Abattoirs
« Dans la transparence la plus totale »

Le débat sur les abattoirs a refait surface sous la pression des associations de défense du bien-être animal. Les fautes relevées par la Commission d’enquête diligentée sont essentiellement mineures, rappelle Dominique Langlois, président d’Interbev. Interview.
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Quelle est votre réaction quant à la divulgation du rapport d’enquête présenté par le ministre ?
Dominique Langlois : tout d’abord, le rapport présenté par Stéphane Le Foll a relevé 30 % de fautes mineures sur des chaînes d’abattage, des fautes considérées comme minimes qui ne portent, ni préjudice au bien-être animal, ni au bon fonctionnement de l’abattoir. En revanche, ce rapport mentionne 5 % de fautes majeures de nature à être sanctionnées. Les outils concernés doivent cesser leur activité s’ils ne sont pas conformes à la réglementation. Le ministre a d’ailleurs immédiatement fait suspendre leur agrément et nous nous en félicitons. Les règles doivent être appliquées par tous les opérateurs, il ne doit pas y avoir d’exception.

Quelles mesures souhaitez-vous entreprendre pour améliorer les conditions d’abattage ?

D. L. : Interbev est en totale adéquation avec les mesures du plan d’actions "Bien-être animal" lancées par le ministère de l’Agriculture. Nous nous félicitons notamment de l’évolution donnée au Responsable de protection animale en abattoir (RPA). Une étape supplémentaire est franchie : le RPA est désormais indépendant, mais aussi pénalement responsable. Il sera présent quelle que soit la taille de l’abattoir et le renforcement de son statut n’entraînera pas de coût supplémentaire pour l’abattoir. C’est une très bonne chose.

Concernant l’abattage rituel, quelle est la situation en France ?

D. L. : tout d’abord, je souhaite rappeler que l’abattage rituel est une réalité. Nous avons des consommateurs français et des marchés à l’export qui sont en demande de produits issus de ces pratiques. Il existe une dérogation au niveau européen qui prévoit la possibilité aux Etats membres de mettre en œuvre l’abattage rituel. En France, cette dérogation a été renforcée en décembre 2011 par un décret qui impose trois points précis : l’obligation de se déclarer en préfecture, l’obligation d’avoir une formation de sacrificateur et de tenir un registre stipulant la comptabilité des commandes et des ventes pour contrôler les échanges.

Quels sont les enjeux des discussions en cours ?

D. L. : le débat sur l’abattage n’est pas simple et il peut être lourd en conséquence. On a trois solutions.
Soit on maintient les choses dans l’état actuel, soit on décide d’interdire ces pratiques en sachant que ce serait une véritable catastrophe économique pour la filière. Il faut savoir que l’abattage rituel représente 15 % de l’abattage des bovins, soit environ 1,380 million de têtes et 22 % de celui des ovins. Ces disparitions de marché ne seront pas compensées. Soit une troisième voie est possible : en discussion avec les différents cultes, essayer de trouver une solution qui permet de répondre aux critiques faites sur les modes d’abattage. Instaurer le soulagement de l’animal par assommage avant ou après l’égorgement. Un dialogue en concertations doit être mené avec les cultes.

Quel est votre sentiment personnel sur les polémiques liées à l’abattage ?
D. L. : le débat aujourd’hui est très radical et génère des sources de récupération par des mouvements politiques et autres associations. Je peux vous dire qu’il existe une réalité aujourd’hui : il y a une demande sur l’abattage rituel. Je rappelle au passage que la Pologne avait décidé d’interdire l’abattage rituel. Au bout de six mois et au vu des pertes de marchés considérables, elle a fait marche arrière.
Le message important que je souhaite faire passer c’est qu’il faut que nous soyons dans la transparence la plus totale. La filière condamne toutes les dérives en se constituant systématiquement partie civile quel que soit l’opérateur concerné. Et cela, car ces révélations ne sont pas le reflet de la filière. Elles mettent à mal les producteurs, les industriels, les distributeurs et aussi tout le personnel dans les abattoirs qui font correctement leur travail. Les dégâts humains doivent aussi être pris en compte.