Professionnels du bétail
"Nous avons notre mot à dire"

L’an dernier, le syndicat des commerçants en bestiaux de Saône-et-Loire (SCB 71) se dotait d’un nouveau président en la personne de Paul Pacaud. Homme d’expérience et de dialogue respecté de tous, cet ancien négociant est le nouveau porte-parole d’une profession qui se montre peu, mais qui représente pourtant le plus gros opérateur bétail et viande de Saône-et-Loire.
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Depuis l’été 2014, Paul Pacaud est le nouveau président du Syndicat des commerçants en bestiaux de Saône-et-Loire (SCB 71). Ce fils d’emboucheur, lui-même éleveur de 1993 à 2010, est doté d’une solide expérience dans le négoce saône-et-loirien. Avant de se mettre à son propre compte, Paul Pacaud avait travaillé quinze ans comme acheteur au sein d’un groupement de producteurs. En 1993, il reprenait une exploitation près de Volesvres, avant de lancer sa propre entreprise de commerce en bétail deux ans plus tard. La structure employa jusqu’à six salariés avec une activité conséquente dans l’export de maigre et la viande ainsi que les reproducteurs. Depuis 2010, Paul Pacaud a pris sa retraite. Mais le négoce a su se rappeler à son bon souvenir lorsque les commerçants en bestiaux du département l’ont sollicité pour prendre la présidence de leur syndicat.
Libéré du rythme de travail effréné de cette profession, l’ancien négociant avait le profil idéal pour représenter ses confrères. Connaisseur, respecté par tous et homme de dialogue, il n’exerce plus d’activité commerciale à grande échelle ce qui lui donne une seine légitimité dans un milieu où la concurrence rend délicat tout engagement public.

Défendre les intérêts des négociants


S’ils ont un peu de mal à s’investir dans leur syndicat professionnel, les commerçants en bestiaux ont pourtant grand besoin d’être représentés auprès des organisations agricoles, de la filière et des pouvoirs publics. « Les entreprises de commerce de bétail et de viande ont besoin de voir défendre leurs intérêts professionnels », explique Paul Pacaud. C’est à cette mission que se consacre le nouveau président depuis le mois de septembre dernier. « Je représente les commerçants à toutes les réunions auxquelles je suis invité et, en même temps, je leur fait remonter les informations que je reçois lors de ces rencontres », confie-t-il. Le SCB 71 est affilié à la Fédération française des commerçants en bestiaux (FFCB), laquelle défend les intérêts des professionnels du bétail aux niveaux national et européen.

60 % des animaux passent par le privé


Une cinquantaine de commerçants sont en activité en Saône-et-Loire dont un tiers adhère au SCB 71. S’il est peu représenté dans les organisations de filière, le commerce privé absorbe pourtant 60 % des animaux produits en ferme au niveau national. Le privé est de loin le premier opérateur départemental. « Les douze plus importantes entreprises totalisent 240 millions d’€ de chiffre d’affaires pour 217.000 bovins au rythme de 4.230 bovins par semaine », fait valoir Paul Pacaud. A lui seul, « l’export représente 89.000 têtes pour un chiffre d’affaires de 95.500.000 € ». Le département compte « 17 centres de rassemblement privés agréés pour l’export et 22 autres dotés d’agréments provisoires », détaille encore le président. Les entreprises ont su investir dans les mises aux normes de leurs outils. Intégrant les directives des Services vétérinaires, elles sont aujourd’hui conformes en matière d’environnement, de sanitaire et de transport, explique Paul Pacaud.

Nouvelles restructurations


Les négociants ont également su se restructurer. En témoignent les chiffres d’activité impressionnants des plus importants d’entre-eux. Des restructurations réussies qui ont permis de tenir bon dans une activité qui repose exclusivement sur des niveaux de marge très faibles, où seuls le nombre et la précision des transactions quotidiennes permettent « de se tenir sur le fil du rasoir », confie le représentant des négociants qui précise cependant que les entreprises sont « dotées de capacités financières importantes ».
Dans les années à venir, de nouvelles restructurations seront nécessaires, juge Paul Pacaud. L’érosion du nombre de vaches allaitantes pourrait en effet amener des négociants à évoluer encore. Même si le président souligne qu’à l’échelle de la Saône-et-Loire, le potentiel de production est moins menacé qu’ailleurs où des productions végétales sont possibles.

