Grand Autunois Morvan
Naissance d’un "système alimentaire local"

Depuis l’automne dernier, le Grand Autunois Morvan a fait de l’approvisionnement local un principe pour ses cantines scolaires. Un choix politique audacieux qui s’inscrit dans une volonté globale de favoriser le développement économique de ce territoire rural.
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Attachée au développement économique de son territoire, la communauté de communes du Grand Autunois Morvan (CCGAM) est en train de développer « un système alimentaire local » consistant à mettre en relation l’offre et la demande alimentaire à l’échelle de son territoire. Cette initiative vise clairement la « valorisation des productions agricoles locales » tout en encourageant « une consommation locale de saison et de qualité » dans la restauration hors foyers, notamment collective. Cette volonté partagée par les élus de la communauté de communes découle de la même ambition que celle qui anime la communauté vis-à-vis de l’abattoir d’Autun. Un outil d’abattage et de découpe qui est d’ailleurs l’un des atouts de filière dont dispose l’Autunois Morvan pour développer ce système alimentaire local. Le territoire compte aussi un abattoir de volailles avec atelier de transformation, la Ferme de Rivault à Autun, ainsi qu’un site de production de plants bio avec laverie de légumes, Les Jardin bio des 4 saisons. Sans oublier les producteurs locaux qui outre de nombreux éleveurs, comptent aussi des maraîchers, des apiculteurs, des fromagers, des arboriculteurs, des viticulteurs…, énumère Amandine Ribot, chargée de mission à la CCGAM.

Un potentiel de 150.000 repas par an


C’est dans les cantines et au sein de la restauration collective en général que la communauté de communes promeut cet approvisionnement local. La collectivité gère elle-même la cuisine centrale d’Autun, laquelle élabore plus de 150.000 repas par an à destination des écoles publiques d’Autun et d’une dizaine de communes rurales environnantes. Cette cuisine centrale élabore également des repas pour une maison de retraite, des centres de loisirs ainsi que des menus servis à domicile pour personnes âgées. S’il prépare près de 800 repas par jour, ce restaurant collectif, propriété de la collectivité, élabore malgré tout une cuisine que les élus qualifient de « maison » à base de produits frais. Ailleurs, la restauration collective est souvent sous-traitée à des sociétés privées dont certaines font montre d’une logique industrielle et financière implacables.

Sensibilisation…


La mise en place de ce système alimentaire local a débuté en 2014 avec en premier lieu des actions de communication, sensibilisation et d’expérimentation. La communauté de communes a notamment profité de la semaine du développement durable au printemps dernier pour proposer des repas à base de produits locaux dans les cantines d’Autun, Antully, Chissey-en-Morvan, La Grande-Verrière, Lucenay-L’Evêque, Monthelon et Saint-Forgeot. Des goûters de produits locaux et autres repas ont été servis dans des accueils de loisir ainsi qu’à l’occasion de la semaine du goût. A ces coups d’essais se sont ajoutées des animations en lien avec l’agriculture. Ce fut le cas avec la journée portes ouvertes et marché gourmand à l’abattoir d’Autun en juin dernier ainsi qu’à la Foire économique en septembre où la CCGAM organisait une conférence sur l’agriculture et prenait part à l’organisation d’un chapiteau de producteurs aux côtés de la chambre d’agriculture, de la FDSEA de Saône-et-Loire et du Parc du Morvan.

Concrétisation


Depuis novembre dernier, les produits locaux figurent désormais régulièrement au menu des cantines desservies par la cuisine centrale de l’Autunois Morvan. Hachis parmentier, carottes râpées, potage, bœuf braisé, endives, yaourts, purée, poireaux vinaigrette, betteraves rouges, petits légumes sont quelques exemples de plats élaborés à partir de produis locaux, bio ou AOC, et proposés aux écoliers du territoire.
Et si la communauté de communes incorpore de bonne grâce ces produits dans les menus, elle tient aussi à le faire savoir aux familles. De fait, les produits locaux sont clairement identifiés dans le menu mensuel qui est affiché dans les cantines et les écoles concernées. Ce menu est par ailleurs distribué à tous les enfants des cantines desservies par la cuisine centrale et il est disponible sur le site internet de l’intercommunalité www.grandautunoismorvan.fr. rubrique « restauration scolaire ».

