Thierry Préaud à Digoin
Pâturage tournant depuis trois ans

Thierry Préaud pratique le pâturage tournant depuis trois ans. Cette conduite lui a permis d’améliorer les croissances de ses animaux tout en diminuant sa consommation d’aliment et en dégageant des stocks de fourrage supplémentaires pour l’hiver. Une conversion gagnante en tout point que son groupement Feder recommande à ses adhérents.
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A Digoin, l’exploitation de Thierry Préaud couvre 187 hectares, dont une vingtaine d’hectares de cultures. Le troupeau est constitué de 110 vaches charolaises ainsi que de 80 brebis. Les femelles charolaises sont engraissées et les mâles sont commercialisés en broutards de fin d’année par Feder, excepté une douzaine d’animaux vendus en reproducteurs. Depuis trois ans, soucieux d’optimiser les coûts de production de son élevage et guidé par des formations dispensées par la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire, Thierry Préaud a converti l’ensemble de son élevage au pâturage tournant.

Sur 4, 5 et même 6 paddocks


D’un pâturage « alternatif » à deux parcelles, il est passé au véritable pâturage tournant sur 3, puis 4 et maintenant 5, voire même 6 paddocks. « Le but est de faire pâturer les animaux toujours dans une herbe courte aux alentours de 8 ou 9 cm de haut », décrit l’éleveur qui rapporte qu’à ce stade, l’herbe ingérée a une valeur alimentaire proche d’un aliment du commerce. Chez Thierry Préaud, les lots d’animaux changent ainsi de paddocks tous les cinq à sept jours pour suivre la pousse de l’herbe. Ils reviennent au point de départ au bout de 28 jours. L’herbe pâturée ne doit jamais dépasser un certain stade (apparition d’épis). Si le dernier paddock est trop avancé, alors il est « court-circuité » et mis de côté pour être fauché. Les bovins continuent alors de tourner sur 4 au lieu de 5 paddocks ou 5 au lieu de 6. « Selon la pousse de l’herbe, on peut court-circuiter jusqu’à deux paddocks pour ajuster la rotation à la pousse de l’herbe », explique Thierry.

Redécoupage des parcelles


Pour convertir son exploitation au pâturage tournant, Thierry a redécoupé toutes ses parcelles avec l’aide du site en ligne "Géoportail". Le plus délicat à prévoir est l’accès aux points d’eau et le découpage doit ménager des zones mécanisables pour avoir un ou deux paddocks d’ajustement aptes à être fauchés, explique l’éleveur. Le réseau de clôtures électrique doit disposer de nombreuses poignées démontables pour le passage des épandeurs et autres travaux d’entretien des prés, ajoute-t-il.
Le troupeau de Thierry est partagé en une dizaine de lots tous conduits sur des îlots en pâturage tournant. La mise à l’herbe doit être ponctuelle car il faut que le lot ait pu effectuer son premier tour de pâturage avant que l’herbe ne monte en épi, explique l’éleveur. Equipé d’un herbomètre et faisant partie du réseau d’éleveurs suivis par Eric Braconnier, technicien spécialisé Herbe de la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire, dans le cadre du bulletin Herb'Hebdo 71, Thierry essaye de respecter le repère des 300 degrés jours (seuil qui a été atteint vers le 15 mars cette année) pour lâcher ses animaux.

Meilleures croissances des animaux


Grâce à la conduite en pâturage tournant, Thierry Préaud a sensiblement amélioré les performances économiques de son exploitation. L’analyse des coûts de production réalisée par la chambre d’agriculture met en évidence une « productivité très satisfaisante » avec notamment une « valeur de production autonome » (sans aliment) supérieure à la moyenne départementale. L’ingestion d’une herbe de qualité meilleure a eu un impact significatif sur les performances et la morphologie du cheptel.
Les données de contrôle de performances analysées par Alsoni 71 montrent que les laitonnes élevées désormais en pâturage tournant sont plus lourdes qu’avant. Elles ont gagné 14 kg à 7 mois la première année ; 21 kg en 2015 et celles de 2016 affichaient même 29 kg de plus que leurs aînées de 2013, illustre Arnaud Godard d’Alsoni 71, et ce sans aucune complémentation au pré. Ce gain de poids, les femelles le conservent après sevrage ce qui permet à Thierry Préaud d’envisager des vêlages avancés dès 2 ans. La même progression est observée pour les mâles avec des performances croissantes au fil des années et des broutards 2016 plus lourds de 55 kg à 210 jours. L’éleveur dit aussi avoir gagné sur le temps de présence des broutards avec des animaux commercialisables plus jeunes.

Economie d’aliment


Outre l’amélioration des performances, le passage au pâturage tournant s’est accompagné d’une baisse de consommation d’aliments pour les mâles. Celle-ci est passée de 531 kg par animal en 2013 à 408 kg en 2016, ce qui a eu pour effet de faire baisser le coût alimentaire de 176 à 113 € par broutard. « Au final, le GMQ des mâles de la naissance à la vente a progressé alors que les quantités d’aliment ont diminué », résume Arnaud Godard qui évalue l’économie d’aliment à 3.100 €, « cela dépasse largement les frais de mise en place des clôtures liées au pâturage tournant », fait-il remarquer. En 2016, le concentré économisé par les mâles durant le printemps humide a pu être redonné aux femelles en été lorsque l’herbe est venue à manquer, signale l’éleveur.

Stocks supplémentaires


Grâce au pâturage tournant, Thierry optimise sa consommation d’herbe et il parvient à dégager des stocks de fourrage supplémentaires. L’an dernier, ce sont 200 bottes de fourrages qu’il a pu récupérer en fauchant des paddocks exclus temporairement de la conduite. « En 2016, je n’ai jamais eu beaucoup d’herbe et pourtant j’ai réussi à maintenir mes animaux en état jusqu’à la fin de l’année. En pâturage tournant, le peu qu’elles avaient les nourrissait bien », constate l’éleveur.
Le pâturage tournant a aussi révélé d’autres avantages dans l’élevage. Habitués à être changés de parcelles tous les 5 à 6 jours, les bovins en pâturage tournant se montrent plus dociles. Autre bienfait signalé par Thierry Préaud : le pâturage tournant limite le risque d’infestation parasitaire.
Pour Feder, le pâturage tournant est un moyen pour les éleveurs de valoriser au mieux leurs parcelles d’herbe pour améliorer leur revenu et produire des animaux de qualité au moindre coût. Désireuse d’élargir le nombre des utilisateurs de cette technique, la coopérative accompagne ses adhérents dans ce sens en lien avec les experts de la chambre d’agriculture.