François Perrin à Milly-Lamartine
LimouZen attitude !

Sur les hauteurs du vignoble mâconnais, François Perrin a choisi de tracer sa route d’éleveur limousin sélectionneur. Ancien éleveur laitier associé d’un Gaec viticole, il est en train de vivre pleinement sa passion de l’élevage grâce à une race adaptée à ses aspirations.
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L’installation de François Perrin remonte à 1989 lorsqu’il a rejoint son frère Robert sur l’exploitation familiale de Milly-Lamartine dans le Mâconnais. Une structure alors composée d’un élevage laitier et de vignes. Si la viticulture a pris de l’importance au fil des ans notamment grâce à la coopérative vinicole, les deux frères ont toujours conservé leur atelier Lait qui atteignait une trentaine de prim’holstein en 2006. François - qui avait été contrôleur laitier avant de s’installer - avait donné une impulsion très technique au troupeau dont la moyenne de production par vache atteignait alors les 9.500 litres de lait par an. Mais les déboires de leur coopérative laitière, un quota « au taquet », la montée en puissance de l’activité viticole ont amené les associés à envisager une « réorganisation du travail ». Eleveurs dans l’âme, les frères Perrin choisissaient tout de même de demeurer naisseurs mais, soucieux de préserver le temps libéré par la cessation laitière, ils ont opté pour une race peu contraignante à leurs yeux, en l’occurrence la limousine.
C’est auprès de deux élevages sélectionneurs de Lorraine que François a dégoté des génisses prêtes inscrites au Herd-book limousin. Désireux « de joindre l’utile à l’agréable », l’éleveur mâconnais a privilégié des animaux de qualité et il s’est immédiatement lancé, avec passion, dans la sélection génétique.

Taureaux de monte naturelle


L’automne dernier, l’élevage a fait naître 37 veaux. Les vêlages interviennent en septembre-octobre. La reproduction est principalement assurée par trois taureaux de monte naturelle. La plupart des taureaux en service sont nés sur l’exploitation, indique l’éleveur qui précise que son cheptel est constitué de deux souches différentes, d’où la possibilité de garder ses propres taureaux sans risque de consanguinité pour le moment. L’un de ces taureaux fait plus particulièrement la fierté de François. Il s’agit de Jivago, un fils d’Azurri, taureau d’insémination et de l’une des meilleures vaches du cheptel, qualifiée "Reproducteur Reconnue Elite". Âgé de deux ans, Jivago a donné six premiers produits excellents. Un taureau très prometteur, confie l’éleveur.
En se convertissant du lait à la viande, François Perrin s’est véritablement pris de passion pour la sélection limousine. La plupart des produits sont vendus pour la reproduction. C’est le cas de toutes les génisses à l’exception de celles retenues pour le renouvellement. L’élevage vend également à la reproduction un tiers de ses mâles dont certains via la station raciale de Lanaud (87). Les deux autres tiers partent en broutards en juin à des cours plutôt avantageux, confie l’éleveur.

Mixité et facilité de vêlage


Dans son travail de sélection, François Perrin vise exclusivement la satisfaction du client. Cela signifie « produire des animaux qui correspondent à la demande ». En cela, l’éleveur se montre prudent vis-à-vis des concours. S’ils sont certes « importants pour la promotion de la race », reconnaît-il avant de faire remarquer que « les animaux de concours ne sont pas forcément de bons animaux d’élevage ». Et sur ce point, la race limousine n’échappe pas à la dérive des compétitions avec des animaux devenant trop grands, trop charpentés et pas forcément rentables…
Dans les taureaux en service dans son élevage, François apprécie la « mixité » avec « un très bon quartier arrière, de la largeur de dos, de la finesse d’os » ajoutés aux qualités laitières et à la docilité. Car en race limousine aussi, on veille à « remettre un peu de viande sur les animaux d’élevage », reconnaît l’éleveur. Il s’agit de « conserver le format, la finesse d’os, tout en étant intransigeant sur les qualités de vêlage ». Une facilité de vêlage qui est l’une des forces de la limousine et qui fait dire à François qu’un vêlage limousin est tout bonnement « spectaculaire à voir, avec un petit veau qui tête déjà cinq minutes seulement après sa naissance ! ». Un atout qu’il faut à tout prix préserver, défend-il.