Produits clairement identifiés


Sur ce menu, chaque plat faisant appel à un produit local est identifié par un logo bien visible. Ces logos sont au nombre de cinq. L’un d’eux désigne les aliments produits dans une commune du Grand Autunois Morvan. Un autre identifie les produits locaux originaires du Morvan, de Saône-et-Loire ou de Bourgogne. Le logo AOC bœuf de Charolles signale les plats qui sont élaborés à base de cette viande bovine de qualité. Bien entendu, les viandes provenant de l’abattoir d’Autun sont également clairement identifiées avec le logo de l’outil autunois. Enfin, les produits bio sont signalés par leur logo caractéristique.
Sur ces menus est également affichée la liste des fournisseurs du restaurant solaire. En janvier par exemple, figuraient « La ferme des Z’Amis de Laizy, Jardin Bio des 4 Saisons d’Autun, Charollais Viande de Paray-le-Monial (Bœuf de Charolles), l’abattoir d’Autun et la coopérative laitière de Bourgogne (yaourts) ». D’autres producteurs figurent également au rang des fournisseurs locaux de la cuisine centrale : MV Bio de Saint-Emiland, Par Nature de Curgy. Et les élus incitent d’autres producteurs à les rejoindre.
L’initiative a été très bien accueillie par les familles, comme le confirme l’enquête réalisée en avril dernier (lire encadré). Et si elle a pu effrayer un instant certains économes, cet approvisionnement local remotive finalement les équipes en cuisine, toutes heureuses de travailler des produits de terroir et de qualité.

Volonté politique


Bien entendu, ce volontarisme des élus du Grand Autunois Morvan a un coût. Le président de la communauté de communes, Rémy Rebeyrotte, ne le cache pas. « Nous essayons de partager équitablement ce coût supplémentaire : un peu sur le consommateur et un peu sur nos propres budgets. Mais cela représente une augmentation, somme toute, très à la marge : seulement quelques centimes de plus par repas. Un choix politique qui en vaut la peine », argumente le président : « derrière il y a une filière qui ne demande qu’à se développer. C’est aussi une garantie de qualité et une certaine éducation au goût… ». Rémy Rebeyrotte y voit par ailleurs « une première concrétisation forte du travail engagé entre élus agricoles et élus locaux sur le territoire ». Un travail au sein duquel l’avenir de l’abattoir de proximité tient une place centrale, de même que l’émergence de filières courtes.
Désormais, la montée en puissance passera par « l’assurance d’avoir des approvisionnements suffisamment réguliers », tempère toutefois l’élu. Pour passer à un échelon supérieur, un travail d’organisation de l’offre et de la demande est nécessaire, estime en conclusion Rémy Rebeyrotte.



Des parents d’élèves prêts à payer quelques centimes de plus…


A l’occasion de la semaine du développement durable en avril dernier, 270 enfants des écoles d’Autun, Antully, Chissey, Monthelon, La Grande Verrière, Saint-Forgeot et Sully bénéficiaient en avant-première d’un repas à base de produits locaux. A la suite quoi, les parents d’élèves ont été invités à remplir un questionnaire de satisfaction. La quasi-totalité des sondés (271 familles) se sont dites très favorables à ce genre d’initiative. Tous sans exception disent accorder une importance à la qualité des repas servis à la cantine. 95 % seraient sensibles à l’origine des produits servis et 85 % pensent que les cantines devraient servir plus souvent des repas de produits locaux. Pour expliquer ce point de vue, les familles évoquent leur aspiration à « connaître la provenance des produits » ; leur connaissance des productions locales et du métier d’agriculteur ; leur envie de « faire travailler nos producteurs », de « préserver les petits commerces qui disparaissent », de favoriser la création d’emplois… Ils y voient en outre l’accès à des produits « meilleurs » en goût, moins néfastes pour l’environnement et plus sains.





Locale avant tout


Cette enquête met aussi en évidence que les familles attachent davantage d’importance au caractère local qu’à la notion d’agriculture biologique. Ils ne sont en effet que 33 % à estimer que le restaurant scolaire devrait servir plus souvent des produits bio à leurs enfants. Autre révélation de cette enquête : 66 % des sondés seraient prêts à payer quelques centimes plus cher pour un repas de produits locaux. Mais pour la moitié d’entre eux, cette augmentation ne doit toutefois pas dépasser 20 centimes d’euro par repas. Enfin, près de 90 % des parents sondés jugent important que leurs enfants soient ainsi sensibilisés aux productions alimentaires locales.