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Débouchés : faire le pari de la restauration collective

Mis en ligne par Cédric MICHELIN
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Peut-on faire rimer restauration collective et achats de proximité ? Oui, partiellement, si l'on en croit une enquête récente d'Agreste, qui montre aussi les obstacles pouvant freiner de tels développements.

Débouchés : faire le pari de la restauration collective

Alors que la crise sanitaire que nous venons de traverser a placé sur le devant de la scène les préoccupations liées au raccourcissement des circuits d'approvisionnement en produits alimentaires, de bonnes habitudes dans ce domaine avaient-elle déjà été prises, avant le surgissement du Covid-19 ? C'est ce qu'a tenté d'observer Agreste, l'organisme régional de statistique, d'évaluation et de prospective agricole, à travers une enquête dont les résultats ont été dévoilés au mois de mai. Il s'agit d'une première approche des pratiques d'achat « de proximité » dans la restauration collective de Bourgogne Franche-Comté (BFC), en 2019 (voir la méthodologie appliquée en encadré). L'enjeu n'est pas négligeable lorsqu'on sait qu'en 2018, le total des repas servis en BFC par les établissements de restauration collective s'est monté à 178 millions, pour un montant d'achat de denrées alimentaires de 369 millions d'euros TTC, sur une valeur totale de productions animales et végétales de 2 milliards d'euros. Les restaurations collectives concernées par l'enquête pèseraient donc pour près de 20 % de l'offre de production agricole régionale. 38 % de ces repas ont été servis par des structures de santé, 28 % par des administrations ou autres, 20 % par des écoles élémentaires ou des universités et 14 % par des collèges et des lycées.

Volonté et organisation

Premier enseignement de l'enquête : les achats de proximité dans la restauration collective sont déjà bien présents dans la région. Les gestionnaires de restauration ont estimé qu'en 2018, un peu plus de 20 % de leurs denrées alimentaires étaient de proximité. Des incitations existent pour aller en ce sens mais les résultats reposent avant tout sur la volonté des gestionnaires d'achats et l'organisation des fournisseurs locaux. Parmi les motivations des acheteurs, on trouve la volonté de préserver le tissu économique local, mais aussi la qualité des produits ou l'ambition de réduire l'empreinte carbone. Il y a aussi des freins à cette volonté et notamment le prix des produits, les quantités insuffisantes ou les délais de livraison. La réglementation de la commande publique est également parfois invoquée. Au sein des collèges et lycées, les produits enquêtés (viandes bovine, ovine, porcine et de volaille, fruits, légumes et produits laitiers frais) représentent un peu plus de la moitié des achats. Cette part est légèrement inférieure pour les établissements de santé (45 %). En 2019, ces derniers, ainsi que les établissements médico-sociaux ont acheté pour plus de 67 millions d'euros de denrées alimentaires, dont 8 % en produits de proximité, à comparer à une part de 13 % pour les collèges et lycées. Pour ces derniers, l'enquête montre aussi que les achats frais de proximité sont plus importants en viande bovine qu'en viande de volaille. Les achats de viande porcine seraient à 40 % locaux et la viande ovine à 26 %. Les achats de produits laitiers se situent autour de 7 millions d'euros mais seulement un quart sont achetés en local. Il apparaît aussi que le montant d'achat des fruits et légumes frais locaux représenterait au moins 12 % du total. Une part relativement réduite qui peut s'expliquer par des volumes produits dans la région assez faibles, mais aussi par la période de l'année à laquelle l'enquête a été menée (janvier et février 2019), peu propice à un approvisionnement local frais.

L'importance du lien avec les collectivités

Le lien fort qui relie collèges, lycées et collectivités territoriales -les premiers dépendants des Conseils départementaux et les seconds, du Conseil régional- constitue une incitation à donner plus de place aux produits locaux dans les achats. La présence de structures de transformation (abattoir, légumerie) peut aussi favoriser les achats de proximité. Si l'on regarde la situation, département par département, en BFC, la Saône-et-Loire, le Doubs et la Côte-d'Or consacrent les plus gros montants de dépenses pour les produits pris en compte dans l'enquête. C'est logique, dans la mesure où ils sont aussi les plus peuplés et comptent donc les parts les plus élevés de collégiens et de lycéens. Pour les collèges et lycées, un quart des achats des produits pris en compte dans l'enquête proviendrait du département ou d'un département limitrophe. Cette part serait même un peu plus élevée dans la Nièvre (28 %) grâce à une part d'achats importante en volailles locales.

Berty Robert d'après Agreste

Méthodologie

L'étude en question repose sur un questionnaire portant sur les pratiques d'achat en produit bruts, envoyé à plus de 1.600 restaurations collectives du domaine de l'enseignement, de la santé, du médico-social et d'un domaine autre (restaurants administratifs, etc.). Les questions portaient sur les montants, la répartition et la provenance des achats. Cette étude considère comme produit local un produit issu du département ou d'un département limitrophe de la restauration collective interrogée. Les répondants devaient considérer l'origine de la matière première (viande brute, lait, fruits et légumes frais) et non le lieu de transformation du produit ou d'implantation du fournisseur.

Des PAT pour avancer

Des freins existent face à la consommation locale, notamment l'offre inexistante à une échelle fine sur un produit donné. Néanmoins, en plusieurs endroits de Bourgogne Franche-Comté, on a vu émerger des Projets alimentaires territoriaux (PAT) dans le but de déployer une politique de l'alimentation dans les territoires. On en trouve dans tout le département de la Nièvre, mais aussi autour des agglomérations de Dijon et Auxerre, et également beaucoup en Saône-et-Loire et dans le Doubs. Le déploiement de ces PAT est, avec la restauration collective, un des leviers sur lequel repose le nouveau Programme national pour l'alimentation (PNA) qui court jusqu'en 2023. Ces projets s'appuient sur un diagnostic partagé de la production agricole et alimentaire locale, du besoin alimentaire des habitants et des atouts et contraintes sociales, économiques et environnementales du territoire. Les zone de BFC désireuses de s'engager dans un projet de ce type peuvent être accompagnées par la Draaf.