Agriculture biologique
Le soja, un atout dans la rotation bio !

Publié par Cédric Michelin
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Jean-Christophe Roux s’est installé en 1979 en conventionnel à La Chapelle-Thècle. En 1988, il a décidé de convertir 2-3 ha en agriculture biologique. Les résultats techniques et économiques liés à une réduction des risques l'ont convaincu. Depuis, il a franchi le pas et a converti l'intégralité de son exploitation en bio.
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Mais là n’était pas le sujet du jour. En ce 19 juin, il témoignait dans le cadre des journées Innov'actions, organisées par les chambres d’agriculture de la région, entres autres. L’important était de montrer l’importance du soja, aujourd'hui, dans sa rotation. Cette culture de printemps à forte valeur ajoutée tant au niveau économique que technique. En revanche elle demande une attention particulière au moment du semis et du désherbage, deux étapes délicates mais fondamentales. « Une des difficultés en agriculture biologique est d'être autonome en azote » précisait Antoine Villard, de la chambre d’Agriculture de Saône-et-Loire. C'est un des critères essentiels à l'élaboration de la rotation. Cette dernière se décline ainsi : céréale + trèfle - maïs - maïs - soja - céréales - céréales – féverole. Dans le cas de la parcelle où avait lieu la démonstration de désherbage, il précisait que le précédent soja était une féverole et que derrière, il sèmera des céréales.
Le trèfle est semé en mars, à la volée au centrifuge placé devant le tracteur, dans la céréale. A l'arrière, la herse étrille permet de couvrir un peu les graines et de désherber en même temps la céréale en sortie d'hiver. Le trèfle est ensuite broyé une ou deux fois au printemps suivant. Il permet ainsi d'apporter un peu d'azote au maïs qui sera semé dans la foulée. Le second maïs est quand à lui fertilisé avec 8 tonnes de compost de volaille. Enfin, la rotation longue a aussi l'avantage d'alterner cultures d'automne et cultures de printemps, ce qui facilite la gestion de l'enherbement. Seuls les blés et maïs sont fertilisés avec « un peu » d'engrais binaire (300 à 500 kg de 9-5-0). « C’est un engrais organique à base de plumes, d’os, de farines de viande, de suie de porc, de guano… », précise Jean-Christophe, autorisé dans le règlement européen bio rajoutait Elise Lepoutre, toujours de la chambre d’Agriculture départementale.

Le semis simplifié dans certaines conditions seulement?



S'il ne laboure pas systématiquement toutes ses parcelles, en soja, si. « A 18-20 cm de profondeur pour rapporter des résidus de maïs », explique Jean-Christophe. C'est avant les cultures de printemps que le labour est systématique, suivi d'un passage de herse rotative léger à 8-10 cm, puis du semis au combiné. J'essaie de laisser suffisamment de temps entre la préparation de semis et le semis – « les 15 et 20 mai » cette année - pour favoriser la levée d'adventices et réaliser un dernier faux semis. « Ce ne sont pas les mêmes herbes qui lèvent chaque fois. On commence à avoir le problème de l’ambroisie », comme en conventionnel dans ce secteur de la Bresse. « S’il reste des filaments, je passe un coup de herse étrille à l’aveugle pour détruire au dessus de la graine de soja ou de maïs. Le tout est d’éliminer les mauvaises herbes. Il faut être relativement agressif et accepter 10-15 % de pertes », précise Jean-Christophe. C’est ce qu’il démontrait en grimpant dans son tracteur. « En plus, cela nivelle le sol pour la moisson », sourit-il. La sarcleuse aurait été l’outil le plus adapté, vu la hauteur du soja, pour éliminer les derniers liserons. Car, la bineuse « ne fait que l’inter-rang et il faut donc passer ni trop tôt ni trop tard », tempère-t-il.

