Maladie du bois de la vigne
Des pistes encourageantes

Publié par Cédric Michelin
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L'Inra travaille à recherche des solutions aux maladies du bois de la vigne. Un oomycète pourrait intervenir comme agent de biocontrôle. L’oomycète Phythium oligandrum est en effet un colonisateur de la rhizosphère, la zone du sol caractérisée par les interactions présentes entre les racines des plantes et les microorganismes. Selon une étude réalisée il y a un an dans le cadre d’une thèse, P. oligandrum se révèlerait être un potentiel agent de lutte contre l’esca, une maladie du bois de la vigne.
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Afin de contrôler certaines maladies fongiques, comme le mildiou, l’oïdium, ou encore la pourriture grise, la filière viti-vinicole réalise de nombreuses applications de pesticides chimiques de synthèse sur les ceps. Néanmoins, pour d’autres pathologies, comme les maladies du bois, aucune matière active chimique n’est homologuée depuis l’interdiction en 2001 de l’arsénite de soude, un principe actif de pesticide. Ces maladies du bois rendent environ 13% du vignoble français improductif. Dans ce contexte, la filière viti-vinicole est particulièrement sensible au développement de méthodes alternatives de protection des plantes, plus respectueuses de l’environnement et de la santé humaine.

A la recherche de solutions alternatives



Conscient de ces enjeux, l’Unité Mixte de Recherche Santé et Agro-écologie du Vignoble (UMR SAVE) de l'Inra en partenariat avec la société Biovitis SA, s’est engagée dans le développement d’une stratégie de protection de la vigne via le biocontrôle. Une collaboration, débutée en 2009, a été matérialisée par le financement d’une thèse CIFRE, encadrée par Patrice Rey, professeur en protection des végétaux à Bordeaux Sciences Agro et réalisée par Jonathan Gerbore (2010-2013).
L’objectif de l’étude consistait à utiliser un oomycète appelé Pythium oligandrum principalement contre l’esca une maladie du bois touchant les parties aériennes de la vigne. Afin d’utiliser des souches de P. oligandrum adaptées à l’écosystème vigne, plusieurs d’entre elles ont été isolées de la rhizosphère de ceps cultivés dans trois sous-régions viticoles concernant douze vignobles du Bordelais. Chaque souche provenait d’un sol spécifique : argilo-calcaire, sablo-graveleux ou graveleux. Les relations entre P. oligandrum et les racines de la vigne ont été étudiées par analyse transcriptomique, une technique d’analyse de l’expression des gènes.

Des pistes encourageantes



Les résultats ont montré que de jeunes plants de vigne répondent à la colonisation racinaire par P. oligandrum en modifiant l’expression de gènes intervenant dans plusieurs voies métaboliques. Un essai, conduit pendant deux années consécutives, visant à induire chez la vigne une protection contre un champignon pathogène impliqué dans l’esca, Phaeomoniella chlamydospora, a été réalisé.
La colonisation des racines par P. oligandrum a été associée à une réduction de la longueur des nécroses dues à P. chlamydospora. En adéquation avec ce résultat, l’analyse (transcriptomique) a montré une sur-expression des gènes impliqués dans les mécanismes de défense et plus particulièrement dans la voie de l’éthylène. L’éthylène est souvent émis par les plantes lorsqu’elles sont soumises à un stress. Plusieurs gènes spécifiquement induits constitueraient des marqueurs de résistance qu’il conviendra de valider lors de prochaines expérimentations.


L’Inra, un partenaire majeur dans le biocontrôle



La volonté de réduire la dépendance de l’agriculture aux pesticides de synthèse stimule de façon croissante l’innovation dans le domaine du biocontrôle. En tant qu’institut de recherche public, l’Inra est un acteur majeur de cette évolution, en développant des projets qui vont du plus fondamental jusqu’au transfert et à l’application des solutions.




Des micro-organismes bénéfiques



Le sol et les plantes hébergent une microflore naturelle abondante et riche en espèces diverses. Parmi ces micro-organismes, certains sont capables de protéger les plantes contre les maladies causées par des germes phytopathogènes et font l'objet de travaux de recherche depuis des décennies. Actuellement, une vingtaine de micro-organismes bénéfiques sélectionnés par les chercheurs ont été homologués au sein de l'Union Européenne et sont commercialisés pour la protection des cultures contre certaines maladies. Bien que parfois considérés comme moins efficaces que les traitements chimiques, les produits de biocontrôle à base de micro-organismes présentent des atouts majeurs pour une application dans une stratégie de protection intégrée.