Crise de l’élevage
Et une nouvelle table ronde !

La crise de l’élevage se poursuit. Cette semaine, les éleveurs de porcs étaient, bien malgré eux, sous les feux de l’actualité… Ainsi, une nouvelle table ronde était-elle organisée en ce début de semaine. Pour sa part, le ministre s’est enfin engagé à soumettre le dossier des distorsions de concurrence fiscales et sociales au sein des filières Viandes lors du Conseil des ministres exceptionnel du 7 septembre…
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« Nous avons des pistes pour des solutions pérennes », ont déclaré Paul Auffray, président de la Fédération nationale porcine (FNP), et Guillaume Roué, président de l’interprofession porcine (Inaporc), à l’issue de la réunion marathon de 2 heures et 15 mn avec le ministre de l’Agriculture, le 17 août. De son côté, Stéphane Le Foll évoquait « un état d’esprit positif » et « la volonté collective de trouver des solutions ».

Les distorsions enfin reconnues


A l’issue, la reprise du marché au cadran qui avait été suspendu pendant une semaine, et ce malgré l’absence de Bigard et de Cooperl, mais surtout la reconnaissance par le ministre des distorsions fiscales et sociales qui frappent nos filières viandes, toutes les filières viandes, avec nos partenaires européens. Certes « les discussions ont été musclées », ainsi que l’a rappelé Paul Auffray, mais le ministre a fini par accepter de porter, enfin oserait-on dire, le dossier au niveau européen. Quelques jours plus tôt, il récusait encore tout différentiel de charges et il s’évertuait à démontrer que les écarts de coûts entre la France et l’Allemagne étaient en train de se résorber du fait de la mise en place du Smic de l’autre coté du Rhin et du CICE chez nous…
Pour les filières viandes, il reste encore un flou juridique sur la prise en compte des travailleurs détachés qui aboutit à ce que le coût horaire soit de 5 à 6 €/heure en Allemagne contre 17 à 18 € en France.

Réforme du cadran


Les professionnels ont aussi abordé la réforme du marché au cadran pour mieux prendre compte les évolutions à court terme du marché ainsi que la mise en place de la contractualisation dans la filière. Une première réunion est prévue le 27 août avec les acteurs du marché de Plérin pour « envisager des pistes de commercialisation plus sécurisantes ».
Stéphane Le Foll s’est dit également déterminé, comme le demandent les professionnels, à valoriser l’origine française. Certes des progrès ont été fait en ce sens dans la grande distribution mais, le ministre le reconnait lui-même, l’étiquetage d’origine laisse à désirer dans la charcuterie et la salaison. Comme d’ailleurs dans la restauration collective et la restauration hors foyer… Sur ce sujet, il est prévu la mise en place d’un seuil de 25.000 € en de ça duquel il sera possible de s’affranchir des appels d’offre. Un décret en ce sens concrétisera cet engagement en septembre. Dans la grande distribution, une réunion de travail aura lieu également le 27 août pour travailler les modalités pratiques de mise en œuvre des promotions et de leur encadrement, « pour stimuler la consommation ».

Une crise bien réelle


Le sujet de la crise porcine - et plus généralement celle des filières d’élevage - sera bien entendu à l’ordre du jour du Conseil des ministres exceptionnel de l’Agriculture, le 7 septembre. Outre le sujet de l’harmonisation fiscale et sociale, il y sera question des conséquences de l’embargo russe et des pistes de solution pour dégager « 100.000 tonnes de viande de porc qui restent sur les bras ». En attenant, il a indiqué qu’il aborderait le sujet avec la Commission européenne, au Sommet méditerranéen qui associe la France, l’Espagne, l’Italie et le Portugal, ainsi que le Sommet du groupe de Weimar avec la Pologne et l’Allemagne, pour convaincre nos partenaires de la pertinence de la démarche. La FNSEA avait d’ailleurs plaidé en ce sens avant la table-ronde : « il faut que le ministre prenne l’engagement de faire tout le travail nécessaire auprès de ses collègues européens pour qu’enfin la Commission européenne, face notamment à l’embargo russe qui est une des causes de cette situation dramatique en France et en Europe, puisse trouver des solutions », mettait en avant Xavier Beulin, président, ajoutant que la Commission européenne avait « les moyens à la fois sur le plan juridique et sur le plan financier pour intervenir en cas de crise et de crise profonde… » Et cette crise, elle est bien là… et les éleveurs, qu'ils soient de porcs, de lait ou de viande bovine, sont au bord du seuil de rupture.




