Bassins Rhône-Méditerranée-Corse
Au « milieu du gué »

Publié par Cédric Michelin
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La bataille de l'assainissement est gagnée... Reste à poursuivre celle des pesticides qui sont, avec le mauvais état physique des cours d'eau, la principale cause de la mauvaise qualité des eaux des bassins Rhône-Méditerranée-Corse en général et de celles d'une partie de la Bourgogne en particulier.
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C'est le vieux dilemme entre verre à moitié pleine et verre à moitié vide. Mais les faits sont là, sur tout le Bassin Rhône Méditerranée Corse, on trouve 52% d'eaux en bon état et 48% de dégradées. Et même si l'état des eaux dégradées tend à s'améliorer, la principale cause de déclassement des cours d'eau, juste devant la déformation du lit des rivières et loin devant les autres causes de pollutions diverses, reste les pesticides. C'est un constat dressé à partir « d'un véritable travail de détective » (15 millions d'analyses de surveillances des cours d'eau, nappes et plan d'eau), dont les résultats ont été exposés par Yannick Prebay, directeur des données de l'agence RMC de Lyon et Laurent Tessier, directeur de la délégation régionale de Besançon. Entre deux bilans (2009 et 2013) l'état écologique des masses d'eau est resté globalement stable. Donc, pas de quoi pavoiser outre mesure...


Des améliorations et des points noirs récurrents



C'est au nord du bassin RMC, dans sa partie Bourgogne notamment (bassin versant de la Saône), que l'on trouve le plus haut niveau de dégradation des eaux avec seulement 23% de cours d'eau en bon état. Les pesticides (agricoles et non agricoles) sont clairement pointés du doigt comme le principal facteur de dégradation. L'agence RMC ne relève « aucune tendance positive », avec 150 molécules différentes identifiées (« sans compter les métaboliques ») et « aucune baisse observée ni en quantité, ni en concentration ». 20% des 255 nappes souterraines évaluées, polluées par les pesticides au-delà de la norme de potabilité, se trouvent dans le nord du bassin. Et les trois quarts des rivières présentent de fortes concentrations en herbicides de type glyphosate.
Signe encourageant cependant, depuis 2009 certains points noirs voient leur situation s'améliorer, mais pas au point d'atteindre le bon état... Et quelques points noirs locaux résistent aux efforts, notamment dans la Guyotte (71), la Denante (71) et le Meuzin (21). 36 pesticides interdits ont été retrouvés dans les rivières, comme la tyrasine, avec des pics (à faible concentration toutefois) qui vont au-delà des simples « relargages historiques ». Les stations où sont quantifiées ces substances dans plus de 50% des prélèvements, sont situées dans les zones viticoles (Beaujolais et Mâconnais).
Le second facteur de dégradation des eaux concerne la déformation des rivières. 50% des rivières ont vu leur morphologie transformée et se voient « abîmées » par des décennies d'endiguement, de bétonnage, de modification de leur tracé. Au final, les déformations et altérations du courant aggravent les inondations, affaiblissent les nappes souterraines et concourent à la fragilisation des ouvrages d'art en empêchant la libre circulation des sédiments, comme des poissons.


Redonner des espaces de liberté aux rivières



Face à ce constat et pour en pallier les effets négatifs, l'agence RMC envisage « de redonner des espaces de liberté aux rivières, en définissant en concertation avec les usagers, quelques tronçons d'intervention prioritaire ». Car recréer des espaces de liberté aquatique, c'est faire oeuvre de prévention : « une rivière qui fonctionne bien est capable de traiter sa pollution », la potabilité de l'eau n'en est que mieux assurée, sans traitements coûteux.
Car l'argument économique doit être bien présent au débat. La mauvaise qualité de l'eau a un coût pour la collectivité. Un coût pour le bassin RMC estimé à 500 millions d'euros, dépensés pour dépolluer l'eau et la rendre potable. Toutes les mesures de prévention sont donc bonnes à prendre. Sur ce plan l'Agence RMC constate le bon partenariat initié avec les agriculteurs pour la réalisation d'aires de lavage. « La bataille des pesticides » est en cours, mais la bataille de l'assainissement contre les pollutions organiques est déjà gagnée. La priorité donnée aux mises aux normes des stations d'épuration a porté ses fruits, l'exemple le plus frappant restant celui de l'Ouche où la situation s'est complètement inversée.
Pour enfoncer le clou et susciter des vocations, l'Agence de l'eau RMC, en partenariat avec les départements, lance en octobre un label « Rivière en bon état », pour valoriser les actions de reconquête de la qualité de l'eau des rivières.



Un label « Rivière en bon état »



Ce label écologique est accordé dans le cadre d'une démarche volontaire de la ou des collectivités, sur la base des résultats de trois années de collecte de données. Il est accordé à une rivière ou un tronçon de rivière qui présente un bon ou très bon état écologique, au sens de la directive Nitrates sur l'eau. Attribué pour trois ans, le label est matérialisé par un panneau.