FDSEA de Saône-et-Loire
Des lois qui font reculer l'agriculture

Cédric MICHELIN
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Après avoir organisée une visioconférence avec de nombreux parlementaires de Saône-et-Loire, la FDSEA a invité le député Raphaël Gauvain et un représentant du Ministère de l’Économie le 28 janvier à Buxy. Au-delà des nombreux sujets d’actualité sensibles (ZNT, glyphosate, néonicotinoïde, corbeaux, loup…), les agriculteurs du secteur Chalonnais-Bresse les ont interpellé sur leur sentiment d’abandon.

Des lois qui font reculer l'agriculture

« Mon voisin a mis sa piscine à 50 cm du bord de sa propriété. Avec les ZNT, ce sont mes vignes qui doivent reculer », s’indignait un vigneron de Givry. « Les miens de voisins au contraire m’ont engueulé parce que je ne désherbais plus devant chez eux. Ils ont mis du glyphosate. Qu’est ce qui se passe en cas de contrôle », questionnait un agriculteur de Bresse. « Les promeneurs nous insultent même quand on laboure près de la voie verte. J’ai la boule au ventre », ne supporte plus un vigneron de Buxy. « On n’arrive plus à gérer l’ambroisie, on est en plein paradoxe », critiquait un éleveur céréalier. « La France veut développer les protéines végétales mais nous enlève le Phosmet sur colza sans autre solution avant 3 ans »… Le député Gauvain ne s’attendait pas réellement à une telle charge de questions concrètes sur la réglementation en ce 28 janvier à Buxy.
Après avoir remis les 30 propositions « pour un projet présidentiel ambitieux » de la FNSEA, le secrétaire général de la FDSEA, Benoit Regnault rappelait la demande générale de la profession : « arrêtez d’en mettre toujours plus sur le dos de l’agriculture Française. Arrêtez de rajouter des contraintes de non-utilisation qui créent des distorsions de concurrence. Partez de la technique, du terrain ». Car lorsque le président de l’Union viticole 71, Patrice Fortune demandait des précisions pour les ZNT sur les matériels homologués, les produits de biocontrôles, la définition d’un travailleur… « on est dans de gros flous » en plus de devoir affronter la pression sanitaire et le changement climatique.

Incompréhensions de partout

« Les associations environnementales ne font que cogner et décourager la profession. Dans les médias, elles exposent le monde agricole au-delà du raisonnable d’où une incompréhension avec la société civile », analysait Bernard Lacour, président de la chambre d’Agriculture.
Le député Gauvain a pris conscience de ces tensions, puisqu’il a lui-même été « insulté » et menacé par des antivax lui renvoyant en miroir le fameux "principe de précaution" sur les dangers supposés des vaccins. Comment ne pas faire le parallèle avec ce que vit l’agriculture qui doit soigner ses plantes et animaux pour nourrir les populations et est accusée en retour de n’être que des pollueurs ou de maltraiter ses animaux.
Des contradictions qui se font jour sur tous les sujets. « Le Gouvernement se fait fort de rétablir la souveraineté alimentaire », tentait Raphaël Gauvain. « La Pac va m’imposer encore plus de jachères improductives », le taclait en retour Cédric Tissot, polyculteur-éleveur.
« L’agriculture est plus une solution qu’un problème sur le climat », veut plutôt convaincre Benoit Regnault. Et elle est sa première victime. La crue de juillet dernier a eu un « impact majeur » pour les 300 agriculteurs du secteur touchés, qui ne peuvent que constater que les prises en charge de cotisations MSA ou le dégrèvement de TFNB ne suffiront pas à compenser les pertes. Une jeune agricultrice d’Ouroux-sur-Saône, Justine Petiot « a éclaté mentalement » car depuis son installation il y a 5 ans, elle a enchaîné les sécheresses jusqu’à voir 150 ha inondés, la moitié de son exploitation. La profession agricole redemandait des aides calamités exceptionnelles, comme pour les vignerons qui ont été victimes du gel d’avril 2021.

« Mettez les mains dans le cambouis »

« Ça fait 30 ans que les problèmes sont identifiés : digues, fossés… mais quand on fait une réunion avec le Préfet, c’est l’OFB qui décide », ne comprend pas Rémy Petit. Les établissements publics de bassin ou les Agences de l’eau dépendant du ministère de l’Environnement, la profession agricole demandait que « les parlementaires mettent les pieds dedans, les mains dans le cambouis » pour que les solutions soient prises.
Et de dire que voter une loi n’est pas suffisant, il faut aussi la faire appliquer. « La loi ÉGAlim 1 a été un flop magnifique. Depuis 2016, la décapitalisation du cheptel continue », s’impatiente Jean-Pierre Bon pour la section bovine, qui ne voit toujours rien venir d’ÉGAlim 2 en termes de justes revenus pour les agriculteurs. En réunion la veille à ce sujet, l’attaché du Ministre à Bercy confirmait le bras de fer des négociations entre agriculteurs, transformateurs et distributeurs. « On sanctionnera très sévèrement les abus », promettait-il, reprenant les mots du ministre de l’Agriculture. 250 contrôles sont engagés par la DGCCRF.
À l’image de Leclerc, les distributeurs se veulent les défenseurs du pouvoir d’achat. Est-ce que ces « loups » économiques continueront de faire autant de victimes que les loups qui s’attaquent aux troupeaux de Saône-et-Loire ?
Il y a urgence à « redonner des perspectives » avant une décennie de renouvellement important des générations. « L’agriculture est le socle de notre histoire et culture et c’est 19 % des emplois ». « Communiquer plutôt sur ce qu’on fait de bien », réclamait Ludovic Cottenceau avant de déboucher une bonne bouteille. « J’ai bien pris note », concluait Raphaël Gauvain.