Élevages laitiers
7 conseils "anti-sécheresse"

Publié par Cédric Michelin
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La sécheresse frappe le département depuis plusieurs semaine. De la Chambre d'Agriculture de Saône-et-Loire, Thierry Michel et ses collègues livrent 7 préconisations pour faire face en élevage laitier tout particulièrement.
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Il est important de calculer vos besoins en fourrage et d’évaluer vos stocks pour pouvoir planifier vos achats et vos rations pour chaque catégorie d’animaux.
Suite à la sécheresse qui sévit et qui impacte la pousse de l’herbe et les rendements en maïs, quelques pistes à explorer pour pallier au manque de fourrage sont présentées ci-dessous.

1. Implanter des dérobées :
Les fourrages semés en dérobé en été après la récolte d’une céréale constituent des stocks complémentaires d’ajustement. Les rendements sont néanmoins très dépendants des conditions météorologiques, ce qui implique de la pluie en quantité suffisante. Les mélanges graminées/légumineuses sont à privilégier pour un semis fin juillet/début août, tandis que ceux à base de ray-grass italien et de trèfle seront plutôt implantés dès la mi-août. Le ray-grass profitera notamment d’une fin d’été plus humide. Vous trouverez toutes les informations concernant les itinéraires techniques (semis, fertilisation, etc.) sur le lien suivant : www.sl.chambagri.fr.

2. Utiliser la paille :
La paille est un fourrage encombrant et peu digestible, mais qui peut s’avérer intéressante notamment pour des génisses d’élevage si la complémentation est adaptée et répond aux besoins de croissance.
Exemple : par kilo de paille distribué, apporter 100g de tourteau de soja ou 150g de tourteau de colza (plus AMV adapté).
Pour les vaches laitières, la paille peut permettre de combler une partie des besoins d’encombrement pour assurer le bon fonctionnement du rumen et économiser du maïs ou de l’herbe, mais cela impliquera de complémenter en conséquence.
La paille peut aussi être distribuée aux taries, mais faites attention à la préparation au vêlage (l’apport de fourrages et concentrés doit être suffisant les trois semaines avant la mise-bas).

3. La piste des co-produits :
Les co-produits se rapprochent plus des concentrés que des fourrages de par leurs valeurs alimentaires et la taille de leurs particules.
Le choix du co-produit dépend de sa disponibilité, sa valeur alimentaire, son prix et son mode de stockage.
Le prix d’intérêt d’utilisation de ces co-produits peut être calculé avec votre conseiller chambre d’Agriculture. Voir ci-dessous quelques exemples de prix d’intérêts pour les principaux co-produits :


Quel volume produire cette année ?



Dans un contexte de prix du lait faible, et avec la crainte de voir les prix des fourrages et co-produits achetés grimper, il peut être légitime de se poser la question :
4. jusqu’à quel prix d’achat est-il intéressant de maintenir tout mon effectif de VL ?

Tout d’abord, on peut estimer que dans le cas d’une baisse de rendement maïs ensilage de 35 % (passer de 12 à 7,8 t de MS/ha) avec une ration de type 12 kg MS ensilage MPE, 3 kg MS ensilage d’herbe et 1 kg MS de Foin, si l’on adapte les effectifs aux stocks disponibles, la baisse de marge brute de l’atelier est de 26 à 27% (21.000 € pour un troupeau moyen de 70 VL).
Si l’on souhaite maintenir le potentiel de production en ajustant la ration avec 1 kg de paille à 120 €/t et 3 kg de MS de Corn Gluten Feed à 270 €/t de MS (prix d’intérêt), la baisse de marge de l’atelier lait n’est plus que de 10 %. Le recours à l’achat a donc une réponse économique. Il faut atteindre 560 €/t de MS pour que le gain économique de l’achat devienne nul, cela laisse un peu de marge.
Cette simulation a été réalisée avec un prix de lait payé à 350 €/kl toutefois, un mélange soja-colza à 360 €/t et une céréale à 150 €/t.