Partie prenante d’Elvéa 71-58


Les négociants sont par ailleurs très impliqués dans l’organisation du commerce privé à travers Elvéa 71-58, organisation de producteurs reconnue regroupant 440 adhérents en Saône-et-Loire et dans la Nièvre. Partie prenante de l’association, 28 commerçants en bestiaux de Saône-et-Loire adhèrent à Elvéa. Les négociants siègent au collège Acheteurs d’Elvéa 71-58. Ils participent ainsi activement aux différentes commissions de mise en marché organisées par l’association. L’appartenance à Elvéa donne aussi accès aux filières de qualité.
Pour le président des commerçants en bestiaux, Elvéa redonne toutes ses lettres de noblesse au commerce privé. La garantie de paiement permet de lever les craintes des éleveurs vis-à-vis de ce mode de commercialisation en les protégeant financièrement. « Grâce à cette assurance, les éleveurs ont la possibilité de conserver leur liberté de vendre leurs animaux à plusieurs négociants. Ils conservent leur liberté de choisir le meilleur acheteur, de défendre le prix de leur production, sans aucune retenue sur le prix », défend Paul Pacaud qui estime en outre que « l’éleveur n’appartient à personne et qu’il faut lui conserver sa liberté de choix ». Une liberté qui n’existe que si le nombre d’opérateurs sur le terrain est suffisant. « Pour que l’éleveur s’y retrouve, il faut que cette saine concurrence perdure », défend encore le président.
Au-delà du maintien d’une concurrence vitale pour la rémunération de l’éleveur, la défense des commerçants en bestiaux se justifie aussi par leur professionnalisme. Ils détiennent « une connaissance du bétail indiscutable » et leurs entreprises, finement gérées, réalisent des volumes d’activité importants avec peu de main-d’œuvre, décrit Paul Pacaud.

Nécessaire augmentation des cours de la viande


Solidaires des éleveurs face à la crise qui ébranle toute la filière bovine, les négociants se joignent à leurs fournisseurs pour dire que seule une augmentation des cours de la viande bovine peut sauver le secteur. « Les prix sont trop bas et les charges trop élevées », confirme Paul Pacaud. Mais les commerçants en bestiaux sont plus réservés sur les effets des exportations de broutards vers des pays tiers.
Bien qu’elles visent à faire augmenter le prix du broutard, les négociants estiment que les exportations vers la Turquie ou l’Algérie risquent de désorganiser le marché italien en raison de leur caractère trop occasionnel et incertain pour l’heure. La forte demande actuelle pour des broutards légers qui a pour effet de faire monter les cours des jeunes animaux, risque par exemple, de dérégler le marché franco-italien pour les mois à venir, prévient Paul Pacaud. Ce dernier redoute également que toute nouvelle suspension des importations de la part de la Turquie ou d’un pays du Maghreb ne provoque une nouvelle catastrophe dans les cours… Pour les négociants, la meilleure solution demeure une revalorisation des cours de la viande. Quant à l’export sur les pays tiers, « il faudrait qu’il devienne plus régulier, pérenne et durable, auquel cas les cours seraient obligés d’augmenter », estime encore Paul Pacaud.

VBF, Charolais de Bourgogne…



Le président des négociants déplore par ailleurs « qu’aujourd’hui les éleveurs aient de la peine à valoriser les produits de qualité ». Pour lui, toute importation de viande bovine hors union européenne devrait être stoppée. Et la consommation locale devrait être développée. Au minimum, l’approvisionnement devrait se faire en « viande bovine française ». Mais pour Paul Pacaud, « la charte des bonnes pratiques d’élevage » ou encore l’origine « Charolais de Bourgogne, garantissent un très bon niveau de qualité ». En cela, les commerçants en bestiaux soutiennent les éleveurs dans leur action auprès de la restauration collective. « Les nouveaux conseillers départementaux et les maires ont un rôle à jouer », fait remarquer le président.
« Aujourd’hui, on nous demande de la viande bovine bon marché alors qu’il faudrait que la viande se vende plus cher en ferme. La viande bouchère de qualité a du mal à être valorisée par manque de boucheries traditionnelles. La moitié de la viande bovine est absorbée par le haché industriel. Or ce débouché ne rémunère pas suffisamment l’éleveur », conclut Paul Pacaud.

Le SCB 71 aux côtés de la FDSEA



L’automne dernier, le syndicat des commerçants en bestiaux de Saône-et-Loire (SCB 71) est allé manifester aux côtés des éleveurs de la FDSEA et de la section bovine devant la Préfecture de Mâcon. Leur revendication commune portait sur la simplification administrative dans l’export vers l’Algérie. Une dizaine de négociants étaient présents sur place et l’un d’entre-eux avait même fourni des broutards. Cette manifestation conjointe des négociants et des éleveurs était un évènement. Les professionnels du bétail ont fait preuve d’une mobilisation forte à la grande satisfaction du nouveau président du SCB 71 Paul Pacaud. Les manifestants avaient été reçus par le préfet. Cette action a d’ailleurs débouché sur des réunions de travail organisées par la DDPP destinées à harmoniser et simplifier les certificats sanitaires liés à l’exportation dans les pays tiers. Des réunions constructives auxquelles participent désormais activement le syndicat des commerçants en bestiaux de Saône-et-Loire.