6 heures par hectare



Ainsi, au final, le désherbage se fait en 3-4 étapes : un premier passage à l'aveugle avec la herse étrille à 10-12 km/heure ; un deuxième au stade cotylédon-l feuille émergée puis je le sarcle lorsqu'il fait 8-10 cm. Enfin, en présence de liserons, il repasse à 6 km/h la herse étrille lorsque le soja fait 20 cm. Même si cela le couche un peu, il se redresse ensuite et prend le dessus sur le liseron. « Au début, je n’osais pas utiliser la herse. Je me faisais peur. En fait, il faut pas se retourner dans le tracteur », rigole-t-il maintenant qu’il a pris l’habitude. Le réglage à la parcelle lui prend parfois une demie-heure. C’est aussi pour cela qu’il s’applique à « semer bien droit ». Sa sarcleuse est autoguidée mais pas par RTK.
Sa conseillère, Elise Lepoutre estime à 4 h/ha le temps de semis et à 2 heures supplémentaires pour les désherbages successifs. « Le débit de chantier dépend de la taille de la parcelle », précisait toutefois Jean-Christophe.

900 €/ha de marge brute



Emilie Chaumont estime que ses charges de mécanisation reviennent à 200 €/ha, principalement en raison du travail du sol. Le reste est réduit au minimum. Notamment le poste semences.
Jean-Christophe Roux choisit des variétés triples 0, très précoces. « Je sème la semence inoculée après le 15 mai, à une densité de 600.000 pieds/ha pour que le sol soit bien ressuyé et pour favoriser une levée rapide de la culture ». Les risques d'attaques ou d'enherbement sont ainsi réduits. Il table sur un rendement de 15-20 q/ha cette année « pas facile ». Sa moyenne est cependant plus élevée, grimpant jusqu’à 35 q/ha avec des « variétés jamais revus » qui sont dans la gamme conventionnelle. Il fait également une sélection de semences de fermes sur un ha chaque année qu’il ressème ensuite. Il constate avec un rendement supérieur en général de l’ordre de 10-15 %. « Ça compte » à 700€/t, rajoutait son collègue Julien Taton de Saint-Albain, qui c’est que les doses pour un ha reviennent à 300 € en bio.
La chambre d’Agriculture estime la marge économique de Jean-Christophe aux alentours de 900 €/ha en soja bio, « hors prix de main d’œuvre qui plombe les résultats » par rapport au conventionnel. Tout est relatif estime Jean-Christophe qui ne se plaint pas, bien au contraire : « c’est pour cela qu’en bio, on ne peut pas se permettre d’avoir 200 ha », visiblement heureux ainsi.



Témoignage



« Sur céréales en terrain très argileux, je préfère ne pas labourer pour éviter de faire une semelle de labour qui génèrerait des engorgements en hiver. Dans ce cas, je sème au combiné après deux déchaumages. Sinon, je déchaume deux fois en été, laboure puis sème dans la foulée.
Toutes mes céréales sont stockées et séchées à la ferme. Je me suis équipé d'un trieur Daguet à grille (ne trie pas très bien les graines rondes) et de sept cellules cônes (2st / cellules).
Le séchage se fait par arrivée d'air par le bas. Grâce à cela, mon soja est commercialisable. J'utilise en moyenne 300 kg de gaz pour sécher les 25 à 30 t de soja. Une fois le soja séché, il est vendu ce qui permet de le remplacer par du maïs
».





Une rotation diversifiée



Exploitation 97 ha
· 11,77 ha de blé
· 17,21 ha de féverole d’hiver
· 23,77 ha de maïs
· 11,92 ha de méteil
· 22,48 ha de prairies et parcours
· 7,13 ha de soja
· 1,21 de triticale
Atelier volailles
· 120 pondeuses
· 5000 poulets de chair
· 600 pintades
Produits et ventes
· Les céréales sont vendues à des courtiers
· 50 tonnes des autres produits sont autoconsommés
· Vente des volailles en direct via AMAP et marchés
Rendements
· Maïs : 50-55 qx
· Soja : 18-20 qx
· Blé : 25-30 qx
· Féverole : 20 qx
· Méteil : 25-30 qx
· Tout le soja est vendu à Moulin Marion.