Maladies du bois de la vigne : BDA
Des toxines chez les plants atteints

Publié par Cédric Michelin
-
Sélectionnées par des tests de toxicité réalisés sur des feuilles de vigne et identifiées au moyen d’outils performants, deux toxines ont été mises en évidence dans le bois chez les plantes atteintes par le Black Dead Arm. Ces toxines seraient impliquées dans l’apparition des symptômes foliaires.
126062--BDA_ecorce.jpg
Les études menées par l’Université de Fribourg en Suisse ont montré la présence de toxines chez les plantes atteintes par la Botryosphaeriose ou Black Dead Arm. Elles ont été mises en évidence dans le bois, plus précisément dans la bande brune située sous l’écorce qui part du rameau malade et descend jusqu’au niveau du porte-greffe. Ce travail a d’abord consisté à isoler les molécules produites par les champignons responsables de cette maladie (Diplodia seriata, Neofusicoccum parvum) sur des milieux de culture solides. Leur toxicité a été ensuite testée sur des feuilles de vigne de pinot noir et de chardonnay. Ce test consiste à tremper le pétiole dans une solution de molécules produites par les champignons. Il se révèle positif lorsque des nécroses apparaissent au niveau des nervures au bout de 72 h. Celles retenues pour leur caractère toxique sont purifiées, puis leurs structures chimiques identifiées au moyen d’outils de haute technologie. Cette étude a ainsi mis en évidence quatre phytotoxines chez Diplodia seriata et six chez Neofusicoccum parvum dont trois sont communes aux deux champignons. Deux d’entre elles ont été retrouvées chez les ceps malades, l’une étant secrétée par les deux champignons et l’autre uniquement par Neofusicoccum parvum.


Mieux cibler les prochaines recherches



Ce résultat de première importance permet à la recherche de mieux cibler leurs études sur les interactions hôte-parasite et les méthodes de lutte. Les travaux s’orientent maintenant sur la compréhension de leur rôle dans le dialogue moléculaire entre le champignon et la plante. L’identification des facteurs déclenchant leur sécrétion ainsi qu’une meilleure connaissance des réponses de la plante face à ces molécules toxiques (vitesse de réponse de la plante, leur capacité à les détoxiquer) sont autant d’informations à acquérir pour définir de nouvelles stratégies de lutte.


Le Black Dead Arm



Cette maladie a été identifiée en France depuis 1999 dans le vignoble bordelais. Connue depuis plus longtemps et confondue à l’esca, elle est présente dans la majorité du vignoble français et touche aussi bien les jeunes vignes que les vignes âgées. Les études menées à cette époque avaient montré la présence de ces champignons sans toutefois avoir mis en relation leur présence avec l’expression des symptômes foliaires. Ce n’est que récemment que le Docteur Rego et son équipe de l’Institut Supérieur d’Agronomie de Lisbonne a identifié de façon certaine les agents impliqués dans cette maladie, les Botryosphaeria, en reproduisant les symptômes foliaires par leur inoculation à de jeunes plants. Cette technique a été transférée à l’Université de Reims Champagne-Ardenne dans le cadre du programme co-financé par le ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt, FranceAgriMer et la Région Champagne-Ardenne.




Une collaboration franco-suisse



Cette étude réalisée par une équipe de recherche suisse a résulté d’une étroite collaboration avec des laboratoires français. Ce travail de longue haleine a été initié en 2009 dans le cadre du programme européen de Coopération en science et technologie (Action COST 858) et poursuivi grâce à un financement du Secrétariat d’Etat à l’Education et à la Recherche (SER) de la Confédération Suisse. La poursuite des études est actuellement réalisée en collaboration avec l’équipe du Pr Bertsch de l’Université de Haute-Alsace et celle du Dr Fontaine de l’Université de Reims Champagne Ardenne dans le cadre d’un programme co-financé par le ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt (AAP Casdar 2010-2012). Enfin, l’équipe du Pr Jean-Pierre Métraux au sein du Département de biologie végétale à l’Université de Fribourg travaille depuis longtemps sur les phénomènes de résistance de la plante contre les pathogènes, plus spécifiquement Botrytis cinerea. L’équipe s’est intéressée aux maladies du bois de la vigne depuis que Mme Eliane Abou-Mansour, docteur en chimie des substances naturelles, ayant travaillé depuis 2000 à isoler et identifier les toxines issues de champignons du bois de la vigne, a rejoint le Département de biologie végétale de Fribourg.

Plus d'informations sur : http://www.unifr.ch/plantbiology/eng/Home/research/metraux