Pour sortir de la crise porcine

Les abatteurs avancent leurs propositions


Lors de sa rencontre avec Stéphane Le Foll, le 18 août, Coop de France

a rappelé ses propositions pour sortir de la crise porcine. Il faut reconnaître que son diagnostic et ses demandes sont partagées par la plupart des familles professionnelles de la filière, qu’il s’agisse de la nécessité de « muscler » les stratégies d’exportation ou « d’informer rigoureusement » les consommateurs sur l’origine des produits y compris transformés. Coop de France est également favorable à une rénovation des règles du fonctionnement du marché au cadran et au développement de la contractualisation. Coté compétitivité, les coopératives souhaitent la mise en place des mesures compensatoires au dispositif de soutien à l’investissement de la loi Macron « pour lequel les coopératives sont inéligibles » ainsi que l’accélération du plan de modernisation des abattoirs et atelier de découpe « pour rattraper notre retard vis-à-vis de nos concurrents européens ».

Les revendications du Syndicat national des industries de la viande (Sniv-SNCP) rejoignent celles des coopératives, à savoir un soutien à la compétitivité des abattoirs par un allègement exceptionnel des charges salariales pour faire face aux distorsions du coût du travail par rapport aux abattoirs allemands et espagnols « qui emploient du personnel à un coût inférieur de 40 à 50 % à la France ». Il est demandé également aux pouvoirs publics de donner la priorité au porc français en s’engageant clairement sur l’étiquetage d’origine y compris les produits transformés et les plats préparés et en soutenant une campagne de communication sur l’origine française. Le Sniv-SNCP souhaite également une reprise des négociations avec la Russie pour l’exportation des gras et abats de porc lesquels ne sont pas soumis à l’embargo.





Reprise du cadran

Cotation en baisse de 1,5 ct/kg


Après trois séances d’interruption, le Marché du porc breton à Plérin dans les Côtes-d’Armor a repris le mardi 18 août. La cotation de 1,404 €/kg n’a pu être tenue. En raison de l’absence de Bigard et de Cooperl, les transactions se sont déroulées dans une ambiance assez lourde et la cotation moyenne s’est établie à 1,389 €/kg. Soit une baisse de 1,5 ct par rapport à la cotation précédente. En effet, sur les quelque 49.400 porcs présentés, 15.700 n’ont pas trouvés preneurs.

De son coté Cooperl maintient toujours sa position : « nous ne reviendrons pas tant que des discussions au marché n’auront pas lieu et qu’on ne sera pas tombé d’accord », a déclaré Patrice Drillet, le président, à l’issue d’un rendez-vous avec le ministre de l’Agriculture, le 18 août. Jean-Paul Bigard qui a rencontré le ministre de l’Agriculture le 19 août est sur la même longueur d’ondes. Les deux abatteurs dénoncent la barre de retrait du marché qui limite les variations à 5 cts ainsi que les modalités d’attribution des invendus. Ceux-ci sont cédés au prix moyen du marché aux différents opérateurs en fonction de leurs achats. « Nous continuons d’affirmer qu’une cotation politique complètement décalée du prix européen constitue un désastre économique pour le secteur de l’abattage-découpe et pour toute la filière. Nous perdons chaque jour de nouvelles parts de marché à l’exportation comme sur notre propre territoire », a rappelé Paul Rouche du Sniv-SNCP.