Les brèves du 2 juin 2023

Mis en ligne par Cédric Michelin
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Voici les brèves du 2 juin 2023

Les brèves du 2 juin 2023

Engrais : le gouvernement étudie la création d’une taxe sur le modèle des biocarburants

À l’occasion de l’assemblée générale de l’Unifa (fabricants d’engrais) le 1er juin, le directeur adjoint du cabinet de la ministre de la Transition énergétique, Pierre Jérémie, a évoqué une « piste exploratoire » pour diminuer l’empreinte carbone des engrais azotés. Des « travaux interministériels » sont en cours pour répliquer, dans le monde des engrais, le principe de la taxe incitative à l’incorporation de biocarburants (Tirib), précise le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher, à Agra Presse. L’idée serait ici d’inciter à la vente d'« engrais verts », c’est-à-dire moins émetteurs de gaz à effet de serre, tels que des engrais azotés fabriqués avec de l’hydrogène vert (issu d’énergies renouvelables). Pour rappel, la Tirib est imputée aux distributeurs de carburants, et son taux, fixé à 7,9 %, est diminuée à proportion de la part de biocarburants vendue. Dans son projet initial de loi Climat en 2021, le gouvernement prévoyait la création d’une taxe sur les engrais azotés à horizon 2024. Lors de l’examen, les parlementaires avaient conditionné sa mise en place à « deux années consécutives » de non-respect des objectifs de réduction des émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote. Prenant acte du rejet du principe d’une redevance forfaitaire sur les engrais azotés par la profession, le ministère de la Transition énergétique a « réfléchi » à plusieurs pistes, dont « ce type d’outil qui a des effets plus doux », indique le cabinet.

 

Pesticides : des fabricants n’ont pas transmis des études sur la toxicité à l’UE (étude)

Dans une étude publiée le 1er juin par la revue Environnmental Health, le chimiste Axel Mie et la toxicologue Christina Rudén montrent que plusieurs fabricants de pesticides ont soustrait aux autorités européennes des résultats défavorables de tests de toxicité pour le neurodéveloppement fœtal menés entre 2001 et 2007. Selon le Monde (article payant), ces tests mettaient en évidence les effets délétères de leurs substances sur des animaux de laboratoire exposés in utero. Pour parvenir à ces résultats, les deux scientifiques suédois ont comparé les données transmises par les fabricants de pesticides aux autorités américaines, d’une part, et européennes, d’autre part. Ils ont ainsi pu identifier neufs pesticides* pour lesquels plusieurs industriels – dont Bayer et Syngenta – ont réalisé et soumis des études de neurotoxicité développementale à l’Environment Protection Agency (EPA) américaine, mais pas à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa). Les industriels interrogés par le Monde assurent avoir scrupuleusement suivi la réglementation européenne. Selon eux, elle n’exigeait pas d’études de neurotoxicité développemental dans les dossiers réglementaires au moment des faits. Dans leur étude, Axel Mie et Christina Rudén suggèrent de modifier les règles pour que les études soient commandées par les autorités publiques.
* Abamectine, éthoprophos, buprofézine, fénamidone, fénamiphos, fluaziname, glyphosate-trimésium, pymétrozine, pyridabène

 

Bio : net ralentissement des conversions en 2022 (Agence bio)

Le nombre de producteurs engagés en agriculture biologique n’a progressé que de 3,5 % en 2022, contre 9 % l’année précédente, constate l’Agence bio dans son rapport annuel paru le 1er juin. Un solde qui traduit d’abord un « coup de frein dans la dynamique des conversions », puisque les déconversions restent relativement stables à 5,6 %, contre 4 à 5 % l’an passé (voir notre article). On compte environ 60 000 exploitations en bio, soit 14,2 % du total des fermes françaises. La dynamique est pour l’instant moins bridée en surfaces, avec une hausse de 10 %, contre 9 % l’an passé. Mais cela pourrait changer d’ici trois ans : les surfaces en 1re année de conversion reculent de 40 %. Compte tenu des surfaces engagées en 2e et 3e année, l’agence s’attend à une nouvelle augmentation de 10 % en 2023. Les surfaces bio représentent 2,87 millions d’hectares, soit 10,7 % de la surface agricole utile française. Les dynamiques sont très diverses selon les filières, avec de nets reculs de cheptel en porc et poulet, et des hausses de surfaces soutenues en grandes cultures, fruits à noyau et pépins, vigne. Pour la première fois, le nombre d’entreprises de l’aval certifiées a reculé (-2,2 %, à 28 547). L’Agence bio rappelle que le nombre de points de vente a reculé de 5,3 % fin 2022, selon Biolinéaires. Les ventes de bio ont reculé de 4,6 % sur l’année 2022, surtout en viande (-13 %) et en fruits (-7 %).

