Les territoires, moteurs du développement durable en Afrique

Les territoires, moteurs du développement durable en Afrique

« La régionalisation de l’économie », « la coproduction » et la « territorialisation » sont les trois tendances qui influeront l’Afrique de demain, selon Jean-Louis Guigou, président de l’IPEMED. Or, pour Philippe Serizier, ancien responsable de recherche territoriale à la Caisse des Dépôts, cela ne fait pas de doute : « Une situation de circuit court, c’est l’optimisation de la valeur d’un territoire ». L’intérêt de ce modèle économique est également de « relier les agriculteurs, les collectivités locales et finalement tous les autres acteurs du territoire », ajoute Valérie Morier-Genoud, responsable de la coopération internationale à la Chambre d’agriculture d’Isère et agroéconomiste, investie dans le partenariat agricole entre les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Rabat Salé Kenitra au Maroc. « L’idée des circuits courts c’est d’avoir une approche horizontale », poursuit-elle. L’objectif est donc de parvenir à décloisonner les secteurs. Or, cette manière de penser passe nécessairement par « la formation et l’enseignement agricole » ainsi que par « l’accompagnement institutionnel entre les chambres d’Agriculture », précise l’agroéconomiste. Si cette approche permet avant tout de « lutter contre l’exode rural », comme l’explique Valérie Morier-Genoud, elle est également à l’origine d’un marché à Rabat ou encore de l’accueil des urbains sur les exploitations.

Maraîchage au Sénégal et méthanisation au Mené 

« Comment générer de la valeur ajoutée sur les produits ? », est une autre problématique à laquelle Valérie Morier-Genoud tente de répondre. Ainsi, l’agroéconomiste également engagée aux côtés d’Afdi (agriculteurs français et développement international), œuvre actuellement au développement de « paramètres maraichers » au Sénégal dans l’objectif d’ « arriver à créer une industrie agro-alimentaire ». La démarche consiste à « rencontrer l’ensemble des acteurs », et notamment « deux unions paysannes » qui n’ont ni accès à l’électricité ni à l’éducation, afin d’« inscrire l’agriculture dans une chaîne de valeur », explique Mme Morier-Genoud. Autrement dit, il s’agit de « relier ces dynamiques territoriales avec un cadre », précise-t-elle. Cet enjeu se retrouve aussi en France : Philippe Serizier le démontre avec l’exemple du Mené en Bretagne qui a su se sortir d’ « une situation d’agriculture locale qui était très misérable » dans les années 60 en devenant les « premiers à initier les mouvements de coopératives » jusqu’à ce que soit réalisée « une unité de méthanisation » dans les années 2000, financée à la fois par la coopérative, un industriel, Leclerc et la Caisse des Dépôts. Prochaine étape : « Un territoire à énergie positive en 2025 ».

Les réseaux intelligents arrivent dans les campagnes 

« C’est une possibilité de faire un saut technologique », s’enthousiasme Marie-Line Bassette, directrice des affaires internationales à Enedis. Elle évoque en effet les « smart grids » ou « réseaux intelligents » qui, grâce aux technologies informatiques, optimisent l’efficacité de la production d’électricité, puis de sa distribution et de sa consommation. Ils se révèlent particulièrement efficaces dans les régions qui n’ont pas accès à l’électricité où « il faut apporter un moyen de développement au plus près » et où cette innovation permet de sauter l’étape « des réseaux très maillés » que l’on retrouve en France, précise Mme Bassette. Or, « l’électricité c’est bien un besoin indispensable au développement des territoires », affirme la directrice des affaires internationales d’Enedis. Elle illustre ses propos concrètement : « Lorsqu’on travaille avec une bougie c’est un peu dur d’accéder à l’éducation ». L’électricité permet d’autre part de freiner l’exode rural puisque « lorsqu’on installe un système quelque part la demande revient, la demande augmente ». Au Congo, « on a permis de réduire les black-out de 50 à 10 par an », se réjouit Mme Bassette.