Faire tomber les préjugés


L’éleveur veut aussi faire tomber les préjugés entretenus sur la limousine. On la dit volontiers sauvage : celui qui a baptisé son EARL du nom de "LimouZen" parle au contraire « d’une vache craintive parce que très maternelle, qui peut vous faire confiance si elle comprend que vous ne lui voulez pas de mal », assure-t-il. Et l’ancien éleveur laitier d’aller plus loin dans sa démonstration en invoquant la nécessité d’une « rigueur dans les méthodes de travail. Car l’animal, il faut qu’il comprenne la logique de l’éleveur », défend-il. Cette approche n’exclut bien évidemment pas de « réformer les sujets dangereux qui désorganisent tout un troupeau ». Mais mieux vaut avoir en tête que le comportement d’un troupeau reflète en général celui de son éleveur. « Tous les matins, je fais le tour du troupeau à la même heure : les animaux m’attendent », illustre François. Ce n’est qu’une question de rigueur : « prendre des décisions et s’y tenir ». Et cela n’est pas incompatible du tout avec une attitude "zen", défend l’éleveur qui, dans son travail, privilégie toujours l’analyse, la réflexion à la précipitation.

Pas de campagne sans élevage


Cette approche progressiste, François l’avait déjà dans son élevage laitier et elle a des répercussions jusqu’au pâturage tournant, dont il est un ardent défenseur. Plus que de technique, c’est d’une véritable philosophie de vie dont il est ici question. François est attaché à l’ouverture, à la modernité… Rêvant de groupes de réflexion mêlant techniciens et éleveurs et très à l’écoute des avis extérieurs, il déplore un certain archaïsme ambiant dans le métier qu’il trouve parfois pas assez « rock’n roll » !
Une aspiration à aller au bout de ses convictions qui l’a conduit à se délester complètement de l’activité viticole pour devenir éleveur à 100 % ! Un choix audacieux dans une région où la production spécialisée de Mâcon rouge et de Mâcon blanc lui aurait permis de poursuivre sa carrière sans bovins. Mais suite au départ à la retraite de Robert, François a préféré perpétuer seul l’élevage familial, tandis que sa nièce reprenait, elle, de son côté la partie viticole. D’ici deux ou trois ans, l’élevage atteindra une cinquantaine de mères limousines sur 65 hectares. « Une campagne sans élevage, ce n’est pas possible ! », argumente François Perrin qui avoue trouver l’élevage plus « fun » que la viticulture et qui rêve de transmettre un jour son exploitation limousine de Milly-Lamartine.



Race limousine en Saône-et-Loire
Cinq élevages investissent dans une nouvelle dynamique


Ladislas est le nom du jeune taureau limousin acheté par un groupe de cinq élevages bourguignons à la station raciale de Lanaud dans la Vienne en décembre dernier. Le groupe est composé d’un élevage de l’Yonne (Gaec du Colombier, Mickaël Motte à Fontenay-près-Chablis) et de quatre élevages de Saône-et-Loire : Gaec des Volans (Jérôme Perraud, Genouilly) ; Gaec Robin-Vannier (Solange, Paul et Philippe Vannier, Jean-Luc Robin, Chapaize) ; EARL de la Ferme Neuve (Lionel et Aloïs Blanchard, Burnand) ; EARL LimouZen (François Perrin, Milly-Lamartine).
Ladislas est un fils de Damona. Figurant parmi les meilleurs veaux de la première série de Lanaud, il est utilisable sur génisses. Assez mixte, il devrait apporter « qualités maternelles, un très bon quartier arrière, de la finesse dos, de la longueur de côte, un bon développement… ». Actuellement en pension au centre de production de semences de Fontaines, il rejoindra ensuite Chapaize pour peut-être un jour être présenté en concours. Au-delà de l’intérêt génétique de ce reproducteur dont des doses pourront être commercialisées, cet achat marque avant tout pour le groupe la naissance d’une dynamique collective. Les co-acquéreurs espèrent ainsi créer une nouvelle émulation qui puisse être « contagieuse »