 

Vin : le feu vert à la distillation est « une question de jours » (FranceAgriMer)

« La distillation se fera, c’est une question de jours », a indiqué Jérôme Despey, président du conseil spécialisé vin de FranceAgriMer, le 1er juin à Agra Presse. Cette mesure avait été annoncée le 6 février par Marc Fesneau pour aider la filière viticole en crise. Le feu vert de l’UE est désormais imminent, selon les éléments communiqués à la réunion de FranceAgriMer. Un projet d’acte délégué a été transmis le 31 mai par Bruxelles, validant les prix de distillation : 45 €/hl pour les vins sans IG, 65 €/hl pour les IGP et 75 €/hl pour les AOC. Le 1er juin après-midi, des discussions sur les modalités techniques restaient en cours dans un groupe d’experts auprès de la Commission européenne. « Nous attendons la validation de l’acte délégué dans les heures ou les jours à venir, déclare Jérôme Despey. La distillation doit démarrer le plus rapidement possible pour ne pas perturber les vendanges. Un attentisme règne sur le marché en attendant sa mise en œuvre qui concerne près de 3 Mhl. » Le ministère de l’Agriculture prévoit une enveloppe de 160 M€ pour la distillation (80 M€ venant de l’État, 80 M€ de fonds européens). Un complément de 40 M€ est attendu via la réserve agricole de l’UE.

 

Foncier : vers un accord sur le « zéro artificialisation nette » au Parlement (Béchu)

Le texte visant à faciliter la mise en œuvre du « zéro artificialisation nette » (ZAN) des sols sera examiné le 21 juin à l’Assemblée nationale, et un accord parlementaire se dessine, a déclaré le 1erjuin le ministre de la Transition écologique. Une proposition de loi (PPL) visant à « corriger » la loi Climat de 2021 a été votée en première lecture mi-mars au Sénat, mais Christophe Béchu avait jugé que les dispositions adoptées ouvraient « trop largement la porte » à l’artificialisation. « Nous avons inscrit un texte sur le Zan, le débat aura lieu le 21 juin à l’Assemblée nationale », a-t-il déclaré le 1er juin en marge des Assises de l’Association des petites villes de France (APVF). « Il y a un chemin qui est en train de se dessiner pour faire en sorte qu’on ait idéalement avant la mi-juillet un dispositif complet applicable, loi et décret », a-t-il ajouté. Une partie du texte sera présentée par décret, notamment la « nomenclature » – c’est-à-dire la définition de ce qu’est un espace naturel, agricole ou forestier –, tandis que l’autre partie fera l’objet d’un débat législatif. Les députés discuteront notamment de la « garantie rurale », c’est-à-dire d’une surface minimale artificialisable réclamée par les communes rurales.

 

Influenza : ouverture du guichet pour le solde des indemnisations post-restrictions 2022

Du 2 au 30 juin, les aviculteurs peuvent déposer sur le site de FranceAgriMer leur demande de solde pour les indemnisations couvrant les pertes économiques liées à l’influenza aviaire après la levée des restrictions sanitaires (dispositif « I3 »). Accordée exceptionnellement en 2022 « compte tenu des effets de l’influenza aviaire […] sur le maillon sélection-accouvage », cette enveloppe de 56 M€ « vise à compenser, en partie, les défauts d’approvisionnement majeurs », rappelle l’organisme public. Elle s’adresse aux éleveurs de volailles (y compris gaveurs ou sous intégration) affectés par des zones réglementées mises en place « entre le 26 novembre 2021 et le 15 septembre 2022 inclus », et ayant repris leur production « au plus tard le 31 mars 2023 ». Comme le rappelle FranceAgriMer, « l’État prend en charge à hauteur de 50 % les pertes post-restrictions sanitaires, sur une durée cumulée maximale de 120 jours ». Par ailleurs, le dispositif I3 vise aussi à couvrir l’impact des « mesures prises au sein des zones à risque pour limiter les densités de volaille lors des périodes à risque épizootique élevé » (plan Adour). Dans ce cas, les producteurs seront indemnisés à 100 % « pour les jours de vide prolongé constatés sur la période du 16 septembre 2022 au 31 mars 2023 inclus ».

