Techniques innovantes
Et pourquoi pas la chicorée ?

L’innovation s’invite depuis longtemps dans tous les domaines. Et la production fourragère n’y échappe pas plus aujourd’hui qu’hier. Ainsi, la chicorée peut-elle se révéler comme un remède en période de sécheresse…
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La chicorée est une plante dicotylédone à racine puissante et à pivot. Ses feuilles sont en rosette sur le collet. La racine est pleine de réserves nutritionnelles qui permettent une reprise rapide de la végétation. Son implantation profonde lui assure une disponibilité en eau importante permettant une pousse même en condition sèche. Avec 30,7 % de MAT, la chicorée est plus riche que les légumineuses en protéines, ce donne un intérêt supplémentaire à la pâture en complément d’une ration à l’auge avec de l’ensilage de maïs par exemple. La chicorée est par ailleurs naturellement riche en nutriments.

Exemple de valeurs pour une analyse de première exploitation faite mi-août 2015

Source laboratoire Cesar.

Insérer ici les trois tableaux


Une implantation pour 4 ans


Le semis est similaire aux autres espèces fourragères : la graine doit être au maximum à 1 cm de profondeur et être roulée pour augmenter le contact sol/graine. La pérennité annoncée et confirmée sur plusieurs sites est de quatre ans. Une floraison d’automne et une fertilisation minérale au printemps améliorent la persistance des pieds au sein de la culture.
La chicorée en mélange peut être ensilée à condition toutefois d’utiliser un conservateur si elle est trop présente. En effet, sa matière sèche sur pied est d’environ 12 %, ce qui rend son séchage compliqué. La culture est donc davantage conseillée en pâture ou en affouragement. Elle est aussi de plus en plus utilisée en sur-semis autour des abreuvoirs et des râteliers, car elle a une excellente résistance au piétinement et c’est la seule espèce à pouvoir résister dans ces conditions.





Laurent Piney, éleveur à Saint-Etienne du Bois
Tout a commencé en 2014...


Eleveur à Saint-Etienne du Bois, Laurent Piney témoigne de son expérience en matière d’implantation de chicorée depuis deux ans. Résultats à l’appui.
Laurent Piney gère un troupeau d’une cinquantaine de vaches montbéliardes, en AOP comté. A l’automne 2014, il a testé un sur-semis de chicorée, avec 3 kg/ha de semence pour un coût de 18 € le kilo. La parcelle était une pâture à bout de souffle destinée à être ressemée.


« Ce sur-semis - qui n’était qu’un essai - m’a surpris par la pérennité de la chicorée qui a continuée à pousser l’été 2015, lequel était particulièrement sec. Elle a aussi résisté aux gelées du début de printemps qui avaient détruit l’intégralité des légumineuses. Elle a même réussi à pousser dans les ronds d’agrostis ! Elle s’est bien développée même sans fertilisation. Au premier tour de pâture, les vaches ont pâturé cette nouvelle espèce comme les autres. La racine pivot mesure au moins 10 cm. C’est une des autres objectifs recherchés : dans mes sols argilo-limoneux légèrement hydromorphes, cette racine facilite l’infiltration de l’eau et fractionne le sol. Elle va également chercher l’eau en profondeur et assure ainsi une pousse même en conditions séchantes ».
Deux ans après ce sur-semis, la culture de chicorée est toujours bien présente et bien pâturée. Elle est très pérenne dans le temps.

2016, une autre expérience




Après un printemps humide désastreux pour les pâtures et avec des stocks de foin prévus pour l’hiver prochain déjà bien entamés, il fallait trouver une solution pour alimenter le troupeau cet été. En livrant du lait pour faire du comté, les achats de fourrages et de concentrés sont limités. Fin juin 2016, Laurent Piney a donc tenté l’expérience d’implanter un mélange de chicorée, de trèfle d’Alexandrie et de millet à la place d’une vieille prairie.
« Ce mélange s’est avéré très intéressant, car il m’a permis de faire deux coupes d’affouragement en vert, puis une exploitation d’automne en pâture. Il était aussi très lactogène et les démarrages de lactations ce sont bien passés », note l’éleveur.
Le verdict du producteur est net : « ce mélange est bien adapté à notre zone où tous les ans depuis maintenant de plusieurs années nous vivons des étés particulièrement secs et chauds et où il devient difficile de maintenir de l’herbe dans les prairies. Il permet de renouveler une prairie sans s’en passer trop longtemps ; implantation fin mai et destruction fin août pour remettre en pâture. L’an prochain je pense essayer un mélange chicorée, trèfle blancs et plantain ». On entend le verdict !






Type de mélange : 6 kg chicorée + 8 kg millet + 3 kg trèfle d’Alexandrie.
Implantation :
• fin mai puis destruction fin août pour remettre en pâture ;
• roulage deux fois de suite après semis pour éviter aux adventices types renouées de s’implanter ;
• apport d’azote dès implantation.
Exploitation :
• 1ère coupe 40 jours après semis, soit mi-juillet, puis trois coupes jusqu’à fin août ;
• par la suite, implantation d’une nouvelle prairie ou pâture à base de ce même mélange en septembre-octobre.