Elevage laitier
Les génisses cibles de toutes les attentions

Le 12 mars, la coopérative Elva Novia et ses partenaires BoviCoop, Saône-et-Loire Conseil élevage et le GDS 71 proposaient une journée consacrée aux génisses laitières à Saint-Germain-du-Bois. Cette réunion inaugurait une série d’animations techniques d’un genre nouveau baptisée "Inov’IA Lait".
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La première édition de ces "Inov’IA Lait" avait pour thème "Objectif génisses". Depuis plusieurs années maintenant, on rappelle aux éleveurs que les génisses sont l’avenir du troupeau et qu’elles ne doivent plus être le parent pauvre dans un élevage. « On a trop dit que l’élevage des génisses coûtait cher. Or ce qui coûte cher, c’est de ne pas avoir assez de génisses pour produire du lait. Et nous avons aujourd’hui la possibilité de commercialiser des génisses supplémentaires », introduisait Robert Chaumont, président d’Elva Novia.
Faire naître et élever ses génisses est en effet déterminant sur la future capacité de production d’un élevage. Une problématique d’autant plus pertinente que l’on vient d’abolir les quotas et que des perspectives de production pourraient s’offrir aux éleveurs.
La problématique génisses se pose dès la finalisation des accouplements à la lumière des bilans génétiques du troupeau. Pour s’aider dans cette démarche compliquée, les éleveurs ont à leur disposition des logiciels de plan d’accouplement tel "PAM" qui permettent de gérer la quantité d’informations qu’induit un cheptel laitier et les risques de consanguinité face à une offre de taureaux désormais pléthorique.

A l’ère du génotypage


Les technologies nouvelles de sexage et de génotypage sont de précieux outils. Le génotypage qui permet, par simple analyse d’ADN, d’aller lire le potentiel génétique d’un animal directement dans ses gènes, rend possible des accouplements plus fins et ciblés, expliquait Pascal Quignard d’Elva Novia. Il permet ainsi de développer les meilleures souches, mais aussi de sélectionner les génisses à vendre ou encore de valoriser les femelles les moins intéressantes en leur faisant donner des veaux croisés, poursuivait le technicien.
Offrant une évaluation plus précise et plus précoce sur tous les caractères, le génotypage permet d’optimiser la production des vaches adultes. Mieux sélectionnées, ces vaches vont vieillir mieux ce qui permettra d’amortir le coût d’élevage sur des lactations plus longues et s’accompagnera de fait d’un taux de réforme moins important d’où des frais en moins, argumentait Pascal Quignard.

Choisir le sexe des veaux


Choisir le sexe de ses veaux est un autre moyen de mieux sélectionner ses souches pour le renouvellement, voire de sauver les meilleures d’entre-elles en étant sûr de faire naitre des filles. Utilisable désormais en routine, la semence sexée garantit la production de génisses, qu’elles soient destinées à la vente, au renouvellement ou à l’extension du troupeau. Le choix du sexe rend également possible une valorisation en viande. Sans oublier que de faire naitre davantage de femelles fait diminuer le nombre de vêlages difficiles, complétait Pascal Quignard.
L’usage des semences sexées nécessite cependant de respecter quelques recommandations. Les cheptels doivent présenter une bonne fertilité. Mieux vaut réserver les semences sexées à des animaux jeunes : « des femelles en bonne santé, de poids et de développement suffisant, déparasitées et hors de toute phase de transition ». Le technicien d’Elva Novia recommande en outre « d’intervenir sur des chaleurs bien déclarées tout en suivant rigoureusement la procédure d’IA ». Des précautions indispensables pour des semences qui coûtent 20 € de plus que des doses non sexées.

De la naissance au sevrage


La première étape de l’élevage des génisses est la période allant de la naissance au sevrage.
Pour Anne Blondel, trois points sont importants.
Premièrement, la consommation d’aliment lacté doit être précise et maîtrisée. Le colostrum doit être donné en quantité (10 % du poids du veau) et en qualité ainsi qu’au bon moment. Très important pour le démarrage du petit veau, le colostrum « nourrit, réchauffe, active le tube digestif et fournit des anticorps », expliquait Ludivine Perrachon du GDS 71. La qualité du colostrum se prépare dès avant le vêlage avec un test au réfractomètre qui évalue sa teneur en anticorps. Ce colostrum peut se conserver au frais ou se congeler.
La consommation de lait doit également respecter les bonnes quantités : « ni trop ni pas assez », indiquait Anne Blondel qui donnait le chiffre d’un kilo de matière sèche de poudre de lait par jour. « Lait reconstitué ou lait entier, peu importe. Attention toutefois à la composition des poudres. Des matières premières lactées permettent plus facilement de meilleurs résultats d'élevage », avançait la technicienne pour qui « ce lait doit être à bonne température et sain ».
Le deuxième point important est le logement des petits veaux. Les niches individuelles extérieures s’avèrent les plus adéquates pour prévenir les risques respiratoires et les pathogènes. Concernant la santé des veaux, le plan de prévention prévoit « les vaccinations diarrhées et pathologies respiratoires ; le déparasitage des mères au tarissement et, très important, un apport d’oligo-éléments », recommandait Ludivine Perrachon. La santé des veaux s’anticipe dès la fin de lactation des mères avec une bonne gestion des taries. Le « management au vêlage » (hygiène, soins…) est également en cause dans la santé du veau.