 

Porc : résultats prometteurs pour deux vaccins vietnamiens contre la PPA (presse)

« Des essais ont montré la sécurité et l’efficacité » du vaccin contre la peste porcine africaine (PPA) de l’entreprise vietnamienne Avac, indique le site Pig Progress le 31 mai (article en anglais). Ce vaccin vivant a été testé en décembre 2022 aux Philippines, sur plus de 270 000 cochons dans 226 fermes d’engraissement. « Quatre semaines après la vaccination, tous les porcs étaient en bonne santé, avec une réponse immunitaire atteignant les 94,85 % », précise le média spécialisé. Cette protection pourrait « durer quatre mois », selon le directeur général d’Avac Nguyen Van Diep. De son côté, l’entreprise Dabaco a annoncé démarrer en juin « la production de masse de vaccin contre la PPA » pour une commercialisation envisagée au dernier trimestre 2023, apprend-on sur le site Asian Agribiz (article en anglais). Après un échec lors de premiers essais, ce vaccin lyophilisé a obtenu des « résultats favorables » lors d’une seconde session, avec un « taux de protection de 100 % », selon son président Nguyen Nhu So. Hormis Avec et Dabaco, le gouvernement vietnamien avait déjà autorisé, en juin 2022, un premier vaccin (Navetco) réalisé en partenariat avec les États-Unis. Une homologation suspendue quelques semaines plus tard après la mort de « douzaines de cochons » inoculés avec ce vaccin.

 

États-Unis : l’accord sur la dette devrait débloquer les discussions sur le Farm bill

Le président des États-Unis Joe Biden (démocrate) et le président de la Chambre des représentants Kevin McCarthy (républicain) ont annoncé le 28 mai avoir trouvé un accord sur un plan de suspension du plafond de la dette jusqu’en 2025, éloignant le risque d’un défaut des États-Unis. Dans la foulée, les élus de la Chambre des représentants se sont prononcés le 31 mai à une très large majorité en faveur du texte. Pour convaincre le camp républicain, Joe Biden a dû faire des concessions sur le programme d’aide à la nutrition, inscrit dans le Farm bill (la loi agricole américaine), en acceptant des restrictions supplémentaires sur les bénéficiaires. Cet accord devrait permettre de débloquer les discussions qui tournaient au ralenti sur le futur Farm bill, alors que la législation en place expire le 30 septembre. Le Bureau du budget du Congrès a publié le 12 mai une nouvelle estimation du coût du Farm bill pour les dix prochaines années. Son budget pourrait atteindre le chiffre record de 1510 milliards de dollars, soit 31,5 milliards de dollars de plus que la précédente estimation du mois de février, à cause de l’inflation mais aussi de la hausse des dépenses du programme d’assistance nutritionnelle (Snap). Comme souvent aux États-Unis, c’est ce programme Snap qui cristallise les débats. Le camp républicain souhaitant couper une partie des dépenses.

 

Légumes/aquaponie : « l’un des plus grands » sites en Europe voit le jour en Gironde

Dans un communiqué paru le 1er juin, la région Nouvelle-Aquitaine annonce l’inauguration, ce vendredi, de « l’une des plus grandes fermes aquaponiques d’Europe » à Mérignac (Gironde). Pour rappel, l’aquaponie est une technique combinant pisciculture et production végétale. Construit par la start-up Les nouvelles fermes, ce site atteindra la surface de 5000 m2. C’est deux fois plus que le site de production historique de son concurrent français Nutreets à Divatte-sur-Loire (2000 m2), ou qu’un site de la même société acheté par l’hôtelier Accor à Orly (2000 m2 également). La France compte actuellement 21 sites de production professionnels, selon cette carte mise à jour par l’Itavi. En 2021, la plupart des fermes existantes étaient des micro-fermes de moins de 2 000 m2 (voir notre article). Aucune grosse ferme de 1 ha ou plus n’était alors sortie de terre. Avec ce site, la start-up veut « valider l’équation technique et économique » à cette dimension, avant de « dupliquer le modèle sur d’autres fermes dans les grandes métropoles en France ».

