Inondations et excès de pluviométrie
2 milliards d'€ de perte au bas mot

Les dégâts causés par les intempéries sur les terres agricoles sont énormes et se chiffrent au bas mot à plus de deux milliards d’€, selon la FNSEA lors d’un déplacement dans l’Aube, ce 25 juillet. Retour.
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La situation est catastrophique. En France, un nombre important d’exploitations, impactées par les épisodes d’inondations comme par les excès de pluviométrie et le manque d'ensoleillement, affichent un état des cultures très fortement dégradé. Blé, maïs, tournesol, mais aussi colza, chanvre et autres espèces ont été directement touchées par l’eau stagnante. Après le gel au printemps et la grêle, la nature semble s’acharner sur le monde agricole.
Venu rencontrer ce 25 juillet un couple d’exploitants au bord du gouffre dans le département de l’Aube, le président de la FNSEA, Xavier Beulin, en appelle au rassemblement de toutes les parties prenantes. « Il faut montrer de la collégialité autour de ces sujets » a-t-il insisté. Un traitement exceptionnel de l’assurance doit, selon lui, être mis sur pied sans tarder.
En outre, Xavier Beulin a réitéré, lors du dernier Conseil supérieur d’orientation (CSO) tenu le 21 juillet (lire les annonces de Stéphane Le Folle en page 8 de cette même édition), sa demande d’exonération de la TFNB (taxe foncière sur non bâti) pour tous les professionnels concernés.

Des conséquences encore difficile à évaluer


Les inondations, les excès de pluviométrie et le manque d'ensoleillement ont causé des ravages aux conséquences nombreuses, variées et encore difficiles à évaluer à ce stade.
Le président de la FNSEA avance néanmoins une estimation chiffrée à plus de deux milliards d’€ de perte pour l’Agriculture française, en considérant uniquement la partie Grains...
Les dommages dans les secteurs des légumes, des fruits et en horticulture viendront alourdir l’addition tout comme les pertes sur les fourrages ou encore celles sur l'apiculture...
« Il faut repenser de fond en comble le financement global de l’agriculture pour traiter cette campagne et les prochaines », analyse le président de la FNSEA, en présence de Joël Limouzin, vice-président en charge du dossier Gestion des risques et président du FMSE, qui était présent à la dernière assemblée générale de la FDSEA de Saône-et-Loire le 24 mai dernier à Sanvignes-les-Mines.
Tant en quantité qu’en qualité, les experts tablent sur des moissons 2016 désastreuses. Dans les champs, on parle de récolte en blé oscillant entre 7 et 60 quintaux de l’hectare (au lieu des 74 quintaux en moyenne en 2015 pour le blé tendre), indiquait Pierre Goujard, président des Jeunes agriculteurs (JA) de l’Aube. Quant au président du directoire du Groupe Soufflet, Jean-Michel Soufflet, ce dernier prédisait des récoltes globales divisées par deux, voire par trois. « En blé, l’année dernière nous étions à 42 millions de tonnes (Mt), cette année, on estime une récolte entre 29 et 32 Mt » précise l’industriel. A cela s’ajoute des problèmes de qualité... Ce que Dijon Céréales a clairement reconnu dans un communiqué de presse la semaine dernière.


Zone d’expansion des crues : qui est responsable ?


Lorsque l’on traite du sujet des inondations, très vite, le système assurantiel est questionné.
Les "Zones d’expansion des crues" sont des zones agricoles et rurales volontairement inondées sous l’action de l’Homme dans le but de préserver les zones habitables, notamment celles des plus grandes villes...
Si le monde agricole dit comprendre parfaitement qu’il est préférable d’inonder des terres que des villes, il pose néanmoins la question de la responsabilité et des indemnisations en conséquence. « Ce n’est pas à l’agriculteur, seul, de financer ce qui est un service rendu à la société », s'agaçait Joël Limouzin. Selon lui, il faudra faire attention à ne pas faire passer en perte de fonds - lesquelles sont incluses dans le fonds des calamités agricoles - ces fameuses "Zones d’expansions des crues". Le fonds de solidarité national devrait, d’après le représentant de la FNSEA, prendre en charge les indemnités à octroyer aux agriculteurs concernés.
Pour l’heure, sur toute la France, une centaine de dossiers de pertes de fonds a été transmise, soulignait Julien Turenne, le représentant du ministre de l'Agriculture présent sur place. D’autres dossiers devraient néanmoins être envoyés dans les prochaines semaines. Le 26 juillet s’est tenu un comité national de gestion des risques en agriculture (CNGRA) exceptionnel pour examiner ces premiers cas. Concernant les pertes de récolte, les experts attendent la fin de la moisson. Les premiers dossiers seront étudiés à partir du mois d’octobre.



En plein désarroi


A Nogent-sur-Seine dans l’Aube, Jackie et Régine Chiret, un couple d’agriculteurs et éleveurs de bovins viande, sont dépités. En l’espace de quatre ans, leurs terres ont subi deux crues : en 2013 et 2016. En 2013 déjà, près de 80 % des surfaces de l'exploitation avaient alors été inondées. Résultat : plus rien à donner aux bêtes. Commence alors un engrenage néfaste. Pour compenser le manque, le couple est contraint d’acheter de l'aliment, réduisant ainsi la trésorerie. Leurs besoins financiers étaient tels qu’ils ont été forcés de décapitaliser une partie de leur troupeau. Conséquence directe, leur résultat d’exploitation a augmenté, les obligeant à payer encore plus d’impôts ! L’année 2016 est encore marquée par une nouvelle crue, impactant plus fortement encore l'exploitation déjà bien fragilisée. Jackie Chiret l’assure, « encore une année comme ça, et on disparaît ».






Vers une assurance obligatoire ?


Au sein même de la « maison FNSEA », les avis s’opposent sur la question. Faudra-t-il oui ou non obliger les producteurs à souscrire à une assurance ? Au vu du contexte actuel, ce sujet délicat refait surface. Entre 25 et 30% des céréaliers sont assurés. Des pays comme l’Espagne ou l’Italie seraient partisan d’une telle démarche mais les pays du Nord, fervents défenseur de la liberté d’entreprise, s’y opposeraient. « Le débat est posé », déclare Joël Limouzin. Selon lui, si le nombre d’agriculteurs assurés augmentent, les cotisations seront plus faibles. « Cela donnerait aussi une véritable légitimité au soutien de l’agriculture par les politiques et la société civile », développe le vice-président de la FNSEA.