Quand sevrer ?


Troisième point clé : le sevrage. A ce stade, « le veau doit être capable d’ingérer 2 kg de concentrés par jour », indiquait Anne Blondel pour qui c’est cette aptitude qui détermine le moment de sevrer. « De sorte que les veaux soient capables de consommer suffisamment pour développer leur rumen. Du foin devra alors leur être ramené tous les jours ainsi que des concentrés », indiquait la technicienne. Conduits en lots homogènes dans des bâtiments sains et bien éclairés, les veaux doivent atteindre un tour de poitrine de 130 cm à six mois pour un poids de 200 kg. Au-delà de six mois, les éleveurs ont surtout à ajuster l’alimentation de sorte à éviter tout excès de gras au moment de la puberté.


Vêlage à deux ans
Pourquoi s’en priver ?


En France, l’âge moyen du premier vêlage des laitières dépasse 32 mois. Avancer les vêlages à deux ans ne manque pourtant pas d’arguments. Une génisse donnant naissance à son premier veau avant trente mois ferait économiser 500 € de frais d’élevage par rapport à une génisse mettant bas au-delà de trente mois. Cette économie résulte d’un gain de temps de travail, d’aliments et de place en bâtiment, détaillait Anne Blondel d’Ain Conseil Elevage. D’autre part, les génisses ayant vêlé précocement vieillissent mieux que leurs congénères et donnent un peu plus de lait (+1,28 kg de lait en plus par jour à nombre de lactations égal). Sur le terrain, nombreuses seraient les génisses qui auraient les aptitudes à vêler dès deux ans, constatent les techniciens.




Marché des génisses laitières
La demande est là !


Spécialiste de la vente de femelles, notamment export, la coopérative de l’Ain BoviCoop exporte 1.500 laitières à l’étranger et vend 900 animaux sur le marché intérieur. Le marché export est demandeur de génisses gestantes de 3 à 7 mois pour les destinations Maroc, Algérie, Mongolie, Roumanie, Russie, Pologne… Un cahier des charges impose que les candidates soient inscrites à l’état civil, dotées de lactations connues, issues de cheptel indemne d’IBR, âgées de 24 à 36 mois, inséminées en race pure de préférence, de poids supérieur à 520 kg. Des contrats sont possibles dans le cadre de Copex Montbéliarde et de Gessica. Ce dernier est proposé par les organisations d’élevage de l’Ain et de la Saône-et-Loire : Elva Novia, Conseil élevage, BoviCoop, Feder. « C’est un appui technique dynamique pour aider à mieux élever les génisses et les commercialiser », expliquait Gilles Mervant d’Elva Novia. Une quinzaine d’élevages de Bresse l’ont signé depuis 2014. Ce contrat prévoit une ristourne sur les semences sexées utilisées ; 25 % sur le coût du service suivi élevage des génisses ; 40 € par génisse génotypée commercialisée. Les génisses doivent être inséminées à 2 ans et atteindre 520 kg.




Mise à la reproduction des génisses




Recommandations et outils d’aide


La réussite de la mise à la reproduction des génisses repose sur une prévention sanitaire maîtrisée, une alimentation équilibrée, un état corporel optimum (ni trop maigres ni trop grasses), une bonne préparation à l’IA (pas d’écornage la veille, pas de changement de régime alimentaire ou de pré…), une ambiance en bâtiment adéquate (espace, lumière…). La détection des chaleurs est une des clés d’une bonne fécondité. « L’idéal est d’effectuer trois observations de vingt minutes par jour », rappelait Amélie Desprez, responsable Repro à Elva Novia. Des outils d’aide à la détection existent : taureaux vasectomisés, outils monitoring, détecteurs de chevauchements… Egalement proposée par la coopérative, la technique de synchronisation des chaleurs par traitements hormonaux permet de se libérer du souci de la détection des chaleurs en contrôlant le moment de l’ovulation des femelles. Enfin, le constat de gestation (dosages hormonaux, échographies et palper rectal) est un outil complémentaire pour bien gérer la reproduction.