 

Sucre : le chiffre d’affaires de Tereos porté par la hausse des prix

« Nous avons retrouvé le chemin de la croissance », s’est réjoui le président du conseil d’administration de Tereos, Gérard Clay, à l’occasion d’une conférence de presse sur les résultats du groupe pour l’exercice 2022/2023. Et d’ajouter que la « stratégie de relance engagée fin 2021 a porté ses fruits ». « Nous avons abandonné la stratégie des volumes, qui s’est avérée destructrice ces dernières années », précise Olivier Leducq, directeur commerce pour le groupe (voir notre article). Le chiffre d’affaires (CA) du groupe sucrier s’élève ainsi à 6 Mrd€, en hausse de 29 % par rapport à l’année passée. Selon Tereos, le CA a été tiré « par la hausse des prix du sucre et de l’éthanol », alors que « l’effet volume a été quasiment nul », rapporte Gwenaël Elies, directeur financier chez Tereos. En période d’inflation, « le sucre a tiré son épingle du jeu et la demande n’a pas baissé », ajoute Olivier Leducq, qui prédit que les niveaux de prix « devraient rester élevés ». Dès l’année prochaine, le groupe versera 2 € de dividende par tonne de betteraves ensemencées en 2023. Le groupe a néanmoins émis des inquiétudes face à la baisse des surfaces de betteraves sucrières, aux alentours de -20 à -25 % en cinq ans. « La France devient un marché structurellement importateur de sucre, avec 3 Mt de sucre qui seront importées sur le continent en Europe », estime Olivier Leducq.

 

Lobbying : l’agriculture reste le deuxième secteur le plus actif en 2022 (HATVP)

Comme c’est le cas sur la période 2017-2021 (voir notre enquête), l’agriculture s’est placée en 2022 à la deuxième place, derrière la santé, des secteurs ayant fait l’objet du plus grand nombre d’activités de lobbying, selon le dernier rapport de la HATVP (transparence de la vie publique). Ainsi, 7 % des activités déclarées ont concerné l'« agriculture », contre 7,8 % pour le « système de santé et médico-social », auquel on peut adjoindre 3,6 % liées aux « soins et maladies ». La Haute autorité rappelle que le secteur agricole a été particulièrement mobilisé en 2022 autour de la discussion de la proposition de loi Egalim 2. Du côté de la santé, ce sont les conclusions du Ségur de la santé ou les nouvelles lois relatives à l’état d’urgence sanitaire qui ont concentré les efforts de lobbying. Nouveauté de l’année pour le secteur agricole : le réseau des chambres d’agriculture est désormais inclus dans la définition des représentants d’intérêt. Par exemple, la chambre d’agriculture du Loiret a déclaré quatre activités en 2022, tournées vers l’administration centrale (arrêtés sécheresse), la préfecture (« renouvellement des générations »), et des élus locaux (« souveraineté alimentaire »).

 

Photovoltaïque : Olivier Dauger élu co-président de l’association France Agrivoltaïsme

L’association France Agrivoltaïsme a annoncé le 1er juin l’élection d’Olivier Dauger comme co-président, au nom du collège Agriculture. Administrateur à la FNSEA, Olivier Dauger est en charge des dossiers climat, énergies et carbone. Son élection aux côtés d’Antoine Nogier, qui préside France Agrivoltaïsme depuis sa création il y a presque deux ans, intervient après une révision des statuts instaurant une co-présidence avec le collège Agriculture. L’ambition est de construire une filière « qui réponde efficacement aux enjeux de souveraineté alimentaire de notre pays, tout prenant sa place dans le mix énergétique français et européen », déclare Antoine Nogier, cité dans le communiqué. Il s’agit de « construire une agriculture de solution face au changement climatique, notamment en accompagnant le développement des énergies renouvelables », souligne Olivier Dauger.