Politique agricole
Bien mauvais départ pour Stéphane Travert au ministère de l'Agriculture

A quelques jours des Etats généraux de l’Alimentation, les tous premiers pas du nouveau ministre de l’Agriculture, Stéphane Travert, ne sont pas de bon augure pour notre profession, lui qui devra faire avec plusieurs "vigies écologistes" au Gouvernement comme à l’Assemblée nationale…

Bien mauvais départ pour Stéphane Travert au ministère de l'Agriculture

Mais qu’est donc qui a pris Stéphane Travert d’aller se fourrer dans une telle galère ? Dans le "manuel du nouveau ministre" s’il existait - et il serait souhaitable qu’il existe ! -, il devrait être écrit en bonne place : « Tu n’iras pas te confronter aux journalistes avant d’avoir pris la pleine mesure de tes dossiers et surtout pas à Jean-Jacques Bourdin avant le premier anniversaire révolu de ta nomination ». Stéphane Travert, lui, s’y est rendu seulement quatre jours après avoir été nommé, et ses conseillers en communication tout comme lui s’en mordent les doigts…

Les néonicotinoïdes, le sujet empoisonne l’actualité agricole depuis au moins quinze ans. Le dossier est à manier avec d’infinies précautions. Le monde agricole a des arguments lourds en sa faveur : Emmanuel Macron s’est engagé à revenir sur toutes les sur-transpositions franco-françaises par rapport aux réglementations de Bruxelles. Or, dans le cadre de la loi sur la biodiversité, en interdisant tous les néonicotinoïdes dès 2018, la France a sur-transposé. C’est un fait.

Et pan sur le bec !

Alors, expliquant sur RMC que « le texte n'est pas conforme au droit européen », Stéphane Travert a déclaré : « on peut le prendre comme ça, revenir sur l'interdiction ». Dans la foulée, Nicolas Hulot, ministre d’État de la Transition écologique et solidaire, réagissait sur Twitter : « les interdictions ne seront pas levées ». Et Matignon tranchait immédiatement dans le sens du ministre de la Transition écologique et solidaire. L’affaire était close. Pan sur le bec, dirait une certaine presse, à l’encontre de Stéphane Travert…

Au-delà du sujet des néonicotinoïdes - qui auraient mérités un vrai débat, notamment dans l’angle de la sur-transposition -, subir un recadrage à la fois de Nicolas Hulot et d’Edouard Philippe, Premier ministre, à la veille du lancement des États généraux de l’Alimentation et quatre jours à peine après avoir pris ses fonctions, c’était envoyer un très, un très très mauvais signal à l’agriculture.

D’autant que Nicolas Hulot est bien décidé, lui, à marcher sur les plates-bandes du ministre de l’Agriculture aussi souvent qu’il le pourra, notamment sur les questions sociétales, et l’Agriculture fait clairement partie des questions sociétales de son point de vue. Cela fait vingt ans que le ministre d’Etat cogite sur le sujet. Il a des idées sur beaucoup de sujets. Alors, à lire le projet de déroulement des États généraux de l’Alimentation, avec la multitude de sujets à traiter, la tenue d’innombrables ateliers, les doléances de toutes parts et de toutes les organisations ainsi que l’implication de rien moins que huit ministères, il faudra que Stéphane Travert tienne sacrément bien la barre pour conduire la barque à bon port…

Car nous risquons bien d’avoir des Etats généraux de l’Alimentation avec des résultats comme ceux que nous avons eu, il y a quelques années, le Grenelle de l’Environnement… L’enfer, on le sait, est pavé de bonnes intentions. Et les bonnes intentions, elles sont là, tout comme les ingrédients qui pourraient nous mener à une sacrée douche froide : Stéphane Travert, affaibli ; Nicolas Hulot, ministre d’Etat, n°2 du Gouvernement et chouchou des médias ; François de Rugy, autre écologiste, à la présidence de l’Assemblée nationale ; Barbara Pompili, une autre écologiste, à la présidente de la commission du Développement durable et de l’Aménagement du territoire (qui traite aussi de l’Agriculture) de l’Assemblée nationale… Autant d’indices qui poussent craindre le pire pour les mois à venir. Faut-il rappeler que les écologistes ont eu 4,3 % des votes lors du premier tour des dernières législatives… ? Non, ce serait jouer dans une mauvaise partition…