Agroécologie
Les intentions d’engagement vers l’agroécologie marquent le pas

C’est un phénomène nouveau : les agriculteurs seraient moins enclins à s’engager vers une agriculture durable du fait d’un contexte économique plus incertain. C’est ce qui ressort d’une enquête BVA pour le groupe bancaire BPCE, qui brosse un tableau plutôt sombre de la confiance actuelle des agriculteurs et viticulteurs.

Les intentions d’engagement vers l’agroécologie marquent le pas
L'engagement dans la démarche agroécologique atteint un palier, et un recul de ceux qui l'envisagent, en particulier chez les jeunes exploitants et les plus grandes exploitations. Ainsi, 35 % disent pratiquer la conservation des sols (- 3 points par rapport à 2021) et 8% l'envisagent (- 5 points). Enquête BPCE-BVA 2023

Selon une enquête BVA pour le groupe BPCE (Banque populaire), réalisée auprès de 1.251 chefs d’exploitation du secteur agricole et viticole en France (1), malgré une embellie sur leur chiffre d’affaires constatée depuis deux ans (pour 33 % d’entre eux, soit +19 points par rapport 2021), ils se disent préoccupés par la rentabilité de leur exploitation, en particulier les viticulteurs. L’impact de l’inflation est massif pour les agriculteurs et viticulteurs : 80 % d’entre eux se déclarent affectés, et ce taux monte à 90 % pour les plus petites exploitations.

Cette enquête 2023 montre que l’engagement dans une démarche agroécologique atteint un palier, à 49 % des répondants (-2 points) et même un recul de ceux qui ont l’intention d’aller dans cette voie, qui ne sont plus que 10 % (-5 points). Pour les agriculteurs, le frein est un besoin de connaissances et d’aide technique, alors que, pour les viticulteurs, il est lié au manque de main-d’œuvre et à la nécessité d’investir dans du matériel spécifique. Quant au bio, sur les 14 % des agriculteurs et viticulteurs interrogés qui s’y disent engagés, 11 % affirment qu’ils envisagent de la quitter dans les cinq ans.

Un contexte qui n’incite pas à changer de modèle

Ce coup de frein sur l’agriculture durable est lié à plusieurs facteurs, selon Alain Tourdjman, directeur des études et prospectives du groupe BPCE : « Le vieillissement de la population agricole qui s’inquiète de plus en plus de la transmission des exploitations, le retour de l’inflation qui oblige à prendre des mesures d’adaptation, la question de la rentabilité qui est posée et le retournement du marché du bio qui n’assure plus de débouchés, autant d’éléments qui n’incitent pas à changer de modèle ». Pour autant, les exploitants déjà engagés de longue date dans l’agriculture durable, à l’instar des viticulteurs, sont persuadés de sa pertinence économique et sociétale, et ils aspirent à approfondir leur engagement.

À chaque génération ses préoccupations principales

Les agriculteurs et viticulteurs ont été interrogés sur leurs préoccupations principales. La première qui apparaît massivement est celle de la transmission-cession de leur exploitation, surtout pour les 55 ans et plus (71 %). La deuxième est le fait de se prémunir des aléas climatiques, économiques et réglementaires, surtout pour les moins de 40 ans (43 %). Et pour les exploitants de 40 à 55 ans, les inquiétudes principales portent sur la modernisation ou l’agrandissement de leur exploitation (43 %), ainsi que sur les difficultés de financement des investissements et la trésorerie (42 %).

Ce constat est en lien direct avec la conjoncture économique. Aux tensions inflationnistes s’ajoutent les difficultés de recrutement, notamment de main-d’œuvre saisonnière : 7 employeurs sur 10 déclarent au moins une difficulté en matière de ressources humaines. Quant aux aléas climatiques, la moitié des agriculteurs et viticulteurs disent avoir modifié un ou plusieurs facteurs de pilotage pour en réduire les impacts, notamment les techniques de production et la stratégie d’investissement. Ainsi, seulement 52 % des agriculteurs et viticulteurs prévoient des investissements dans les deux ans à venir (-15 points par rapport à 2021). Cette baisse porte notamment sur les investissements dans le matériel. L’énergie est le deuxième poste d’investissement, après celui dans le matériel, et le seul qui soit en progression par rapport à 2021.