Section bovine de la FDSEA
Revoir l’approche des sujets de fond

Depuis quelques mois, la section bovine de Saône-et-Loire travaille sur l’élaboration d’un projet de filière. Face à la multiplication des constats que tout éleveur connait aujourd’hui (pas de rémunération, diminution des aides allaitantes Pac, incapacité de la filière à ramener de la valeur…), la section bovine n’en pouvait plus. Désormais, son fonctionnement change et laisse plus de place au travail des sujets de fond.

Revoir l’approche des sujets de fond

Pour cela, la section bovine s’est fixée trois priorités. La première reste évidemment la défense du prix et de l’élevage allaitant. C’est le but premier, l’identité de la section bovine. La seconde priorité sera de faire en sorte que la section bovine devienne une « interface des acteurs de la filière ». En quoi cela consiste-il ? Pour être écoutée et incontournable, des groupes de travail vont être crées au sein de la section, afin de mettre en place une stratégie, des actions et des objectifs. Une réflexion va aussi être mené sur la différenciation des produits. Depuis des années, la filière viande est basée sur une stratégie volume/prix qui ne fonctionne plus. Il y a un besoin de mettre plus en valeur, en avant l’élevage à l’herbe, le paysage bocager et plus généralement ses externalités positives pour se différencier sur les marchés. Enfin, troisième objectif principal, réaliser un travail sur la résilience des exploitations.
Tout ces objectifs vont de pair avec une ouverture de la section au plus grand nombre. De l’intérieur et vers l’extérieur. Concrètement, cela pourra se traduire par des interventions présentant des exemples qui fonctionnent dans le département ou dans d’autres régions. Mais ce pourra être aussi avec l’apport d’informations techniques aux exploitants. Cela pourra même s’il le faut se traduire par la réalisation de formations en fonction des besoins exprimés.
Ainsi, désormais, les sections bovines se décomposeront en deux temps bien distincts. Les matinées seront consacrées à des réunions de travail pour monter le plan de filière et les actions à développer. Les après-midi feront le tour de l’actualité et un point sur la conjoncture et les marchés. Avant tout, la section bovine reste donc un lieu d’écoute et d’échanges constructifs afin d’apporter des solutions concrètes aux problèmes des éleveurs allaitants.

Une réflexion à mener avec les OP


Lors du CA de section, des ateliers de réflexions ont été mis en place afin de définir quels sont les problématiques liées aux acteurs de la filière (OP et GMS/RHD), et les solutions qui pourraient être mises en place.
Globalement, la section pense qu’il s’agit d’un « problème structurel et fonctionnel des OP : la chasse au volume et la délégation progressive de la vente des animaux par les producteurs a provoqué une perte de pouvoir des agriculteurs dans leurs structures. À cela s'ajoute une difficulté de ces mêmes structures pour capter d'autres marchés ». 
Les adhérents ne comprennent alors plus leur structure, qui ne ramène plus de rémunération aux éleveurs, ni de valeur ajoutée. L’éleveur se résume alors, selon la section, à « un docile outil à produire ». Ces problèmes seraient pour eux apparus depuis que les éleveurs sont des « numéros ». 
La section bovine propose comme solution de créer une « Maison des éleveurs », qui aurait une réelle force de frappe commerciale pour aller chercher d’autres débouchés/marchés et de négocier le prix attendu par les producteurs. Cette structure ne remplacerait en rien le travail des OP mais arriverait en complément entre les acheteurs et l’OP, pour aller chercher de la valeur.
En parallèle, la section bovine propose aussi de miser sur les Associations d’Organisation de Producteurs (AOP) pour avoir une force de négociation auprès des acheteurs.  Sans minimiser les problèmes juridiques que cela peu engendre, cette structuration doit s’accélérer et implique une réelle volonté de la part des OP.  
Pour arriver à s’imposer, la section bovine va s’appuyer sur les loi existantes (loi climat, loi Egalim 2) et les élus politiques, en faisant appel enfin aux différents outils de la nouvelle Pac, notamment par le  biais des programmes opérationnels.

Loïc Belin

La RHD et la GMS : un vol d’image au détriment des producteurs 

Pour la section bovine, le problème résulte d’une filière se basant sur une stratégie volume/prix, sans rechercher d’autres marchés. De plus, un problème de "jalousie" commerciale entre les OP s’ajouterait, renforçant l’idée qu’il n’y a pas de retour du prix à l’éleveur, qui a délégué la commercialisation. 
Il semblerait aussi qu’il y ait un manque de volonté de la part des intendants des restaurants collectives, et un manque de bouchers dans les GMS. Un des problèmes majeurs en GMS reste cependant le manque de valorisation économique du haché frais issu du troupeau allaitant.
Il en résulte selon la section, un « vol d’image de la part des RHD commerciale et des GMS ». Trop souvent ces structures se servent de l’image des agriculteurs, tout en continuant de ne pas les rémunérer.
Parmi les solutions évoquées, on retrouve une nouvelle fois l’idée de l’AOP. Passer des contrats en local comme au national avec tous les acteurs, permettrait de régler la question du prix.
Autre solution, la loi Climat prévoit notamment pour les restaurants collectifs, un objectif spécifique de 60% d’approvisionnement en viandes de qualité à compter du 1er janvier 2024, selon les mêmes critères que ceux fixés par la loi EGAlim (+ commerce équitable + nouveau critère visant à favoriser les approvisionnements directs). Ce taux est même élevé à 100% pour les cantines gérées par l’État, ses établissements publics et les entreprises publiques.
Ainsi, afin d’accélérer le déploiement de cette loi, la section bovine prévoit de rencontrer les responsables de l’État gérant ces établissements. Pour finir, la section insiste sur un point fondamental : chaque éleveur doit d’une part s’organiser collectivement pour fournir localement ces établissements, mais « les éleveurs doivent avant tout se prendre en main ». Il ne faut pas lâcher pour avoir du prix, et se réapproprier la vente de ses animaux ! 
En effet, la prochaine loi Egalim 2 implique une généralisation des contrats écrits et pluriannuels de vente de produits agricoles, le minimum étant fixé à trois ans. Ces contrats devraient intégrer des indicateurs de couts de productions (élaborés et diffusés) par les interprofessions.  Cet outil ne pourra fonctionner que si chaque agriculteur reprendre la main sur les ventes, « il faut être ferme avec son marchand ou son acheteur ». 

Un besoin de remobilisation générale

La section bovine connait depuis quelques années une baisse de fréquentation, en partie liée au Covid, mais plus globalement liée à la conjoncture et à l’impuissance que peuvent ressentir les éleveurs face à cette situation.
Cependant, la section bovine a la volonté de continuer le travail qu’elle a entamé en s’impliquant encore plus pour se sortir de cette situation déplorable qui dure depuis plus de 30 ans. Cependant, ce travail nécessite beaucoup de temps et d’énergie de la part des membres de la section. Ce travail ne doit pas se limiter à la section, chacun a la possibilité d’agir dans les cours de fermes, en arrêtant de « brader » ses animaux face à son acheteur.  
Depuis la crise du Covid, la section bovine n’a pu organiser d’Assemblée générale. Ainsi, dans les mois qui vont venir, la section va entamer une tournée départementale pour rencontrer tous les éleveurs bovins qui souhaitent échanger avec eux. Connaitre les problématiques de chacun, les solutions qu’ils proposent, est fondamentale pour développer un projet de section cohérent avec les attentes de chacun. Ce sera aussi l’occasion de présenter le nouveau fonctionnement de la section, et de refaire un point sur la conjoncture où les signaux de marchés n’ont jamais été aussi bons, mais toujours sans résultat pour le producteur.