l'on reparle de l'agriculture



4ème région française pour le lait, la viande et les céréales, la Bourgogne-Franche-Comté s'enorgueillit de quelques fleurons, produits de la transformation et de grandes productions exportatrices. Agro-alimentaire et agriculture sont indissociables et la région entend mener une stratégie de conquête dans la transformation notamment, où des marges de développement importantes demeurent pour le lait, les céréales, la viande et le bois. Autant d'enjeux majeurs de la reconquête de valeur pour la région et les activités de production.
L'ambition de construire une nouvelle « région du bien vivre » est à portée de main pour une Bourgogne Franche-Comté à forte valeur patrimoniale et gastronomique. Le fort potentiel qui en découle doit être générateur de « bien vivre » autant pour ceux qui s'y arrêteront que pour ceux qui y résident. Alors où en est-on de la fusion Bourgogne-Franche-Comté à l'issue de cette seconde grande rencontre ?
Pour certains, la majeure partie du chemin est faite, la route tracée, mais cela reste quand même « une vision à partager et un avenir à construire » pour le plus grand nombre. Cette belle ambition va encore demander beaucoup de coopérations, d'explications et d'ouverture d'esprit pour dépasser la tentation du repli sur soi et la résistance au changement si fréquents quand les temps sont difficiles. Un grand nombre d'hommes et de femmes qui constituent les forces vives des territoires se trouvent ainsi confrontés à la difficulté d'envisager sereinement leur avenir, alors que leur quotidien est déjà si difficile à vivre. C'est le cas notamment de nombres d'exploitants agricoles de Bourgogne face à la complexité d'une vision technocratique de l'agriculture si éloignée de leur système de valeurs.