EXCLU WEB / TRIBUNE Brice Guyau : Avec plus 36 % de budget, la PAC conforte l’agriculture biologique

La répartition du budget de la Politique agricole commune (PAC) est, par nature, un sujet complexe : elle prend en compte l’ensemble des situations, la diversité des productions et des territoires, en bio et en conventionnel. L’arbitrage est avant tout une question d’équilibre, pour accompagner l’activité de tous les agriculteurs français, il ne doit pas défavoriser certains au profit d’autres et c’est dans cette logique que la FNSEA s’est positionnée dans le cadre des négociations.

 

Depuis plusieurs semaines, les arbitrages de la PAC, actuellement en voie de finalisation, s’accompagnent de vives réactions sur la question du financement de l’accompagnement de l’agriculture biologique. Face à certaines prises de positions et interpellée par des chiffres alarmistes dont la construction peut, elle aussi, être questionnée, la FNSEA souligne quelques éléments d’éclairage pragmatiques, en fonction des données PAC connues à ce stade des négociations.

 

Rappelons, tout d’abord, que de manière générale le budget annuel FEADER dédié à l’agriculture biologique passe de 250 millions d’euros sur la programmation en cours à 340 millions d’euros dans la prochaine programmation PAC, et ceci sans prendre en compte le budget des éco-régimes dont bénéficieront les agriculteurs bio de manière automatique. Cela représente une hausse de 36 %, pour un budget total de 1,7 milliard d’euros. Non seulement cette hausse vise à accompagner un nombre plus important de conversions, elle pourra également permettre une revalorisation des aides à la conversion aux agriculteurs. 

 

Pointons également que le financement actuel a entraîné une grande hétérogénéité des soutiens au travers de l’aide au maintien et est à l’origine de distorsions entre régions. Dans la programmation en cours, les agriculteurs bio peuvent bénéficier d’une aide au maintien dans le cadre du second pilier, sous réserve de financement par leur région. La plupart des régions ont fermé l’aide au maintien à partir de 2017 ou mis en place un plafond (de 5 000 à 7 500 euros selon les régions). Dans ce contexte, il paraît difficile d’estimer l’effet global du passage d’une aide au maintien à un soutien via l’éco-régime : la variation sera négligeable dans certaines régions comme le Centre-Val-de-Loire ou le Grand Est où les agriculteurs ne bénéficient plus de soutiens spécifiques mais la perte pourrait être très élevée en Ile de France ou en Normandie où les soutiens ne sont pas plafonnés.

 

De fait, la nouvelle architecture environnementale et le passage à un éco-régime accessible à l’ensemble des agriculteurs bio ne devrait pas entraîner de variations conséquentes des soutiens. Les agriculteurs bio, du fait du respect d’exigences environnementales, devraient être directement éligibles à l’éco-régime et donc accéder à l’ensemble des aides du premier pilier. Cependant, l’interdiction de double financement dans le règlement financier européen ne permet pas de financer pour le même engagement des actions par des voies différentes : la certification biologique donnant l’accès à l’éco-régime de niveau supérieur, du fait du respect du cahier des charges et ce dès la première année de conversion, le simple fait de respecter ce cahier des charges ne permet pas d’ouvrir d’aide au maintien dans le cadre du second pilier.

 

Pour pallier la perte de l’aide au maintien, les agriculteurs bio pourront bénéficier d’un crédit d’impôt dès lors qu’au moins 40 % de leur chiffre d’affaires provient de productions certifiées bio. Ce crédit d’impôt bio s’élève à 3 500 € et il est cumulable avec les autres aides bio du second pilier dans une limite de 4 000 € de soutiens au total. Cela signifie qu’un agriculteur qui n’aurait plus accès à l’aide au maintien dans une région où celle-ci est plafonnée à 6 000 euros (exemple de la Nouvelle Aquitaine) pourrait bénéficier d’un soutien de 3 500 euros (net d’impôt et de charges sociales, que l’on pourrait estimer en moyenne à 5 000€ de subvention, donc une perte de 1 000 €).

 

Toutefois, il est légitime de se poser la question d’une aide complémentaire dans le second pilier de type reconnaissance des externalités positives de l’agriculture biologique. Au-delà de la conversion, des engagements MAEC supplémentaires ou des investissements peuvent être financés dans le second pilier en plus de l’éco-régime. Ce financement peut intervenir sur fonds État (Agences de l’eau) concernant les aides surfaciques. L’enjeu pour un certain nombre de Régions sera de trouver la bonne voie juridique et technique pour préserver les fonds qu’elles ont éventuellement octroyés à l’agriculture biologique.

 

Avec 8 % de surfaces et jusqu’à 13 % dans certains secteurs, l’agriculture biologique a réussi son essor et a rencontré son marché. Il faut veiller à maintenir cette valorisation permise par l’agriculture biologique en ayant aussi une approche économique. Le prix payé au producteur doit permettre de prendre le relai pour couvrir les charges après les cinq années de soutien à la conversion.

 

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