Crise grandes cultures
Une situation « très difficile »

Publié par Cédric Michelin
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FranceAgriMer a pointé le 13 juillet la « situation très difficile des Scopeurs » (producteurs de céréales et oléoprotéagineux), confrontés à « de petits rendements et de petits prix ». L’établissement public a relayé des échos de trésorerie dans les fermes qui sont « à la limite de la catastrophe ».
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« Pour les céréaliers, l’année s’annonce très difficile », a déclaré le président du conseil spécialisé pour la filière Rémi Haquin, avec en orge d’hiver des résultats « pas bons » et pour le blé tendre « une grande inquiétude » en termes de volume. « La situation des Scopeurs se dégrade depuis 2013 », a-t-il noté, se faisant l’écho de « trésoreries en ferme limite catastrophiques » au point de susciter de « grosses interrogations » sur « comment remettre en route la prochaine campagne ». « Il va y avoir des cas douloureux », a appuyé Rémi Haquin, en attente d’une réaction du gouvernement qui serait d’accorder aux Scopeurs une année blanche comme celle dont bénéficient les éleveurs les plus en difficulté.

D’après lui, « on ne fera pas 37 millions de tonnes » de blé tendre en France comme annoncé la veille par Agreste, dont les prévisions remontent à mi-juin quand le potentiel était encore bon. Ces chiffres « basés sur des calculs au 15 juin, sont probablement déjà dépassés par l’évolution du climat » au cours de l’été, a-t-il dit.

Un rendement moyen à médiocre et très contrasté



Arvalis a indiqué pour sa part « une probabilité de rendement moyen à médiocre et très contrasté » pour les céréales à paille. Son directeur R & D Jean-Paul Bordes a misé sur « un rendement moyen national inférieur à la moyenne des cinq dernières années, avec de fortes variations entre régions et entre parcelles » d’une même zone. Son premier bilan de la moisson, teinté d’une certaine prudence, montre un risque au niveau de la fertilité de l’épi, moins pour le nombre de grains « plutôt moyen » que pour le PMG (poids de mille grains), cause d’un faible PS (poids spécifique). La récolte 2016 bénéficie de facteurs positifs, à savoir un potentiel très élevé jusque fin mai, une alimentation hydrique favorable en petites terres, une absorption de l’azote plutôt bonne, peu d’excès de température lors du remplissage. Viennent en contrepoids « pas mal d’accidents », d’après Jean-Paul Bordes : en premier lieu, l’excès d’eau en terres peu drainantes, mais aussi un très faible ensoleillement sur une longue période, une forte pression des parasites et maladies (rouille jaune, jaunisse nanisante de l’orge, fusariose…).

L’orge d’hiver est la culture la plus pénalisée, d’après Arvalis. Son rendement est annoncé « modeste », inférieur à la moyenne quinquennale. Le PS et le calibrage ressortent à des niveaux « faibles à très faibles » et la teneur en protéines « moyenne à élevée » par contre. Un scénario identique se dessine pour l’orge de printemps, d’après l’institut technique, qui juge le PMG « assez faible ».





Les exploitations céréalières face à des besoins de trésorerie de 400 euros/ha (Agritel)



Agritel a estimé le 11 juillet que les besoins de trésorerie des exploitations céréalières vont « exploser » avec une récolte décevante, les premières coupes d’orge d’hiver montrant « des rendements et critères qualitatifs inférieurs aux attentes », le blé tendre affichant un « faible potentiel ». « Les exploitations céréalières françaises vont être confrontées à des besoins de trésorerie probablement supérieurs à 400 euros/ha », déclare le DG Michel Portier, dans un communiqué. Un chiffrage basé sur du blé à 7 t/ha, payé 130 euros/t, pour des charges à couvrir de 1 100 euros/ha (aides compensatoires incluses), plus 220 euros/ha de rémunération de l’exploitant et charges de remboursement.


La récolte de blé tendre attendue en baisse de 10 % à 37 Mt (Agreste)



Agreste a estimé le 12 juillet la récolte de blé tendre à 37 Mt (-10 %), révisant par ailleurs à la baisse ses prévisions pour l’orge et le colza. « Selon les estimations au 1er juillet 2016, la production de blé tendre, à 37 Mt, diminuerait de 10 % sur un an, indique une note. Après une récolte record en 2015, elle retrouverait un niveau proche de la moyenne quinquennale, la hausse des surfaces (+1,4 %) ne compensant pas la forte baisse des rendements (-11 % sur un an) », à 70,7 q/ha. La production de blé dur se maintiendrait à 1,8 Mt, la hausse des surfaces compensant la baisse des rendements à 50,7 q/ha (-10 %). En orge, la récolte diminuerait de 10 % à 11,7 Mt, conséquence d’une chute des rendements en orge d’hiver à 65 q/ha (contre 68,8 q/ha estimé en juin) et en orge de printemps à 58 q/ha. La production de colza atteindrait 4,8 Mt, en baisse de 9 % sur un an avec 31,9 q/ha (contre 33,9 q/ha estimé en juin). Les surfaces de tournesol reculeraient de 5 % et celles de maïs-grain de 4,8 %. A l'inverse, elles progresseraient en betteraves industrielles (+3,4 %), en pommes de terre de conservation et demi-saison (+3,8 %) et en soja (+16 %).