EXCLU WEB / Asie : la Chine, maître du commerce

Depuis le 1er janvier, quinze pays de la zone Asie Pacifique appliquent de nouveaux accords commerciaux avec une réduction des droits de douane et une simplification des normes qui créent autour de la Chine et du Japon un nouvel espace économique géant.

EXCLU WEB / Asie : la Chine, maître du commerce

La Chine, le Japon, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Corée du Sud, l’Indonésie, la Malaisie le Vietnam, le Cambodge font partie de la nouvelle zone de libre-échange géante qui se met en place en Asie et dans le Pacifique, baptisé RCEP - pour “partenariat économique régional global”. Un véritable coup de maître pour la Chine, d’après les experts, qui a réussi à attirer des pays habituellement sous influence occidentale. De nombreux produits agricoles et agroalimentaires vont être concernés par une baisse des droits de douane et une unification des normes - ce qui devrait changer les stratégies des pays exportateurs, et les échanges.

Les chiffres du nouvel espace économique sont vertigineux. Il s’agit d’un tiers du commerce mondial, soit une zone pesant 25 000 milliards de dollars (Md$), dont 15 000 Md$ pour la Chine et 5 000 Md$ pour le Japon. Selon le Peterson Institute, un think-tank américain, l’accord va générer une augmentation du PIB de la zone de 150 à 200 Md$ d’ici 2030, Les 15 signataires vont baisser ou supprimer les droits de douane sur 91 % des produits échangés. Dans un premier temps, les droits de douane appliqués à l’importation sur les biens agricoles pour le Japon vont baisser de 61 %, ceux de la Chine de 56 % , ceux de la Corée du Sud de 49 %. Mais les droits de douane seront maintenus sur le riz, le blé, les produits laitiers, le sucre, le bœuf et le porc pour protéger les fermiers locaux.

Influence accrue

Pour les exportations japonaises, la Chine et la Corée du Sud vont progressivement éliminer les frais de douanes sur le saké et le shochu. Dans le cas de la Chine, le taux de taxe douanier passera de 40 % à zéro après vingt-et-une années. En Corée du Sud, le taux de 15 % sera éliminé après quinze années. Les droits de douane chinois de 10 % sur les coquilles saint jacques et les pétoncles japonais seront également supprimés… Des milliers de produits sont concernés, pays par pays, et un échéancier de mesures sur les vingt prochaines années. L’Inde a failli faire partie du RCEP, pour finalement y renoncer : les deux années de manifestations paysannes en Inde visant à libéraliser le marché se sont soldées par un retrait des nouvelles lois. S’intégrer au RCEP risquait d’enflammer à nouveau les campagnes.

Ainsi, malgré les conflits et menaces locales de la Chine vis-à-vis notamment du Japon, de l’Australie ou de la Corée du Sud, son influence s’accroît et des pays pourtant proches des États-Unis ont estimé qu’il était de leur intérêt de rallier le nouvel espace économique. Alors qu’à l’inverse, malgré l’accord signé avec Donald Trump en janvier 2020, la Chine et les États-Unis, ont augmenté leurs droits de douane respectifs qui freinent les échanges et cet accord ne sera de toute façon pas respecté par la Chine, loin s’en faut. À date, il manque 150 Md$ d’achats chinois aux États-Unis pour respecter l’accord visant à rééquilibrer la balance commerciale. Pis, les Américains se sont retirés d’une autre zone de libre-échange entre les États-Unis et le pays de Pacifique, le TPP, couvrant onze pays que l’on retrouve dans le RCEP, comme le Japon, l’Australie et la Nouvelle Zélande. En quelque sorte, la Chine a remplacé les États-Unis et Joe Biden, pris au dépourvu, ne semble pas avoir de nouvelle ambition économique dans la zone contrairement à celle qu’il a du point de vue militaire, comme l’a montré l’affaire de la vente de sous-marins à l’Australie dont la France a fait les frais. La guerre commerciale sino-américaine se poursuit, et pour l’instant, c’est bien la Chine qui continue de marquer des points.