5. Réaliser un tri sur les vaches
Le recours à l’achat de fourrage et ou de co-produits doit se raisonner avec des vaches qui présentent une bonne réponse à la ration donc pas trop vieilles de lait et produisant un lait de qualité. Avant de réaliser des calculs de besoins d’achat, il faut donc déjà réaliser un tri sur les vaches pour éliminer certains animaux qui, dans un contexte plus favorable, seraient peut-être restés dans le troupeau. Il faut aussi envisager de donner en priorité les fourrages de qualité : ensilage d’herbe, enrubannage et certains foins aux vaches laitières et réserver aux génisses des rations avec une partie de paille mélasse correctement complémentées.

6. Donner des concentrés à condition...
Dans le cas d’une contraction d’effectif, on peut aussi être tenté d’augmenter les quantités de concentré de production. Mais attention, au-delà de 200 g de concentrés par kg de lait produit, la réponse d’un kg supplémentaire de concentré de production est faible, de l’ordre de 0,4 kg de lait (des essais à Fontaines et au Lycée de la Barotte (21) l’ont encore démontré cet hiver). Pour que cette stratégie soit payante, le prix du concentré à la tonne doit être 50 € inférieur au prix de lait aux 1.000 l. Ce qui n’est pas du tout évident en ce moment.

7. Acheter du maïs
L’achat de maïs sur pied est une solution envisageable. La détermination du prix peut se faire avant la récolte en estimant le rendement grain par comptage des grains au m² et en calculant un prix d’équivalence en maïs ensilage exprimé en € par ha.

Une fois le rendement sec estimé avec le vendeur, on le multiplie par le prix de vente net de frais de séchage, sans doute de l’ordre de 150 € tonne en 2015. Il faut ajouter une plus-value pour l’enlèvement des pailles : 130 € par ha pour un maïs à 80 quintaux (14 t de MS), déduire les frais non engagés par le vendeur : récolte et broyage des pailles 150 à 180 € par ha, ainsi que le transport 40 € par ha.

Exemples :

* Un maïs « normal » 80 quintaux :
150 € x 8 t de grain +130 € (pailles) – 170 € (récolte broyage) – 40 € (transport) = 1120 € par ha soit 80 € la tonne de MS ou 27 € la tonne de vert à 33 % de MS


* Un maïs ayant souffert de la sécheresse 40 quintaux :
150 € x 4 t de grain + 75 € (pailles 50 % ) – 150 € (récolte broyage) – 20 € (transport 50 %) = 505 € par ha soit 63 € la tonne de MS ou 21 € la tonne de vert à 33 % de MS

Pour des rendements inférieurs à 40 quintaux, la méthode n’est plus fiable. Il convient de peser les fourrages et de partir sur un prix à la tonne de MS ou tonne de vert.

La qualité du produit peut entrer dans la détermination du prix, un maïs riche en grain, au feuillage bien vert se négociera plus cher qu’un maïs pauvre en grain, avec une bonne partie du feuillage sec.

Ces éléments ne sont pas un barème officiel mais un guide de négociation qui permet aux deux parties de déterminer un prix juste. Les frais de récolte et transport sont bien sûr à la charge de l’acheteur



Quelques conseils



• Attention à l’acidose si vous augmentez les concentrés ou produits énergétiques : incorporez au maximum 40% de la MS sous forme de concentrés, apportez des fibres (1,5 à 2kg de MS), apportez du bicarbonate de sodium (200 à 250g), qui peut de plus compenser les pertes physiologiques dues à la chaleur.
• Privilégiez les produits qui ne déconcentrent pas trop la ration, pour ne pas pénaliser la production laitière, et maximisez l’ingestion.
• Faites attention à la teneur en protéines totales, qui ne doit pas excéder 16% pour limiter l’impact de la chaleur.
• La luzerne déshydratée peut être utilisée en grande quantité et permet de compenser partiellement un manque de fourrage. Cependant, la concentration énergétique de la ration peut en être diminuée.
• Essayez de préserver du maïs pour les débuts de lactation d’automne en évitant de repasser dès maintenant en ration 100% maïs.
• Anticipez les réformes pour limiter vos besoins.


Sources : Chapuis D. (CA 71), Lavedrine F. (Conseil Elevage 21), Lefèvre L. (CA 71), Michel T. (CA 71), Hérisset R. (CA 56)